[Portrait] Jaka Lakovic, la gauche caviar
Portrait
Dans les années 2000, bien avant l’arrivée du phénomène Luka Dončić, la Slovénie s’appuyait sur lui. Une gâchette dotée une patte gauche létale et qui a contribué à mettre son pays sur le devant de la scène. Jaka Lakovič, un meneur de feu au service du jeu.
TEAM GAUCHERS, DEBUTS EN EUROLEAGUE ET PREMIERS EMOIS BASKET
La Slovénie est un pays fascinant à bien des égards. Joli pays d’à peine deux millions d’habitants, coincé entre l’Italie, l’Autriche, la Croatie, la Hongrie et la Bosnie, il a été au carrefour d’évènements historiques et tragiques dans son histoire. Mais ce qui rend cette terre si fertile est sa capacité à sortir des sportifs prodigieux et de talents divers. Si aujourd’hui tout le monde connaît le phénomène de précocité qu’est Luka Dončić des Dallas Mavericks, les Slovènes ont également de dignes représentants dans bon nombre de sports. Cyclisme (Primoz Roglic, champion olympique et Tadej Pogačar, double vainqueur du Tour de France), ski (Tina Maze double championne olympique, Nika Križnar et Glorija Kotnik également championnes olympiques) ou football (Zlatko Zahovič), tous ces sports ont permis de mettre sur la carte un pays féru de sport. Bien avant donc les exploits de Dončić et consorts puisque les années 90 ont mis en avant quelques talents bien cachés à l’ombre des voisins serbes et croates. Citons Marko Milič, le « dunkeur » féroce, Boštjan Nachbar titré en Europe et qui a eu une petite carrière NBA ou encore le meneur Sani Bečirovič vainqueur de l’Euroleague en 2007 avec le Panathinaïkos de Željko Obradović. Surtout le pivot Rasho Nesterović, champion NBA 2005 avec les Spurs de San Antonio de notre Tony Parker national. Mais avant tous ces joueurs, un homme a représenté dans les années 2000 le basket slovène. Un meneur de jeu, gaucher, adroit à trois points et qui a été la pierre angulaire et la parfaite transition du basket de son pays. Il s’agit de Jaka Lakovič dont la carrière s’est étirée sur près de 20 saisons et qui gagné partout où il est passé. Gaucher donc mais il fait partie de la digne cuvée slovène et a été le témoin-clé de deux générations de gauchers. Avec un autre meneur, Jure Zdovc, vainqueur de l’Euroleague 1993 avec le CSP Limoges. Puis, par la suite, avec les frères Dragić (Goran et Zoran), également gauchers et qui, avec Goran, va écrire la plus belle page de la Slovénie en remportant l’Eurobasket 2017 en Turquie avec Dončić.

Crédits photo : Eurohoops/Euroleague
Dès lors, avec cet ADN de latéralité, Jaka Lakovič ne peut que s’élever dans le panthéon local, lui dont la carrière débute à l’académie du Geoplin Slovan à partir de 1996. Une pépinière de talents qui, outre Lakovič, est pour beaucoup dans la formation des Zdovc, Dragić et autres Dončić (Saša en l’occurrence, paternel de Luka). Un club avec peu de moyens mais qui mise rapidement sur la faculté de progression de Jaka. Tant et si bien que le club, avec son gaucher magique, termine deux fois en demi-finale (de 1999 à 2001) de la Ligue slovène dominée régulièrement par le trio Smelt (KK) Olimpija, Krka Telekom et Pivovarna Laško. A l’instar des joueurs turcs qui partent vers un des mastodontes d’Istanbul une fois leur talent révélé, Lakovič quitte donc après cinq saisons Slovan. Direction lors de la saison 2001/2002, au sud-est de Ljubljana, le club de Krka, champion de Slovénie en titre, dans la ville de Novo Mosto à une encablure de la frontière croate. Là-bas, Jaka Lakovič, 23 ans découvre les joies de disputer une finale de championnat, largement perdue face à l’Union Olimpija (3-0) après une deuxième place obtenue en saison régulière. Mais surtout, l’occasion est toute trouvée de découvrir la belle et éphémère Suproleague (une saison d’existence). Pour un jeune joueur en devenir, tout est donc réuni pour exploser à la face de l’Europe et lui permettre la saison suivante de quitter son pays natal. Au sein d’une équipe slovène où la principale figure, outre Jaka, est le pivot Mate Skelin, futur champion de France avec Pau-Orthez en 2004, le meneur est auteur de belles performances. 20 points de moyenne, plus de 30 minutes de jeu effectif par match, près de 4 passes et 2 ballons chipés. Tout est dit pour un club qui ne peut malheureusement faire de miracle en terminant à la huitième et dernière place qualificative de son groupe (sur dix équipes). Et qui se retrouve fatalement en 16èmes de finales face au puissant cuirassier de l’époque, les Grecs du « Pana » de coach « Obra ». Sur le papier, pas de miracle face au futur finaliste (le Maccabi sera champion) avec une élimination, deux manches à zéro. Mais l’occasion idéale de frapper les esprits et surtout dans celui du génie serbe pour Jaka. Le début d’une belle et fructueuse collaboration entre deux amoureux du basket né en ex-Yougoslavie.
DEPART VERS LE « PANA », UN MENEUR QUI COMPTE ET DES TROPHEES
Saison 2002/2003, Željko Obradović et son assistant grec, un certain Dimitris Itoudis, actuel coach de Fenerbahçe, accueille donc le Slovène dans une équipe montée sur ressort. Avec des valeurs sûres à chaque poste tel que le capitaine au long cours, le Grec Fragiskos Alvertis (quasi 20 saisons au « Pana ») et ses compatriotes, l’ailier-fort Antonis Fotsis ainsi que le pivot Kostas Tsartsaris. Ajoutés à cela, le shooteur turc İbrahim Kutluay, l’inusable Darryl Middleton et pour faire bonne mesure, un arrière patenté NBA, Rodney Buford et le meneur américain naturalisé… slovène, Ariel McDonald. Dès lors, s’il est parfois difficile pour un joueur qui découvre un nouveau championnat de franchir le cap, Lakovič s’en sort avec les honneurs pour cette première saison. Près de 10 points et surtout 2,5 de passes en moyenne toutes compétitions confondues, le meneur slovène est le cinquième meilleur marqueur lors de cette saison pour le club grec derrière Fotsis (12,7), Kutluay (12,3), Buford (10,7) et Middleton (9,5). Ce qui démontre que dans cette homogénéité où il n’y a pas de grandes domination au scoring, Lakovič prouve son talent dans le collectif. Durant quatre saisons, le natif de Ljubljana garnit son armoire à trophées chaque saison. Au sein d’une équipe d’Athènes dominante sur le plan local chaque saison avec les apports de l’ailier-fort Michael Batiste (à partir de la saison 2003/2004), du pivot allemand Patrick Femerling (2004/2005), d’un certain Dimitris Diamantidis et des Serbes Vlado Šćepanović et Dejan Tomašević, Lakovič capitalise. Entre 2002 et 2006, il remporte quatre championnats grecs consécutivement agrémentés de trois Coupes de Grèce (2003, 2005 et 2006). Face à la déliquescence du rival du Pirée, l’Olympiacos, le Panathinaïkos truste les premières places. Mais, plafond de verre, durant la période où évolue le Slovène, le « Pana » ne glane qu’une simple troisième place d’Euroleague lors de la saison 2004/2005. Ce n’est pas faute d’essayer pourtant mais les Grecs sont soit éliminés en phase de poule en raison du format de l’époque, seul le premier de chaque groupe se qualifiant pour les quarts. A ce jeu, le Montepaschi Siena leur passe devant lors des saisons 2002/2003 et 2003/2004. Soit par le futur vainqueur, le Maccabi Tel-Aviv d’Anthony Parker, en l’occurrence lors de la saison 2004/2005. Quand ce n’est pas par le caillou dans la chaussure de plus de la moitié des équipes d’Euroleague en Europe (et même d’aujourd’hui), Tau Cerámica (actuellement Saski Baskonia). Dès lors, malgré ses performances individuelles remarquables durant sa période grecque avec 16-17 points par saison et trois passes en moyenne, Lakovič quitte la Grèce lors de la saison 2006/2007. D’aucuns diront que ce fut une erreur puisque le « Pana » remportera cette saison-là un formidable triplé championnat, Coupe de Grèce et… Euroleague avec un autre slovène à la barre, Sani Bečirovič.
DEBUT DE RECONNAISSANCE, XAVI PASCAL SUR LE BANC ET PREMIER TITRE EN ESPAGNE
Lors de la saison 2006/2007, Jaka Lakovič débarque donc en Espagne, au Winterthur FC Barcelone pour être exact. A 27 ans, dans une équipe où figure également la légende locale, Juan Carlos Navarro (lui aussi plus de 20 saisons de fidélité), Lakovič retrouve quelques têtes connues lors de sa première saison. Les Italiens Gianluca Basile (meneur) et Denis Marconato (pivot), l’ailier-fort grec Michalis Kakiouzis et le jeune meneur croate Roko Ukić (21 ans). Le tout coaché par l’ombrageux Monténégrin Duško Ivanović, dont les méthodes de travail n’ont rien à envier à l’US Army, version « Marines ». Barcelone glane cette saison-là une Coupe du Roi face à son ennemi juré, le Real Madrid (69-53) avec notamment 16 points et 5 passes pour l’ami Lakovič. En saison régulière, Barcelone termine à la quatrième place mais affronte de nouveau le Real en finale des playoffs. Résultat, une défaite trois manches à une pour les hommes de Duško Ivanović. En Euroleague, le Winterthur Barcelone s’en sort plutôt pas mal lors des deux phases de poules (deuxième sur huit équipes puis deuxième sur quatre derrière le « Pana ») et pense hériter d’un tirage favorable en quarts de finale. Hélas, face à l’Unicaja Malaga, formation ultra-dangereuse, les Catalans s’inclinent 2-1. Une première saison correcte mais sans plus pour le club mais prolifique pour le meneur Slovène. Celui-ci termine en effet second aux points sur toute la saison derrière son coéquipier Navarro (10,7 points de moyenne pour Lakovič face aux 17,1 de Navarro) mais premier en passes (3,4 vs 3,2). La saison suivante (2007/2008), Barcelone change de nom et devient « AXA FC Barcelone » mais cette marque d’assurance n’est pas une garantie de réussite pour autant.

Crédits photo : Eurohoops/Euroleague
Certes, le club intègre quelques valeurs sûres avec notamment les arrivées du couteau-suisse Turc Ersan Ilyasova, du musculeux pivot croate Mario Kasun et du meneur gaucher Pepe Sánchez, champion d’Euroleague en 2002 avec le « Pana » et champion olympique (2004) avec l’Argentine. Mais les méthodes d’Ivanović, au club depuis 2005, s’essoufflent et créent des tensions. Avec en plus, un Juan Carlos Navarro parti faire gonfler son portefeuille en NBA en rejoignant son grand pote Pau Gasol aux Memphis Grizzlies, Barcelone se retrouve dans la nasse. Tant et si bien que le club catalan fait ce que les dirigeants savent le mieux faire dans le sport, à savoir débarquer le coach principal et le remplacer par son adjoint. Une décision logique sur le moment puisque le remplaçant est un pur catalan en la personne de Xavi Pascual, actuel coach du Zenith Saint-Pétersbourg en Russie. Ironie de l’histoire, Barcelone amènera une saison suivante, en 2009, aux commandes de son équipe de handball, un autre Xavi Pascual, seulement différencié par leurs noms au complet (i Vives pour le coach basket et Fuertes pour son collègue du hand). Quoiqu’il en soit, Pascual (basket), après quatre ans en tant qu’assistant de Svetislav Pešić et de Duško Ivanović, prend donc les commandes de l’équipe en s’appuyant grandement sur Lakovič. Sur le plan national, on note une troisième place obtenue derrière l’intouchable Real Madrid et la Joventut Badalona et une finale perdue trois à zéro face au Tau Cerámica du meneur argentin Pablo Prigioni. En Euroleague, même topo que la saison précédente qui voit cette fois Barcelone chuter face au Maccabi du duo Nikola Vujčić-Derrick Sharp en quarts de finale (défaite deux manches à une). Ajouté à cela une élimination en quart de finale de la Copa del Rey et le bilan est loin d’avoir été conforme aux attentes. Sur le plan individuel, néanmoins, le gaucher slovène est le meilleur marqueur et passeur de son équipe toutes compétitions confondues (13 points et 3 passes en moyenne).

Crédits photo : Eurohoops/Euroleague
Dès lors, Barcelone se décide lors de la saison 2008/2009 à rapatrier un Navarro en perdition aux Etats-Unis. Et le Regal Barcelone accueille le pivot australien David Andersen. Ce qui aura pour conséquence de réduire les stats de Lakovič cette saison-là puisque, outre l’Australien (11 points et 3 rebonds en moyenne), Ilyasova (10 et 7) et Navarro (14 et 3) prennent le leadership en termes de points. Le Slovène complétant ce quatuor avec 10 points et 3 passes en moyenne. Avec Pascual comme coach, Barcelone termine la saison régulière à la deuxième place derrière le Tau Cerámica de la gâchette serbe Igor Rakočević. Par la suite, les Catalans brisent leur plafond de verre en éliminant Pamesa Valencia (2-0) en quarts puis Malaga en demi (2-1). Avant de battre Tau Cerámica trois victoires à une en finale des playoffs avec un Navarro en feu. Premier titre en championnat espagnol pour Lakovič et le quinzième pour Barcelone, cinq ans après le dernier obtenu. En Euroleague, même tonneau puisque Barcelone en deux phases de poules et 16 parties disputées en gagne la bagatelle de 14. Là encore, les coéquipiers de Jaka Lakovič battent les Basques de Cerámica (3-2) et se qualifient pour le Final Four de Berlin. Après une belle résistance, les Catalans s’inclinent 82-78 face aux Russes du CSKA Moscou d’un monstrueux Ramūnas Šiškauskas (29 points). Qu’à cela ne tienne, Barcelone termine finalement à la troisième place du Final Four en battant l’Olympiacos dans la petite finale, 95-79 avec 14 points et 5 passes pour le meneur slovène. Mais, après avoir goûté à la reine des compétitions, Lakovič et Barcelone ne se doutent pas que le meilleur est à venir.
BUT ULTIME ATTEINT, BAROUD D’HONNEUR EN ESPAGNE ET UN DEPART EN TURQUIE
Une fois n’est pas coutume, Barcelone commence la saison 2009/2010 en conservant son sponsor (Regal FCB) de la saison précédente. Si Navarro et Lakovič sont toujours fidèles au poste, les Catalans accueillent du muscle dans la raquette avec l’ailier-fort US gaucher Pete Mickeal en provenance de Tau Cerámica et le géant sénégalais (2m13) Boniface N’Dong qui arrive de Malaga. Sans compter un meneur espagnol de 19 ans qui débarque de la bien nommée Joventut Badalone, Ricky Rubio et le pivot slovène qui arrive du CSKA, Erazem Lorbek. Avec des valeurs sûres telles que Gianluca Basile, Roger Grimau, Victor Sada ou Fran Vazquez, cette équipe a fière allure et s’apprête à vivre une saison de folie. En championnat, Barcelone termine en effet première de la phase régulière avec seulement trois petites défaites en 34 rencontres. Et même plus puisque non seulement en quarts mais également en demi-finale des playoffs, les hommes de Pascual gagnent facilement contre respectivement Gran Canaria (2-0) et Unicaja Malaga (3-0). Dès lors, personne ne s’imagine Navarro et sa bande perdre en finale face au… Caja Laboral du duo brésilien Marcelo Huertas-Tiago Splitter. Personne sauf les Basques anciennement nommés Tau Cerámica qui remporte le titre sans coup férir, trois manches à zéro. Poils à gratter un jour, poils à gratter toujours !! Une déception pour Lakovič mais qui est vite oubliée puisque Barcelone s’adjuge la Copa del Rey 2010 en atomisant le Real Madrid, 80-61. Une seconde Coupe d’Espagne pour le Slovène après celle glanée en 2007. Ajouté à cela, la Supercoupe d’Espagne remportée face à Valencia, après celle de 2009 et Lakovič se trouve à la tête de tous les trophées possibles obtenus en Espagne. Mais le meilleur est encore à venir, cette fois en Euroleague pour une équipe vraiment armée pour remporter le titre suprême. Dès les phases de poules, les dix rencontres sont remportées dans un groupe qui comprend Siena, le Žalgiris Kaunas, l’ASVEL et Fenerbahçe notamment. C’est même le meilleur ratio victoire-défaite des quatre groupes puisque les trois autres équipes (CSKA, Olympiacos et Real Madrid) terminent cette phase avec huit victoires et deux défaites. Dans le Top16, Barcelone reprend sa marche en avant face au Partizan, au « Pana » et à Maroussi, l’autre équipe grecque de la poule. Première place raflée avec une défaite en six rencontres avant de rencontrer en quarts de finale, le Real Madrid d’Ante Tomić (futur pivot catalan en 2012), du jumeau lituanien Darjuš Lavrinovič et de Pablo Prigioni. Bilan de la course, une qualification nette et sans bavure, trois manches à une derrière le duo Mickeal-Navarro et un nouveau Final Four cette fois à Paris-Bercy.

Crédits photo : Eurohoops/Euroleague
Disons-le clairement tout de suite, Barcelone n’a jamais tremblé face au CSKA en demi-finale (64-54) et en finale face à l’Olympiacos de Theodoros Papaloukas (victoire 86-68). Disons-le également nettement, Jaka Lakovič n’a pas existé durant cette finale puisqu’il joué moins d’une minute trente et cela a été même une constante de sa saison. Des stats en baisse aux points (5 points de moyenne et surtout aux passes avec moins d’une passe). Mais l’essentiel est ailleurs pour le Slovène de 32 ans qui peut se targuer d’avoir contribué au titre d’Euroleague après celui obtenu lors de la saison 2002/2003, la seconde d’un club maudit sur la scène européenne avec ses cinq finales perdues dans les années 80 et 90. De plus, ce titre fait partie d’un des derniers trophées majeur de sa carrière en club, lui qui ajoute la saison suivante une nouvelle Coupe d’Espagne obtenue face à Madrid (68-60) et un dernier titre national glané face à Bilbao pour boucler la boucle. Avec 6 points de moyenne et 2 passes décisives pour sa dernière saison et cinq années en Espagne, Lakovič va découvrir lors de la saison 2011/2012, le cinquième club de sa carrière et son quatrième pays.
RENOUVEAU A GALATASARAY, FRITURE AVEC ATAMAN ET COACH EN DEVENIR
Direction donc la Turquie au sein du Galatasaray Medical Park pour un meneur qui va découvrir durant deux saisons la défunte Abdi İpekçi Arena, théâtre de la grandeur du basket turc et aujourd’hui détruite. Durant ces deux saisons, Lakovič côtoie tout d’abord le rugueux et taciturne coach turc né en Macédoine, Oktay Mahmuti. Dans une équipe avec quelques joueurs reconnus tels que Ender Arslan, meneur de l’Equipe nationale turque, l’Américain Jamon Gordon, le pivot lituanien en provenance de NBA (76ers de Philadelphie), Darius Songaila et une flopée de joueurs turcs habitués du championnat local (Tutku Açık, Furkan Aldemir, Cevher Özer notamment). Galatasaray réussit même à se qualifier pour l’Euroleague à l’issue d’une qualification remportée à Vilnius en éliminant le PAOK, l’ASVEL et le Lietuvos Rytas en finale. Ce qui permet aux coéquipiers de Lakovič d’évoluer dans la prestigieuse compétition européenne dans le même groupe que Barcelone, Siena et les Russes de Kazan notamment. Galatasaray sera logiquement éliminé à l’issue du Top 16 face au CSKA et à l’Olympiacos, ce qui représente une saison plutôt satisfaisante au plan européen, malgré tout. Si le meneur slovène n’a plus trop ses cannes d’antan, il participe à la bonne tenue en championnat de son club qui finit la saison régulière à la première place. Direction les playoffs où après avoir éliminé Tofaş Bursa, Galatasaray tombe face au rival d’Istanbul, tout comme en Coupe de Turquie, le Beşiktaş d’Ergin Ataman. Un Ataman dont le club remporte cette saison 2011/2012 un beau triplé avec le championnat, la Coupe de Turquie et l’Eurochallenge face à l’Elan Chalon de Greg Beugnot. Une saison plus que correcte pour Jaka Lakovič notamment en Euroleague où ce dernier retrouve ses sensations passées à 33 ans avec 10 points et 2,7 passes décisives en moyenne.

Crédits photo : Eurohoops/Euroleague
La saison suivante s’annonce dès lors intéressante d’autant plus qu’Ergin Ataman prend place sur le banc. Hélas, le futur double vainqueur de l’Euroleague avec l’Anadolu Efes (2021 et 2022) aime travailler avec ses joueurs des clubs précédents. Et n’est pas particulièrement fan, c’est un euphémisme, de Lakovič et de son jeu de transition. Ce dernier passe donc l’essentiel de sa saison 2012/2013 sur le banc barré par le meneur de jeu porto-ricain Carlos Arroyo, gros consommateur de temps de jeu et meneur du Beşiktaş d’un certain Ataman la saison précédente… C’est donc presque une saison blanche pour le Slovène qui prend son mal en patience avant de s’extirper de ce pétrin en quittant la Turquie. Direction le sud de l’Italie lors de la saison 2013/2014, au sein du Sidigas Avellino avant de retrouver une petite saison de nouveau la Turquie. Dans le sud du pays, au Royal Halı Gaziantep, club sponsorisé par une marque de tapis, Jaka Lakovič, 36 ans, apporte son écot avec 11 points et 2,5 passes par match à son équipe qui finit dixième du championnat. Objectif maintien rempli pour lui et son club, Lakovič repart pour la saison 2015/2016 en Espagne et met fin à sa carrière en 2016 dans la réserve de Barcelone. 20 ans de carrière professionnelle, des trophées à la pelle, un meneur solide, fiable et qui se mettait au service du collectif. En équipe nationale, la Slovénie n’a pas eu le rendement espéré avec zéro qualification pour les Jeux Olympiques, c’est un fait. Mais ses performances en Eurobasket avec Lakovič à la mène ont à chaque fois amené ce petit pays à progresser. Passant de la 10ème place en 2003 à une belle 4ème lors de l’Eurobasket 2009 qui s’est déroulé en Pologne. Avec en point d’orgue, une demi-finale dantesque perdue (96-92) après prolongations face à la Serbie de Miloš Teodosić (32 points). Pour cette rencontre, Jaka Lakovič aura même joué 44 minutes (pour 7 points, 5 rebonds et 3 passes), c’est dire l’importance du bonhomme pour sa sélection à l’époque. Ajoutée à cela, la belle 5ème place lors de l’Eurobasket 2013 en… Slovénie et on mesure l’apport d’un joueur qui, même si comparativement à Dončić aujourd’hui n’est pas aussi fort statistiquement, a été un acteur majeur du développement du basket slovène.

Crédits photo : Eurohoops/Euroleague
Dès lors, c’est du côté coaching que l’on peut désormais apercevoir le gaucher puisque depuis la fin de sa carrière en 2016, il est devenu assistant coach. En club avec Bilbao et la Joventut et en sélection avec la Slovénie durant quatre ans (2016-2020) avant de prendre son envol depuis la saison 2019/2020 à Ulm, en Allemagne. Avec le Ratiopharm Ulm, dans le sud de l’Allemagne à la lisière de la frontière bavaroise, Lakovič et ses hommes sont même arrivés en demi-finale de Bundesliga. Seulement éliminés par Ludwigsburg. Rebelote la saison 2020/2021 avec une nouvelle demi-finale et une élimination face au futur champion d’Allemagne, l’Alba Berlin. Avant de terminer par un quart pour sa dernière saison mais en faisant progresser son équipe à chaque fois. De 10ème à 5ème, Ulm a donc eu la chance de voir le travail de Jaka Lakovič porter ses fruits chaque saison un peu plus. Des fruits que récoltent désormais le Slovène aux Canaries, à Gran Canaria avec comme assistant-coach, l’ancien limougeaud Stéphane Dumas. Et sur le terrain quelques connaissances du championnat français tels que le meneur international français Andrew Albicy et Damien Inglis (ancien de Limoges et Strasbourg). Ainsi que l’arrière américano-polonais AJ Slaughter, ancien de l’ASVEL et l’ailier-fort US John Shurna, ancien de Strasbourg. Sans compter le prospect turc, le… gaucher David Mutaf, frère de Can Maxim qui a évolué dans tous les clubs d’Istanbul (Fenerbahçe, Efes, Darüşşafaka, Beşiktaş). Tous ces joueurs et leur coach Slovène ont d’ores et déjà réussi leur saison puisqu’ils ont remporté début mai l’Eurocup. Face au club turc, le Türk Telekom Ankara, d’un autre coach à suivre, le Turc Erdem Can, gaucher comme Lakovič, Gran Canaria disputera même l’Euroleague la saison prochaine. En lutte également pour les playoffs en Liga ACB (6ème actuellement), il sera intéressant de suivre le parcours d’un coach en devenir. Expérimenté, solide dans ses acquis, Jaka Lakovič, 45 ans en juillet prochain, représente le futur de la nouvelle génération d’entraîneurs amenés à prendre la relève des vieux briscards actuels. Avant de coacher, peut-être qui sait, un jour un certain Luka Dončić, natif lui aussi de Ljubljana, en sélection slovène ?


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