Berck, l’étoile filante du basket français (1970 – 1980)
France
Passé de l’ombre à la lumière en quelques années, Berck a marqué le paysage du basket français durant les seventies. Double champion de France, les frangins Galle emmèneront pour la première fois de l’histoire un club français dans le dernier carré d’une Coupe d’Europe. Basket Retro rend aujourd’hui hommage à l’étoile filante du basket hexagonal…
En 1929, le premier club de basket-ball voit le jour à Berck sous l’impulsion d’un homme d’église, l’abbé Vandewalle. Sous le nom de Jeanne d’Arc de Berck-ville, l’abbé et son équipe obtiennent quelques bon résultats en championnat régional avant que la seconde guerre mondiale ne vienne mettre un terme au développement du basket dans la cité de la Côte d’Opale. A la libération, le basket-ball revient à Berck sous le nom d’AS Berck. Après quelques difficultés dans les années 50, le club monte progressivement les échelons du basket français pour parvenir en Nationale 3. L’arrivée de Pierre puis de Jean Galle à la fin des années 60 marquera le début de l’aventure berckoise.
L’ARRIVÉE DES FRÈRES GALLE

Les frères Jean et Pierre Galle en couverture de l’Equipe lors du second sacre de l’AS Berck en 1974. Une de l’Equipe Basket Magazine, n°32, Juin 1974.
Quand il arrive à Berck, Pierre Galle est un grand espoir du basket tricolore. Médaillé d’argent lors du championnat d’Europe junior en 1964, il quitte le SA Lyon pour Berck en 1967 sur l’invitation de René Fiolet directeur sportif de la formation du Pas-de-Calais. Il était prévu initialement que Pierre Galle assume le coaching en plus de son rôle de joueur. Au bout de quelques séances d’entraînement, le jeune calaisien souffla aux dirigeants le nom de son frère ainé Jean qu’il considérait plus compétent. Les rôles furent ainsi distribués, Jean sur le banc et Pierre en meneur de jeu relais de son frère sur le terrain. Les frangins créent une formidable dynamique et le club accède à l’élite en 1970. Bien aidé par l’américain John Gidding (21,7 points de moyenne en 1970-1971) et le hongrois Jan Racz, l’AS Berck termine son premier exercice dans l’élite à la 7ème place avec un bilan équilibré de 13 victoires pour autant de défaites. L’année suivante, les coéquipiers de Pierre Galle confirment avec une très belle 4ème place à l’issue de la saison 1971-1972 (18 victoires, 1 nul et seulement 7 défaites).
LA NAISSANCE D’UN ÉPHÉMÈRE CHAMPION

L’effectif de Berck en juin 1974 dans l’Equipe Basket Magazine.
Le groupe tient plus de la bande de potes que de la simple équipe sportive. Le basket professionnel n’est qu’à ses premiers balbutiements. Les joueurs sont semi-professionnels. Un John Gidding touche 2 000 francs par mois la première année, ses coéquipiers environ 500. Jean Galle le coach a pu entraîné à Berck en étant employé dans le même temps dans l’entreprise de bâtiment de René Fiolet. Quant à Pierre Galle, après avoir occupé un poste de maître d’éducation physique à la Mairie de Berck, il subviendra à ses besoins en travaillant dans les abattoirs de Jacques Renard, président de l’AS Berck. A côté de cela, la formation de la Cote d’Opale est assez en avance sur son temps. La montée en puissance du club en ce début d’années 70 permet aux berckois de profiter de leur popularité locale : récupération dans les hôpitaux du coin et transport en avions privés grâce à un accord avec l’aéroport du Touquet par exemple.
Sur le terrain, L’AS Berck décroche son premier titre en 1973, pour sa troisième saison dans l’élite. Berck domine le championnat avec un bilan 26 victoires, 1 nul, 3 défaites et 11 points d’avance sur son dauphin l’Alsace de Bagnolet. L’américain Ken Gardner (22,7 points de moyenne cette saison là) est le leader offensif de l’équipe. Il faut dire que l’effectif du coach Jean Galle a fière allure. Les américains Gardner et Bob Cheeks épaulé par Jan Racz et Pierre Galle sont entourés de gars du crue : Yves-Marie Vérove et le jeune Didier Dobbels notamment. En 1974, L’AS Berck écrase le championnat de France, 26 victoires, 4 défaites et surtout 16 points d’avance au classement sur le deuxième Le Mans. 1974 constitue également pour les hommes des frères Galle le début de l’éphémère mais non moins passionnante histoire de Berck en Coupe d’Europe.
L’ÉPOPÉE EUROPÉENNE
Le président Jacques Renard à l’orée de cette première campagne européenne annonce la couleur. « Nous visons les demi-finales ! » Jamais un club français n’a été aussi loin. Et la tâche paraît ardue voire impossible. Berck doit affronter le Panathinaïkos en huitième de finale. Le match aller a lieu à Athènes ou pourrait-on dire le guet-apen a lieu à Athènes. La veille au soir, des supporteurs du Pana souhaitèrent la bienvenue aux berckois en terres hellènes avec un concert de percussions à l’ustensile de cuisine. Insultés et malmenés pendant l’ensemble de la rencontre, les joueurs de Jean Galle bien aidés par un arbitrage maison de l’arbitre yougoslave repartent avec 19 points dans la musette. Ken Gardner découvrit ce soir-là que l’on pouvait associer basket-ball et lutte gréco-romaine tant il reçut de coups de la part de ses homologues grecs. Furieux, Jean Galle prévient l’adversaire:
« Les grecs ne savent pas ce qu’ils les attend au match retour, nous gagnerons par plus de 30 points. » Pierre Galle
Les grecs se présentent au Palais des Sports de Berck pour finir le boulot. Mais qui sème le vent récolte la tempête. Le Pana va vivre un enfer dans le Nord. A guichets fermés, l’antre de l’AS Berck est en ébullition. Jamais un adversaire de Berck ne fut autant conspué. Le capitaine grec reçut même en guise de bienvenue une couronne mortuaire. Coup d’envoi, entre-deux, 30 secondes de jeu et Yves-Marie Vérove marque son territoire en mettant KO son adversaire direct qu’il envoie du même coup se faire voir chez ses compatriotes. L’arbitre néerlandais n’est pas véritablement de cet avis et expulse le joueur berckois. Le coach Galle lance alors dans le grand bain le jeune Didier Dobbels. Malgré l’absence de leur joueur majeur, l’AS Berck est sur un nuage. Le Panathinaïkos reçoit une leçon de basket et repart de Berck une main devant une main derrière, 102 à 57 pour les français.

Ken Gardner face à Varèse en demi-finale de Coupe d’Europe 1975. L’Histoire fabuleuse du basket français.
Par la suite, les hommes de Jean Galle dispose du Maccabi Tel-Aviv en quarts de finale et parviennent pour la première fois de leur histoire et de l’histoire du basket français en demi-finale de Coupe d’Europe. Le grand Real de Madrid (4 titres de champions d’Europe) se dresse sur leur route.
Cette demi-finale restera dans les mémoires malheureusement pour de tristes raisons. A la suite d’une sombre histoire de primes non versées, certains joueurs dont Vérove, Dobbels ou encore Cheeks décidèrent de faire grève. Ce qui devait une fête du basket vire au psychodrame devant les caméras de télévision. Le coach Jean Galle est contraint de rechausser les baskets. Autour de Gardner et Pierre Galle non grévistes, l’AS Berck s’inclinent logiquement 99 à 67 lors de ce match retour. A l’aller, le Real s’était imposé 95 à 81. Les madrilènes s’envoleront par la suite vers un cinquième titre européen au détriment des italiens de Varèse. Jean Galle plaidera la cause des grévistes auprès de René Fiolet et d’André Buffière, président de la FFBB. Cependant, le mal est fait. La belle histoire touche à sa fin.
LA CHUTE

L’AS Berck devient le Berck Basket Club pour la saison 1974-1975. Une de Basket Hebdo du 21 juin 1974.
En proie aux difficultés financières dès 1974, l’AS Berck devient le Berck Basket Club et parvient à tenir sa place parmi l’élite pour l’exercice 1974-1975. La grève des joueurs a marqué les esprits. L’américain Ken Gardner est parti à Challans. Les grévistes Vérove et Cheeks notamment on eux aussi fait leur valises. Malgré cette situation difficile, Jean Galle emmène ses ouailles une seconde fois dans le dernier carré de la Coupe d’Europe tombant face à l’Ignis Varèse qui gagnera en 1975 son 4ème titre continental.
En 1976, Jean Galle longe la côte pour s’installer à la tête du Caen Basket Club, son frère Pierre rejoint le voisin de l’AS Denain Voltaire en 1977. Ainsi se termine l’aventure des frères Galle à Berck. Le club se maintient dans l’élite jusqu’en 1980 avant de descendre en deuxième division après un exercice 1979-1980 catastrophique avec une seule victoire en 26 rencontres. Le Berck Basket Club retombera alors dans les limbes du basket français loin de l’élite. Une folie des grandeurs (on pense particulièrement à la construction du palais des sports de 5000 places qui se révéla très coûteux d’entretien) et un management humain approximatif ne permirent pas à Berck de s’installer durablement dans l’élite. En un peu moins de dix ans, l’AS Berck aura tout de même écrit l’une des pages les plus marquantes du basket français.
PALMARÈS :
- Champion de France 1973 et 1974
- Demi-finaliste de la Coupe d’Europe des clubs champions 1974 et 1975
Montage Une : Laurent Rullier pour Basket Rétro
bonjour,
je viens de retrouver un programme dédicacé de la rencontre Berck contre Denain le 08 mai 1974, avec en lever de rideau Usinor Montataire contre Beauvais, y a-t-il des collectionneurs de ces souvenirs?
Merci;
à bientôt,
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