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Montepaschi Siena, gloire éphémère d’un poil à gratter européen

Europe

Montage Une : Aurélien Sohard pour Basket Rétro

L’Italie du basket, dans les années 2000, a mis en avant un club que personne n’attendait. Bien aidé par un grand groupe financier, le Montepaschi Siena a fait la loi en Lega Basket mais pas que. Véritable épine dans les pieds des équipes d’Euroleague, son ascension a été aussi fulgurante que sa chute vertigineuse.

VILLE OMNISPORTS, INFLUENCE CAPITALE D’IDA NOMI, PROGRESSION DANS LE BASKET

Dans la longue tradition des clubs européens, toutes compétitions confondues et sans préjuger de leurs budgets, il en existe des atypiques. Du genre de ceux qui, à chaque début de saison, sont à éviter pour les mastodontes, notamment d’Euroleague. Capables de mettre à mal les grandes artilleries dans leurs championnats mais également en Coupe d’Europe.  Des clubs typiquement « poil à gratter » qui, avec leurs effectifs pas aussi fournis mais diablement efficaces réussissent la gageure d’être dans le haut du panier chaque saison. Parmi ces équipes aussi difficiles à manœuvrer qu’à cerner pour les adversaires, citons les plus célèbres : l’actuel Saski Baskonia (ou dans ses anciennes versions : Tau Ceramica, Caja Laboral, Tau Vitoria ou Laboral Kutxa), ou bien encore une autre équipe espagnole, avec l’Unicaja Malaga. Sans compter, les deux clubs de Salonique, en Grèce, l’Aris Salonique ou le PAOK voire le Bayern Münich ces dernières saisons. Mais un autre club a hissé haut cette capacité de mettre des bâtons dans les roues à bien des adversaires :  le Montepaschi Siena, en Italie. Un club fondé dans la plus pure tradition des équipes omnisports des sphères étudiantes au 19ème siècle. Misant, dans un premier temps, sur une certaine notion de bien-être avec des activités basées sur la gymnastique. Pour la ville de Sienne, située en Toscane, au centre de l’Italie, il faut également prendre en compte une donnée… bancaire. En effet, la ville est le siège de la plus ancienne banque au monde fondée en 1472. Le Monte (pour mont de piété) dei Paschi di Siena pour son doux nom.

Ida Nomi (au centre en pantalon noir), précurseure du basket italien (Crédit photo : ilcentro.it)

Cependant, au-delà de ces prémices d’activités sportives et de la banque du même nom, le basket de la ville et l’Italie peuvent surtout remercier une dame qui énormément œuvré pour le « pallacanestro » (basket en version transalpine) local. De son nom complet, Ida Nomi Venerosi Pesciolini, née deux ans (en 1873) après la fondation de « L’Associazione Ginnastica Senese Mens Sana in Corpore Sano 1871 ». Et dont le père était professeur dans cette institution, une sorte de sport-études avant l’heure. Ida Nomi est aussi (re)connue comme ayant traduit les 13 règles du basket d’un certain James Naismith, le créateur du basket. En les adaptant pour l’entité de Sienne qui se dote donc d’une section basket féminine à partir de 1907. Un pas de géant à une époque où la condition féminine n’était pas la préoccupation majeure des autorités. Et qui place Ida Nomi au firmament du basket italien par son apport à la création et au développement de la balle orange sur la botte italienne. Pour autant, dans les années 30 à une époque où le professionnalisme est encore loin d’exister, le club de Sienne se dote d’une section basket officielle en 1934.

Ezio Cardaioli, coach qui a passé une bonne partie de sa carrière à Sienne (Créditi photo : archiviofip.photoshelter.com)

« Coincé », dans un premier temps, entre l’arrivée au pouvoir de Benito Mussolini en 1922 et la Seconde Guerre Mondiale, le club de Sienne se concentre davantage sur des disciplines telles que la gymnastique et l’activité physique de ses membres. Pour arriver, peu à peu à se structurer autour du basket à partir du début des années 70. Avec des premiers résultats prometteurs. Après une première montée en Série B lors de la saison 1966-1967, le déclic final se produit enfin lors de la saison 1973-1974, un peu plus de 100 ans après la création du club. Sous la houlette du coach Ezio Cardaioli, natif de la région et qui passe l’essentiel de sa carrière à Sienne (4 mandats en tout entre 1958 et 1989) et d’un noyau de joueurs italiens tels que le meneur international Massimo Cosmelli, le pivot Enrico Bovone, décédé en 2001 et qui remporta une Coupe d’Europe avec le Varèse du grand Dino Meneghin. Ainsi qu’un pivot US au milieu, Carl Johnson, un natif de l’Oregon qui apporte un grain de diversité venu d’Outre-Atlantique. Le duo Bovone-Johnson (671 et 686 points lors de la saison) permet même au club toscan de se maintenir avec un bilan de 16 victoires et 10 défaites avec une belle 5ème place lors de la saison 1974-1975. Les saisons suivantes, Siena se maintient aisément avec des places allant de la 7ème à la 9ème. Sans compter, pour agrémenter le tout, d’un quart de finale en Championnat lors de la saison 1978-1979. Grâce à un arrière au patronyme italo-américain, George Bucci, passé par les New York Nets (actuels Brooklyn Nets) et auteurs de 696 points cette saison. Une belle saison donc qui permet au club de participer pour la première fois de son histoire à une Coupe d’Europe. En l’occurrence, la Koraç Cup lors de la saison 1979-1980, seulement éliminé en phase de poules au point-average et avec le même nombre de victoires (trois chacune) par les Israéliens de l’Hapoel Tel-Aviv. C’est donc un club qui commence à faire parler de lui et à obtenir, avec de modestes moyens, des résultats probants sur la scène nationale et européenne.

Enrico Bovone, pivot mobile et agile (Crédit photo : varesesport.com)

CLUB-ASCENSEUR, ARRIVE D’UN MASTODONTE BANCAIRE ET PREMIERS TITRES

Toutefois, ces bons résultats ne masquent pas un problème récurrent pour ce type de clubs : une instabilité (financière) chronique. Siena n’échappe pas à la règle et fait régulièrement le yo-yo, avec peu de moyens, entre première, deuxième voire troisième division au début des années 80. Pour ne finir par remonter en Lega italienne de nouveau que lors de la saison 1990-1991. Pour aussitôt redescendre (15ème sur 16). La remontée suivante est la bonne avec une période de stabilisation intervenant dès lors à partir de la saison 1994-1995. Le club est même qualifié en playoffs (éliminés en huitièmes de finales par Rome, 2-0). Malgré les apports de certaines connaissances futures du basket européen et NBA avec notamment de trois ailiers forts américains. Wendell Alexis, une légende du basket allemand et de l’Alba Berlin (son numéro fétiche, le 12 étant même retiré à Berlin). Dallas Comegys, passé par les Nets et Spurs, puis, plus tard par Fenerbahçe avec İbrahim Kutluay. Et Bob Thornton, passé, lui aux Knicks, 76ers ou aux Wolves à la fin des années 80. Sans compter deux coachs italiens, Gianfranco Lombardi, qui a même représenté son pays durant trois JO (1960, 1964 et 1968) et Sandro Dell’Agnello, ancien international également et coéquipier de la machine à marquer brésilienne, Oscar Schmidt à la JuveCaserta.

Carlo Recalcati, coach vainqueur avec Siena, un club qui commence à faire parler de lui (Crédit photo : eurosport.it/basket)

Des pointures, certes, mais qui reflètent des présences ponctuelles pour Siena et sans s’inscrire de la durée. Cependant, dans cet océan d’incertitude, une arrivée matérialise le début d’un tournant pour le club. Celle d’une banque évoquée plus haut dans ces lignes : le Montepaschi qui accole, à partir de la saison 2000-2001, son nom au côté du club de la ville. Sur le papier, un juste retour des choses et une puissance de feu sans précédent pour le désormais Montespaschi Siena. Fin des noms de sponsors plus que passagers, là encore (Ticino, Olitalia, Comerson, Cx Orologi, Fontanafredda et même Ducato !!). Grâce à la surface financière de la banque, l’équipe locale obtient dès cette même saison, une belle sixième place et se fait éliminer par le puissant Fortitudo Bologna de Carlton Myers, en quart de finale (3-0). Les deux saisons suivantes, même topo avec à chaque fois une progression du club dans le classement. Cinquième en 2001-2002 derrière le Slovène Boris Gorenc et éliminés en quart de finale des playoffs mais surtout, quatrième en 2002-2003 et une demi-finale obtenue face au futur champion, le Benetton Treviso (défaite 3-1). Une belle progression et de beaux résultats face à la crème de ce qui se faisait en Italie à l’époque entre les clubs de Bologne, de Trévise, de Milan, de Varèse, de Rome ou encore de Cantù. Mais l’apogée de cet investissement intervient, en Championnat, lors de la saison 2003-2004. Sous la houlette de l’expérimenté Carlo Recalcati, coach titré notamment en Coupe d’Europe (en Saporta et Koraç avec Cantù) le Montespaschi Siena renverse tout sur son passage. Première place de saison régulière devant le Skipper Bologne, Benetton Treviso et le Scavolini Pesaro, excusez du peu (!!), l’équipe de Toscane remporte également ses 9 rencontres de playoffs. Trois fois 3-0 d’abord contre l’équipe de Varèse du meneur US Jerry McCullough (passé par Gravelines et Pau-Orthez) Puis, le même score contre le Pesaro de la paire Marko Milič et Sasha Djordjevic et enfin une finale en apothéose face au Bologne de l’Argentin Carlos Delfino, de l’arrière serbe Miloš Vujanić et du Slovène Matjaž Smodiš.

La finale de Saporta Cup remportée par le Montespaschi Siena (Crédit vidéo : Youtube – Retro Sport Archive Collector)

Avec déjà un bel effectif au sein du Montespaschi composé des pivots italiens Giacomo Galanda et Roberto Chiacig, Champions d’Europe à Paris avec la sélection italienne en 1999. De l’actuel assistant des Brooklyn Nets, l’arrière américain David Vanterpool, du pivot australien à la carrière extensible, David Andersen, d’un autre arrière US, Bootsy Thornton. Plus, un ailier grec avec Michalīs Kakiouzīs, un arrière serbo-grec, Dušan Vukčević, d’un ailier-fort lituanien, Champion d’Europe avec son pays lors de l’Euro 2003, Mindaugas Žukauskas. Enfin, des meneurs Marco Sambugaro (Italie) et Macédonien Vrbica Stefanov. Et pour la petite histoire, un petit jeune de 17 ans et futur international, débutant sa carrière, Luigi Datome, passé par la NBA (Pistons, Celtics), Fenerbahçe et actuellement à l’Olimpia Milano. Un effectif taillé pour l’Euroleague et drivé de main de maître par Recalcati qui met à l’œuvre toute sa science du coaching. Un investissement rondement mené également et qui permet par ricochet au généreux sponsor de maximiser sa marque basket en trois ans avec ce titre de Champion d’Italie. Mais pas que sur le sol italien. En effet, Siena continue sur une lancée entamée dès la saison 2001-2002 sous la houlette du coach turc Ergin Ataman et remporte la Saporta Cup. Pour ce seul (et unique) titre européen, glané à Lyon, le Montepaschi Siena a pu compter, outre Žukauskas, Chiacig, Gorenc et Stefanov, ainsi que le Serbe Milenko Topić, sur une légende européenne en la personne de Petar Naumoski. En finale, face aux Espagnols du Pamesa Valencia (81-71), les Italiens triomphe grâce à deux belles performances de leurs meneurs macédoniens : avec 23 points pour Naumoski et 17 pour Stefanov. Le début de l’état de grâce pour le Montespaschi qui devient à partir du début des années 2000, une équipe qui compte désormais dans le panorama européen.

Petar Naumoski dans ses oeuvres (Crédit photo : PHILIPPE MERLE/AFP via Getty Images)

DE SUCCÈS EN TRIOMPHES ET VALEUR SURE EN EUROLEAGUE

Dès lors, après le premier titre obtenu sur le plan national, les deux saisons suivantes sont des copiés-collés. Siena fini à chaque fois troisième entre 2004 et 2006 en saison régulière et se retrouve éliminé par la Virtus Roma en quart de finale. Payant sans doute une débauche d’énergie avec l’Euroleague en parallèle. Car, au-delà du championnat, ces deux années sont celles de l’apprentissage pour ce « jeune » club au niveau Européen. Pour la saison 2004-2005, le Montespaschi Siena termine cinquième dans la première phase et est éliminé en seconde partie de saison (troisième derrière le Maccabi Tel Aviv et les Turcs d’Ülkerspor qualifiés en quarts). 2005-2006, est une saison morne puisque les Italiens sont éliminés dès la phase de poule dans un groupe de la mort : Unicaja Malaga, le Panathinaïkos, le CSKA Moscou, le Real Madrid et une nouvelle fois Ülkerspor. Un apprentissage difficile donc mais qui est le point de départ d’une double détente à venir. En Italie, finie la domination de Bologne ou Trévise, place à Siena car, à partir de la saison 2006-2007, le Montepaschi rafle consécutivement 5 titres de Champion. En dominant de la tête, des épaules et des jambes la concurrence avec quelques artificiers passés maîtres dans l’art de dynamiter les défenses adverses. Et qui sont aussi la fidélité incarnée à une époque où les carrières peuvent ne pas excéder parfois 6 mois dans un même club… Parmi ces joueurs, citons l’arrière lituanien Rimantas Kaukėnas, le meneur US Terrell McIntyre, tous deux quatre saisons en Toscane. L’arrière à tout-faire centrafricain Romain Sato (4 saisons), un autre couteau suisse en la personne de Shaun Stonerook (7 saisons), un ailier-fort US ou encore le pivot nigérian Benjamin Eze (6 saisons). A ces fidèles s’ajoutent également le massif pivot lituanien Kšyštof Lavrinovič, que l’on distinguer de son frère jumeau, Darjuš, par son tatouage au bras gauche. Citons également son compatriote, Jonas Mačiulis, l’arrière US Bootsy Thornton ou encore le meneur Bo McCalebb, Américain de naissance mais naturalisé… Macédonien, dans la plus pure lignée des meneurs de ce pays passés en Toscane. Ce même McCalebb permettra également à son pays « d’adoption » de l’époque que l’on nomme aujourd’hui Macédoine du nord de finir quatrième lors de l’Eurobasket 2011 en Lituanie. Enfin, sans transition, « the last one », l’homonyme du chanteur américain, Bobby Brown, meneur de jeu de son état est à signaler dans un club qui a vu également passé le Turc Mirsad Türkcan, les Grecs Nikos Zisis, Efthimios Rentzias et Michalis Kakiouzis, le bosno-américain Henry Domercant ou encore le shooteur frénétique serbe, Igor Rakočević. Ainsi que les Américains David Hawkins, un arrière bondissant, le pivot Lonny Baxter, drafté par les Bulls en 2002 ou encore le regretté arrière Alphonso Ford. Décédé en 2004 d’une leucémie, ce dernier a donné son nom au trophée de meilleur marqueur de l’Euroleague.

Simone Pianigiani, coach du Montepaschi, sosie officiel de Vincent Labrune que les Marseillais connaissent bien (Crédit photo : alchetron.com)

Pour coacher ces durs au mal, rien de mieux qu’un homme du cru, né dans la ville, en la personne de Simone Pianigiani, et ses éternels cheveux gominés à la Pat Riley, qui a passé près de 17 ans au club à tous les échelons. Dans une équipe taillée pour dominer le basket national, avec au final 6 titres de Champions, les statistiques sont dès lors assez éloquentes. Entre 2006 et 2011, le Montespaschi Siena finit à chaque fois premier de la saison régulière, ce qui n’est pas une surprise. Ce qui détonne, ce sont les nombres de défaites : quatre défaites en 2006-2007 et une seule en playoffs, trois en 2007-2008 et deux en P.O. La saison 2008-2009 étant un chef d’œuvre : une seule défaite au cours de la saison régulière et zéro lors des playoffs !! 2009-2010, même topo avec deux petites défaites en saison régulière et, pour la dernière officielle, en 2010-2011, quatre défaites en S.R. et trois en P.O. En y ajoutant trois Coupes d’Italie (de 2009 à 2011) et six Supercoupe (2004 et de 2007 à 2011), les concurrents locaux sont totalement laminés par cette armada capable de tout écraser sur son passage. Un mastodonte qui réussit également à bien se concentrer en Euroleague après avoir appris de ses erreurs passées. Dès la saison 2007-2008, Siena réussit à se hisser au Final Four d’Euroleague après avoir terminé deuxième de son groupe derrière le CSKA puis en glanant la première place dans la phase de qualification finale devant le Partizan, le Pana et l’Efes Pilsen (aujourd’hui Anadolu Efes) d’alors. Après une victoire expéditive face à Fenerbahçe (2-0), les Italiens se cassent les dents sur le « club-nation » israélien du Maccabi Tel-Aviv en demi-finale du Final Four. Qu’à cela ne tienne, finalement la troisième place de l’édition leur est dévolue derrière les Espagnols du Tau Ceramica avec une belle victoire 97-93 en prime.

Alphonso Ford a marqué son époque au club (Crédit photo : euroleague.net)

Si les deux saisons suivantes (2008-2009 et 2009-2010) voient le Montespaschi respectivement se faire éliminer en quart de finale face au Panathinaïkos de coach Obradović et ne pas passer la phase de poule, la saison 2010-2011 est un remake de la saison 2007-2008. En terminant à la première place de son groupe, Siena finit ensuite second derrière le Real Madrid en phase de poule pour se défaire ensuite 3-1 de l’Olympiakos en quarts de finale. En demi, au Final Four, rebelote avec une élimination face à l’autre club grec, le Pana, coach « Obra » personnifiant le plafond de verre pour le Montespaschi. Pour finalement terminer troisième face au Real Madrid (80-62). Cependant, au-delà de ces résultats marquant une certaine stabilité, le Montepaschi Siena est aussi reconnu pour avoir été un club capable de mettre des bâtons dans les roues à tous ses adversaires. Alignant des joueurs au fil des saisons aux physiques aussi solides qu’à la technique jamais démentie, mélange d’Américains talentueux (McCalebb, McIntyre, Thornton à la mène et à la transition), de Lituaniens (Lavrinovič, Kaukėnas, explosifs des deux côtés du terrain) techniques avec un QI basket et de joueurs africains (Sato, Eze monstrueux à chaque fois) solides et polyvalents, les Italiens ont été parmi les clubs les plus rugueux des éditions d’Euroleague. A la manière d’un Shaun Stonerook, pas le plus visible mais toujours diablement efficace et capable d’apporter en sortie de banc à chaque fois. Un cœur vaillant qui a permis au Montespaschi Siena de rivaliser avec les grosses écuries européennes. Ce qui signifie quatre Final Four au total durant cette décennie bénie (troisièmes en 2003, 2008 et 2011 et quatrième en 2004) pour Siena. Le début de la fin.

Les joueurs du Montespaschi Siena ont souvent levé les bras au ciel. Comme des vainqueurs (Crédit photo : euroleague.net)

CHUTE BRUTALE, FAILLITE D’UN MODÈLE ET RETOUR A LA CASE DÉPART ?

Pourtant, dans la vie, rien n’est jamais acquis et le Montespaschi Siena va l’apprendre à ses dépens. A l’instar du film « Chute libre » de 1993 avec Michael Douglas, le Montepaschi Siena tutoie les sommets pour mieux tomber à la renverse dans un enchainement improbable de déchéances. Certes, dans un premier temps, les résultats suivent lors des saisons 2011-2012 et 2012-2013 avec deux titres de Champions d’Italie, obtenus face à Milan et la Roma, malgré douze défaites en saison régulière (en 2012-2013), une première pour le club depuis 2006. Ainsi qu’en Euroleague, avec respectivement un quart de finale perdu 3-1 face à l’Olympiakos en 2012. Mais la tempête approche force 10 et le début de la fin n’est pas loin. A l’instar des scandales qui ont secoué le foot italien en 2006 avec le « Calciopoli » qui voit une institution comme la Juventus Turin être rétrogradé en deuxième division. Ou pire, comme Parme, en 2015, relégué carrément en Série D en raison de problèmes financiers et des irrégularités, pour ne pas dire fraudes, de son principal sponsor, la société Parmalat. Le Montespaschi Siena se retrouve dans une situation identique à partir de 2012-2013. En cause ? Des dettes cachées, de la fraude fiscale bien camouflée par les dirigeants de la banque Montespaschi et un maquillage de comptes qui entraîne une faillite pour le groupe bancaire. Et même une crise politique en Italie avec l’implication du Président de la Banque centrale européenne, Mario Draghi, dans l’affaire. Bref, après la crise des « Subprime » qui a secoué le monde (et les banques qui ont été renflouées par les états) en 2008, la nouvelle fait l’effet d’une bombe pour toute la ville de Sienne. Un modèle de « stabilité » s’écroule dès lors et les catastrophes s’enchaînent en cascade provoquant le départ de nombreux joueurs et du coach historique, Pianigiani, en 2012.

Une des dernières apparitions de Shaun Stonerook dans le club. Il quittera Siena en 2012 (Crédit photo : gazzetta.it, fotografo: CIAMILLO)

Sur le terrain, cette saison est le baroud d’honneur de ce qu’il reste du club dans ce tumulte. En 2012-2013, Siena remporte le titre national face à la Roma, pour ce qui sera son dernier trophée. La saison suivante, l’EA7 Emporio Armani Milano reprend non sans difficultés, le flambeau face à Siena après une finale de haute volée face à son coriace adversaire (victoire 4-3 des Milanais). Montespaschi Siena ayant, même dans la tempête, et grâce à l’apport de trois Mousquetaires US, Marquez Haynes, Othello Hunter et Erick Green, lutté jusqu’au bout de ses forces sur le terrain et en dehors. Pour preuve, les deux dernières rencontres de cette finale n’ont été perdues par les coéquipiers de Hunter que, respectivement, de deux et sept points (74-72 et 74-67). Cependant, en raison de difficultés irrémédiables et devant l’impossibilité d’assurer une surface financière suffisante et, surtout, devant l’ampleur du scandale, la sentence tombe. Les deux derniers titres de 2012 et 2013 sont dans un premier temps retirés au club ainsi que deux Coupes d’Italie et une Supercoupe obtenues les mêmes années. Par la suite, Montespaschi est contraint d’abandonner définitivement le club et celui-ci est mis en faillite pure et simple devant le montant de la dette astronomique.

« Entre 2006 et 2009, BMPS se serait engagée dans des opérations risquées sur des produits dérivés financiers avec, à la clé, des pertes qui pourraient aller jusqu’à 720 millions d’euros. » Des chiffres qui font peur !! (Source : ladepeche.fr)

Dès lors, après 14 ans de présence au plus haut niveau, le Montespaschi Siena redevient Mens Sana Siena et repart lors de la saison 2014-2015 en Serie B. Depuis, le club végète dans les bas-fonds des séries d’honneur du basket italien. Alors que retenir de l’histoire ? Une quinzaine d’années de domination absolue en Italie, bien aidée également par une certaine baisse de niveau du championnat par rapport aux années 90. Mais aussi et surtout, des victoires épiques et des joueurs promus puis partis dans des clubs plus réputés. Une présence et une reconnaissance régulières en Euroleague, le Montespaschi Siena a été donc ce club capable de donner du fil à retordre à plus d’un titre(s) en regardant droit dans les yeux ses adversaires. Plus largement, c’est aussi une leçon de vie finalement car l’argent aide mais ne fait pas le bonheur. La capacité de rebond d’un club dépend de sa structuration et des hommes qui la composent. Pour l’avoir oublié et s’être fié sans discontinuer à une institution bancaire plus attirée par le profit, tout un club a été puni. La morale à cette histoire est que le « Mens Sana 1871 Basket », nom désormais officiel du club, peut se référer à son passé et entamer une nouvelle révolution.

Nouveau logo du Mens Sana 1871 (Crédit photo : Wikipédia)

En revenant à ses bases et en suivant les préceptes de Ida Nomi Venerosi Pesciolini dans sa reconstruction. Qui sait alors, peut-être qu’un jour, le club pourra renaître de ses cendres et redevenir une place forte du basket italien. C’est tout le mal que l’on peut lui souhaiter à cette ville férue de balle orange et qui a marqué toute une époque du basket italien. Pour le meilleur mais aussi pour le pire.

About Volkan Ozkanal (30 Articles)
Fan de basket européen, d'Anadolu Efes, de Fenerbahçe du KK Partizan Belgrade et du CSKA Moscou, je voue un culte à l'immense Željko Obradović ainsi qu'à Petar Naumoski, grâce à qui j'ai appris à aimer la balle orange. Passionné également d'histoire, j'essaye de transmettre ma passion à travers Basket Retro.

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