ITW James Banks : ’Michael Young et Bruce Bowen sont des joueurs qui m’ont particulièrement marqué »
Interview
James Banks, légende du SLUC Nancy du début des années 90 et auteur d’une belle carrière universitaire aux Etats-Unis revient enfin sur les terres de ses exploits en France en tant que coach pour le camp d’Ahmadou Keita qui se déroulera à Nancy du 24 juillet au 2 août 2020. Une bonne occasion pour Basket Rétro de le rencontrer et d’échanger sur sa riche carrière.
Basket rétro : Comment avez-vous débuté le basket?
James Banks : j’ai choisi le basket après avoir joué au Baseball et au foot US. J’avais un fort désir de jouer, j’ai joué sur les playgrounds, avec mes potes et à partir de 12 ans je suis rentré dans des structures et je m’y suis mis sérieusement en apprenant les fondamentaux avec mes coaches. Je jouais tous les jours, tous les jours des matchs, de la compétition. Même si vous avez des problèmes Chez vous, vous pouvez jouer au basket, c’est un sport libre.
BR : Vous avez tout de suite été un fort joueur?
JB : Je n’avais pas de qualité particulière pour le basket si ce n’est de travailler dur. J’ai eu la chance d’avoir toujours été un bon shooteur.
BR : Quels joueurs vous ont inspiré?
JB : Je regardais Walt Frazier, Marquis Johnson, Bernard King, Magic Johnson. Je regardais beaucoup de basket et j’essayais de reproduire ce que je voyais avec mes coaches et dans mon jardin. En High School j’ai grandi de 1m85 à 1m95, des coaches qui se sont beaucoup occupés de moi. J’étais un étudiant en High school mais aussi un étudiant du jeu.
BR : Après vos années High School et vos progrès, vous êtes sollicité par un certain nombre d’Universités. Pourquoi avoir choisi l’Université Georgia?
JB : J’étais amoureux d’Atlanta, où je vis encore et j’ai choisi cette université qui était proche. C’est une Université plus petite que celles de New York, Los Angeles. Je voulais faire partie d’une tradition et Georgia University est une université qui porte une tradition. L’autre raison était que je voulais que ma famille puisse me voir jouer le plus possible.
BR : Je crois que vous n’étiez pas le seul joueur à potentiel de cette équipe?
JB : J’ai joué deux ans avec un Hall of Famer, Dominique Wilkins, the Human Highlight Film.
« Je regardais Walt Frazier, Marquis Johnson, Bernard King, Magic Johnson. Je regardais beaucoup de basket et j’essayais de reproduire ce que je voyais avec mes coaches et dans mon jardin ».
BR : Vous lui avez appris à shooter, lui le dunkeur?
JB : Non, mais il shootait tout le temps, toutes les balles. Il m’a aidé à être meilleur, à prendre plus de rebonds offensifs (rires) et à mieux défendre sur un fort attaquant. Je suis toujours en contact avec lui, Il travaille pour les Atlanta Hawks, nous avons perdu deux anciens coéquipiers récemment. Nous parlons beaucoup du jeu, nous avons régulièrement contact. Atlanta construit une très belle équipe, qui sait shooter, qui a un très bel avenir.
BR : Vous avez joué le Final Four, quels souvenirs?

©UGA
JB : La chose drôle est que nous sommes allés au Final Four après le départ de Dominique Wilkins, nous sommes devenus une meilleure équipe, avec plus de cohésion. Nous avons battu VCU, St John’s, de très belles équipes, plus fortes que nous, nous étions classés 13ème équipe NCAA. Notre équipe était petite, le plus grand joueur Terry Fair faisait 2m01, nous étions des challenger. Nous avons joué notre jeu, « Quick and fast ».
BR : Pouvez-vous nous décrire l’ambiance d’une March Madness? Ce doit être quelque chose d’unique?
JB : Votre famille est là pour vous voir jouer, c’était la dernière fois que ma mère est venue me voir jouer, j’ai perdu mes deux parents durant mon Université. Le tournoi, c’est beaucoup d’amusement, c’est un des plus grands événements américains après le Super Bowl. Les meilleurs moments sont ceux avec vos coéquipiers, dans le bus à parler de sa vie, la camaraderie, les causeries d’avant match, même le stress d’avant match. Il est compliqué de se concentrer à cause des sollicitations, les interviews, l’explication des match-ups. Pour résumer, l’aventure est fun, prendre partie à quelque chose de cette ampleur, c’est un peu comme être dans un film.
BR : Quels ont été vos Records? Sont-ils toujours en cours?
JB : Je n’avais pas de record de trois points, il n’y avait pas de ligne à trois points en NCAA en 1983. Ils l’ont instaurée quand je jouais en France. D’ailleurs la ligne à 3 points européenne actuelle est une vraie ligne, contrairement à ce qui existe en NBA avec deux différentes distances.
BR : Une autre question sur cotre époque Universitaire, plus légère. Vous avez fait partie de la Playboy All American Team, quel était le concept?

©PlayBoy Magazine
JB : Oui, ça n’existe plus aujourd’hui. C’était le magazine Playboy qui organisait ça. Dans
l’équipe il y avait Michael Jordan, Akeem Olajuwon, Chris Mullin, entre autres, nous avons pris pas mal de photos ensembles. C’est très drôle d’entrer dans une pièce pleine de Bunny’s pour le shooting photo. Ce fut un grand honneur d’être sélectionné dans cette équipe et permis de tels joueurs.
BR : Prochaine étape, la Draft. Vous avez fait partie d’une des plus belles Draft de tous les temps, celle de 1984. Vous avez été appelé en 48eme position, 3rd round par les Sixers, Aviez-vous une autre équipe en vue?
JB : Je pense que j’aurais pu être drafté plus haut, j’aurais pu me présenter à la fin de mon année de Junior (3ème année universitaire) mais je ne l’ai pas fait pour finir mon cursus. J’ai eu une 4ème année Universitaire plus compliquée, j’ai aussi perdu mon père cette année là. Suite à son décès, mon envie de jouer a disparu, ma passion pour le jeu. Nous étions très proches, nous nous parlions avant et après chaque match.
BR : Avez-vous joué avec les Sixers?
JB : Je n’ai pas joué en NBA et j’ai été coupé par les Sixers. Je suis parti 3 ans en CBA, j’y ai retrouvé mon envie de jouer. Puis, les portes de l’Europe se sont ouvertes à moi. J’ai choisi cette voie. Je n’ai pas joué en NBA mais ça ne me pose pas de problème. J’ai voyagé, joué pour de super équipes avec de très bons jours comme Ahmadou Keita, Claude Williams, nous avons gagné des titres, beaucoup de match et pris beaucoup de plaisir.
BR : Vous êtes venus seuls en Europe ou vous avez pu emmener votre famille avec vous?
JB : Je ne suis pas parti seul en Europe, ma femme est venue avec moi. C’est une magnifique expérience de vie pour nous deux car nous avons grandi ensemble, nous nous sommes soutenu. Nous avons eu une fille quand je jouais à Nancy. Elle fait carrière aujourd’hui dans le Volley Ball, elle n’a pas repris le flambeau de la balle orange. Nous parlons énormément de sport ensemble.
BR : Pourquoi la Belgique?
JB : C’est une idée de mon agent. Une première expérience en Europe avant de rejoindre la France. J’ai joué contre le père de Tony Parker, Tony Parker senior, en Belgique.
BR : Et puis la France, dernière étape., tout d’abord à Berck pour la saison 1989/1990. Comment prononcez-vous Berck?
JB : Beurck, rires . J’avais un super coach, nous avons fini 7ème du championnat.
« Le SLUC m’a identifié, ils m’ont fait un contrat, j’ai accepté. J’ai pris une bonne décision ».
BR : Vous y avez fait quelques performances comme 45 points contre Nancy (80 points cumulés sur les deux matchs de championnat), vous en souvenez-vous?
JB : Pas particulièrement, non, je me souviens juste avoir score quelque chose comme ça, oui. Mais la ligne à 3 points existait en Europe. C’est sûrement pour cette raison que le SLUC m’a identifié, ils m’ont fait un contrat, j’ai accepté. J’ai pris une bonne décision, la meilleure, de signer pour ce club. De 1990 à 1994.
BR : Vous étiez une icône à Nancy, sur et en dehors du terrain. Quels sont vos souvenirs de cette période?
JB : Tout le monde était si gentil et derrière l’équipe, de super coéquipiers, des fans qui nous suivaient en déplacement. Pour résumer c’était comme une famille,. Passer 4 ans dans un tel environnement vous rapproche de vos coéquipiers, nous étions tous très proches. Toute la ville nous supportait, nous avons grandi ensemble, le club, les supporters, mes coéquipiers et moi jusqu’à être champion. Cette époque restera toujours spéciale pour moi, elle est toujours dans mon cœur. j’ai été nommé deux fois MVP de la ligue et nous avons gagné le championnat lors de ma dernière année et donc la possibilité d’accéder à la ProA. Pour la première fois depuis 1974.

© L’Est républicain
BR : Vous avez joué avec des joueurs historiques du club comme Christophe Lion durant vos années en Lorraine et vous avé été l’artisan majeur de la montée en ProA, quels contacts avez-vous gardé avec le club et ses joueurs?
JB : Ahmadou était un des plus durs travailleurs de l’équipe, tous les jours. C’était un étudiant du jeu. Il m’a aidé à être un meilleur jouer de basket. Nous défendions souvent l’un sur l’autre lors des entraînements, même si nous ne jouions pas au même poste (James était ailier et Ahmadou arrière). Ça a créé une forte alchimie entre nous, surtout car il était très complet, plus que moi.
« J’aurais voulu rester au SLUC. Le Club a sûrement voulu partir dans une autre direction ».
BR : Vous êtes restés 4 ans au SLUC en ProB, de la saison 1990/91 à la saison 93/94 et cette fabuleuse saison à 30 victoire et 4 défaites qui se termine par un titre de champion et une accession à la ProA. Pourquoi n’êtes-vous pas montés en ProA avec le Club? Vous étiez le go-to-guy.
JB : Vous me demandez à moi (rire)? Je n’en ai aucune idée, j’aurais voulu rester au SLUC. Le Club a sûrement voulu partir dans une autre direction. Pour moi, ma famille, ma femme, mon départ de Nancy est resté une triste événement. J’aurais voulu continuer à jouer avec ces gars, continuer à renforcer les liens que nous avons créés au fil des années. Nous aurions été compétitifs en ProA. Mais le basket est un business, il faut le comprendre, ça a été un dur moment mais c’est comme ça. Cela m’a donné l’opportunité de changer de clubs et d’avoir encore eu quelques belles années de basket.
BR : Après une dernière année en ProB avec Caen pour la saison 1994/95 vous accédez enfin à la ProA avec Evreux et pour 3 saisons (1995/98).

©ALM Evreux Basket
JB : C’était bien des retrouver Claude, un super coéquipier. Je l’ai perdu de vue aujourd’hui.
BR : Vous avez aussi joué avec un personnage de notre championnat, Jean-Marc Kraidy, qu’avait-il de spécial?
JB : Je m’en souviens, c’était un vrai joueur de basket. C’était une équipe jeune. Je me suis blessé pendant cette période. Ce fut une belle aventure, j’y ai aussi noué de belles relations avec mes coéquipiers mais pas aussi forte et intense que d’avoir joué avec le maillot du SLUC. Le basket n’a plus été pareil après mon départ de Nancy.
BR : Quels joueurs vous ont particulièrement marqué lors de vos années Pro en France?
JB : Michael Young de Limoges. J’ai joué contre beaucoup de très bons joueurs en Europe mais Bruce Bowen était définitivement le plus marquant. Bon en attaque et en défense. C’était très dur de jouer contre lui. J’ai aussi joué contre le père de Kobe Bryant, à Mulhouse à l’époque.
BR : Avez-vous déjà rencontré Kobe Bryant?
JB : Non, je ne le connaissais pas mais son décès est une énorme perte, non seulement pour le Basket mais aussi pour le monde. Quelqu’un de très inspirant. Je vous conseille la lecture de son livre Mamba Mentality.
« J’ai joué contre beaucoup de très bons joueurs en Europe mais Bruce Bowen était définitivement le plus marquant. »
BR : Si vous deviez regarder votre carrière aujourd’hui et en faire un bilan, que vous diriez-vous?
JB : Je n’ai pas de regrets sur ma carrière si ce n’est de ne pas avoir joué plus de saisons au SLUC Nancy, il faut comprendre que c’est aussi un business. On ne peut pas revenir en arrière, il faut avancer, continuer, profiter des expériences acquises tout au long de ces années. J’ai la chance d’avoir une fille de 26 ans aujourd’hui,, qui est née à Nancy je joue encore, j’y prends du plaisir. A un moment il faut rendre au jeu ce qu’il vous a donné, j’ai mon Camp aussi en Géorgie. Ce jeu l’a tellement donné à moi et à ma famille. C’est une très belle chose d’entrainer, de transmettre les fondamentaux. C’est ça aujourd’hui mon rôle de coach. Je suis coach de l’équipe féminine d’Athens Academy, en Géorgie.
BR : Nous arrivons maintenant à votre après carrière. Coacher était une évidence pour vous?
JB : Ça a toujours été en moi, dans mon esprit. J’aime quand les enfants vont dans le même sens que le coach, c’est dur, mais c’est un vrai challenge. Ça me permet aussi de rester proche du jeu et d’apprendre à créer des relations à travers le jeu.
BR : Votre rôle va au-delà du Basket?
JB : Je me réveille tous les jours en disant que chaque nouveau jour est une opportunité pour aider quelqu’un, rendre la vie de ma famille plus belle. Avec tout ce que j’ai accompli dans la vie, mes expériences, j’ai beaucoup à offrir. Mon rôle aussi est d’apprendre aux jeunes d’être de meilleures personnes. Le basket-ball est le miroir de la vie, même si on rate un lay-up, on fait un mauvais match mais il faut savoir que demain est un autre jour, tu peux ne pas avoir le succès que tu attends mais en travaillant encore plus fort tu peux y arriver. La vie est très courte, il faut toujours avancer, ne pas se retourner, rester positif, chaque jour est un nouveau cadeau. On est sur terre pour une raison, j’essaie de faire tous les jours trois bonnes actions pour la communauté.
« Avec tout ce que j’ai accompli dans la vie, mes expériences, j’ai beaucoup à offrir ».
BR : Ahmadou Keita, créateur du camp AK training Camp, nous rejoint pour parler de votre actualité. Pouvez-vous nous parler du camp?
Ahmadou Keita : James a joué avec mon frère à Berck, puis avec moi à Nancy, ce qui a créé des liens très fort entre nous. Dès que j’ai parlé de James autour de moi, d’autres anciens du SLUC comme Christophe Lion ont accepté tout de suite de venir coacher lors du camp. Les années où j’ai joué au club nous avons construit quelque chose ensemble (dont deux avec James Banks comme coéquipier) cette équipe était spéciale, nous avons accomplis de grande choses. 25 ans après, les gens m’en parlent encore.
JB : pourquoi ça a été facile d’accepter. Ahmadou est un grand professionnel, il fait un super travail avec ses camps. Revenir à Nancy pour le camp est pour moi un grand honneur, ça va être excitant, j’ai hâte. Je vais coacher les petits et grands, garçons et filles lors du camp. Même si j’ai un faible pour coacher les filles, elles sont plus à l’écoute, passionnée par le jeu.
AK : Le camp a 10 ans, je l’ai créé et je veux lui donner un « good spirit » c’est aussi pour cela que j’y travaille avec ma famille et mes amis. C’est ce que je veux transmettre aux jeunes. Et James, en tant que grand professionnel, apporte aussi cette dimension. Ce camp se déroule dans l’Est, c’est dans cette région que j’ai été professionnel, c’est donc naturel pour moi que le camp ait lieu à Nancy.
BR : Vous attendez-vous à un accueil chaleureux pour votre retour à Nancy?
JB : Mais j’espère bien. Je n’y suis pas retourné depuis mes années professionnelles. C’est une très belle opportunité pour moi et ma famille d’y revenir.
BR : Merci pour cette interview, nous souhaitons vous laisser le dernier mot de cette interview :
JB : Jouer en Europe a été une très belle expérience pour moi, faire tous ces voyages, rencontrer et jouer contre tous ces joueurs. C’est peut-être plus dur de jouer en Europe que de jouer en NBA vous savez, dans cet environnement. Il faut une vraie passion du jeu. Merci, j’ai apprécié ce très bon moment passé ensemble lors de cette interview.
Propos recueillis par Arnaud Lefèvre pour Basket Retro.
Merci à messieurs James Banks et Ahmadou pour leur gentillesse et leurs disponibilité lors de cet entretien.
Quel grand bonhomme que James BANKS. Dommage que le SLUC ne lui ai pas offert la Pro A.Il le méritait tellement!
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