ITW Alain Béral : « Je veux que l’histoire du basket soit connue ! »
Interview
C’est l’un des hommes clés du basket français qui a répondu aux questions de Basket Rétro. Alain Béral, Président de la LNB depuis 2011, revient sur sa découverte de ce sport, son arrivée dans le basket professionnel et sa vision sur la transmission du patrimoine du basket français Interview.
Basket Rétro : Bonjour Alain Beral. Afin de mieux vous connaître, pourriez nous dire comment vous avez découvert le basket ?
Alain Beral : C’est très simple ! C’est parce que je me suis marié dans les années 70 avec une fille originaires des Landes. On s’est rencontré par ailleurs bien sûr, mais quand je suis arrivé ici, dans les Landes, je me suis aperçu qu’il y avait deux passions : le rugby et le basket. En tous cas dans mon petit village, il n’y avait même que le basket. D’ailleurs, on y construisait une salle de basket. C’était un sport où l’on pouvait jouer à 5 et même à 10. Au rugby, il fallait un peu plus de surface et de sportifs. J’ai donc découvert ce sport à ce moment-là. Dans la famille, on jouait souvent au basket. C’était à l’époque où Saint-Cyr jouait en Nationale 4. Me voilà donc dans le basket ! Et, on m’a dit qu’ici il y avait un esprit de clocher très fort et qu’il y avait un grand club : Orthez. Je me suis donc retrouvé un jour dans cette ambiance à la Moutète pour des matchs internationaux. C’était assez spectaculaire, je dois dire. Évidemment, je me suis pris au jeu. J’ai trouvé ça vraiment sympa. Chemin faisant, on est venus s’installer dans les Landes. J’ai eu ensuite des enfants. Ils se sont tous mis au basket d’ailleurs parce qu’en fait dans le village les installations étaient de bonne qualité. Et après l’école, ils jouaient aussi au basket. J’ai été adoubé par le sport qui entoure tous les habitants ici avec des derbys, avec des petites histoires et des grandes histoires. Cela a continué dans le sens où je suis devenu chef d’entreprise. Je suis devenu président d’une chaine de restauration qui s’appelle Quick.
BR : La coupe du monde des Landes est un véritable phénomène socio-culturel depuis plus de 70 ans. C’est cet environnement qui vous a également plu ?
AB : Oui. C’est quelque chose d’assez particulier. Avant même le championnat de France, il y a la Coupe des Landes qui est vraiment la référence ici. Figurez vous que mon fils aîné qui a joué jusqu’en Nationale 2 à Mont-de-Marsan s’est qualifié pour la finale de Coupe des Landes à Pomarez. Cela se passe dans les Arènes. Et, ils ont gagné ! Il faut savoir que la Coupe des Landes se finit très tard vers 1 heure du matin. Nous sommes rentrés tard dans la nuit, et le lendemain matin à 7 heures, il y a des gens qui sont venus taper à notre porte en demandant à voir la coupe. Mon fils étant le plus jeune, il avait eu le droit de rentrer le premier avec la coupe chez lui. Il y a donc eu un défilé à la maison. Les voisins sont venus à leur tour. Puis, l’oncle de ma femme, est arrivé avec la larme à l’œil en disant « Elle est à la maison, elle est à la maison ! ». Personne n’avait jamais gagné la Coupe des Landes dans la famille, et il voulait absolument toucher cette coupe. Et c’est là que je me suis aperçu de l’étendue du sujet. C’est un moment très très fort avec des Arènes pleines à craquer. C’est un spectacle digne de ce qu’on peut faire de mieux dans le basket en France. Avant le Covid, cela s’est passé dans les arènes de Dax, c’était télévisé bien sûr. C’est vraiment un moment exceptionnel, tellement fort que lorsque j’étais président d’Orthez, on avait emmené les joueurs dans les Arènes de Pomarez, pour leur montrer la passion du basket dans le Sud-Ouest. On leur disait : « ces gens-là, il faut les respecter. Quand vous voyez ce qu’ils sont capables de faire avec des clubs de National ou même de Départemental, avec des filles ou avec des garçons. De s’arracher sur des parquets pour aller gagner le Graal qu’est la Coupe du monde des Landes, c’est formidable ». (Notre photo : La coupe du monde des Landes dans les arènes de Dax en 2019. Source : Sud Ouest)
BR : Est ce qu’on peut dire que vous êtes tombé amoureux du basket à ce moment-là ?
AB : Oui, absolument ! Moi, j’étais plutôt rugby puisque je suis né à Gaillac dans le Tarn. J’y ai connu l’époque forte du rugby, dans les années 60, puisqu’on affrontait Toulon avec les frères Herrero ou Nice. À l’époque on parlait de la première division. Gaillac était une place forte et moi oui, j’étais plutôt rugby.
« J’ai emmené les joueurs de Pau à Pomarez »
BR : Quel a été votre premier lien avec le basket professionnel ?
AB : C’est simple. J’ai lancé ma carrière dans le grande distribution. Avec Quick, on a commencé avec notre premier restaurant en 1979. J’ai ainsi été nommé président de la chaîne de restauration Quick France. Et à ce moment-là, je cherchais à investir une partie de notre budget publicité dans le milieu sportif avec une recherche de proximité. Je me suis aperçu en fréquentant beaucoup les salles, que la clientèle qui était devant les comptoirs chez Quick était la même que celle qui fréquentait les salles et notamment de basket. C’est à dire des familles avec des enfants qui viennent se détendre, ce qui n’était pas le cas au foot ou au rugby. J’ai décidé de devenir partenaire de clubs, pas forcément des grands clubs, mais des petits clubs de Province où se trouvait un restaurant à proximité. On fournissait les tenues pour les clubs engagés en Départementale, puis en Nationale. C’est là, que nous sommes devenus partenaires maillot de l’Elan Béarnais. On était également présents à Gravelines ou à Limoges. Pour résumer, on était présents dans 7 ou 8 clubs de l’Elite sur les 16 de l’époque et autant en Pro B. On était présent dans la ville et on voulait absolument faire le lien entre Quick et les populations. Et ça a très très bien marché. On faisait les fêtes du basket pour les petits, on fournissait beaucoup de ballons et de maillots. C’est comme ça que je suis arrivé dans le basket. Je suis évidemment devenu proche du club de Pau où on investissait le plus sur l’image, et je suis donc devenu proche des élus et du maire de Pau qui s’appelait André Labarrère. Un jour, il a décidé, lui, que j’allais devenir président du club. Il m’a dit cela comme cela et il a raccroché. C’était André Labarrère et donc je n’ai pas eu le temps de discuter de cela. Je suis donc devenu président de l’Elan Béarnais, un club prestigieux.
BR : Était-ce une évidence pour vous de devenir Président du club de l’Elan Béarnais ?
Non non, pas du tout. Vous savez, il y avait Pierre Seillant qui était là. Mais Pierre avait à choisir entre son cabinet d’assurance et le club et j’avais bien compris que cela lui faisait mal de laisser le club. Comme le club ne pouvait pas salarier son président, j’avais dit à André Labarrère qu’il fallait qu’il soit directeur général et puis trouver un président bénévole. Et il a trouvé (il rigole). C’est moi qui ai donné l’idée et il m’a trouvé. J’ai trouvé cela très bien d’autant qu’on a été champion de France dès la première année. Et puis, à cette époque, on avait la pépinière des Pietrus, Boris Diaw, etc… qui étaient d’un talent… c’était donc juste magique ! Avoir des résultats comme ceux-là, cela lie définitivement. Donc je me suis retrouvé président du club de Pau-Orthez et j’y suis resté jusqu’en 2008. Ensuite, on a crée Pau-Lacq-Orthez notamment avec le député David Habib et le maire de Lacq Didier Rey, mais pas que. Je suis resté dans le conseil d’administration en 2008. Le club est malheureusement descendu en 2010, donc j’ai été rappelé aux affaires si on peut le dire ainsi. Vite on a été champion de Pro B et je suis devenu président de la Ligue par la suite.

BR : Pour continuer sur l’Élan Béarnais, j’imagine que vous avez pleins de souvenirs en tête mais quels sont ceux qui vous viennent là spontanément.
AB : Des souvenirs, il y en a plusieurs. D’abord, c’est d’avoir une belle salle. Je crois qu’à Paris, il y en a pas de salles comme celle-là, de 8000 places. C’est vrai, il y a l’AccorHotel Arena. Il va y en avoir une autre aussi pour les JO, mais je crois qu’il n’y en a pas d’autres en France même à Paris. Elle a été constituée dès le départ de très belle façon, c’est pour cela d’ailleurs que l’équipe de France y vient régulièrement chaque année. Avec Pierre Seillant, lui avant moi d’ailleurs, on a toujours voulu recréer cette atmosphère de la fête du Sud-Ouest, par le basket, par les bandas. Ce que je retiens, c’est quand cette salle est en fusion et j’ai quelques souvenirs comme cela notamment au travers de matchs contre Moscou, le Pana ou Bologne. Contre Bologne, Antoine Rigaudeau revient et là c’est incroyable 8000 personnes qui chantent. Là, la notion de sixième homme prends vraiment tout son sens. Les joueurs étrangers regardaient le public et se demandait ce qu’il se passait. Le public était formidable. Il y a aussi avec l’équipe de France face à la Slovénie en 1996. L’équipe était en difficulté avec un arbitre qui sifflait tout contre nous. Le coach prend un temps mort et l’arbitre va au milieu du terrain. Alors, ce n’était pas agressif soyons bien clair, mais l’arbitre prend une bronca incroyable ! La faute c’était contre un joueur de l’Elan, Ronnie Smith, un américain qui jouaient avec l’équipe. Ce sont des moments à jamais figés dans ma chaire. Et puis ensuite, il y a cette traversée de la ville dans des décapotables avec George Muresan. Debout dans la décapotable du haut de ses 2m32, c’est quelque chose. Un jour, il s’était même fait arrêter par la police. On lui avait acheté une R25 un peu âgée mais pour que cela soit confortable pour lui. Les gendarmes frappent à la vitre et il sort par la porte arrière. Ils ont pas tout compris sur le coup.
« C’est moi qui ai donné l’idée et il m’a trouvé »
BR : On va en venir maintenant à votre arrivée à la présidence de la Ligue. Comment cela s’est déroulé ?
AB : Et bien un peu comme à Pau. J’étais parti de Quick depuis 2002 déjà. On est en 2011 et je m’étais dit qu’avec l’Elan j’avais fait mon temps et qu’il ne fallait pas en rajouter. J’étais patron de Trigano à l’époque, la société hotelière de plein air. Les présidents des autres clubs de l’élite m’ont dit alors, Alain : « On sait que tu ne veux plus être président de club alors il faudrait que tu nous écrives un projet sur ta vision de la Ligue Nationale « . J’ai dit moi je veux bien mais ce sera entrepreneurial, pas sous la forme d’un projet de service d’État. Donc j’ai écris ce projet que j’ai présenté dans la salle Marcel Cerdan de Levallois. Les présidents de Pro A et Pro B étaient là. Cela a duré une heure à peu près et on m’a dit que c’était génial. Et à la sortie, ils m’ont dit on veut que ce soit toi qui le fasse. On a discuté, j’ai réfléchi évidemment, parce que le fait que ce soit moi, ce n’était pas prévu du tout. Par contre, j’ai prévenu les présidents en leur disant si vous voulez que ce soit moi, ok on va le faire par contre derrière, hors de question de revenir dessus. Il y a avait un avocat originaire de Bretagne qui s’occupait des questions juridiques pour la Ligue qui me dit : » Vous savez Monsieur Béral, au niveau des statuts vous pouvez même être élu en étant acclamé et vous pouvez pas refuser ». C’était de très vieux statuts et voilà c’est comme cela que ça s’est passé, j’ai été élu en juin 2011.
« Les gendarmes frappent à la vitre et il sort par la porte arrière. Ils ont pas tout compris sur le coup. »
BR : Justement vous parliez de votre vision de la Ligue. Quelle était cette vision ?
AB : C’est la vision selon laquelle les clubs se professionnalisent. Je parle des structures, du management, du médical, des centres de formation qui étaient déjà là mais qu’il fallait faire monter en niveau pour fournir les futurs talents. De recruter, des sponsors qui n’existaient pas pour La Ligue et d’y inscrire des valeurs. Et puis il y avait un deuxième volet qui concerne le spectacle de basket plutôt que simplement faire des matchs. C’est à dire de pouvoir travailler avec le gouvernement et les autorités pour créer des salles qui manquaient cruellement à l’époque. Depuis, on en a crée 20 à 25 et on en a agrandi aussi. On a aidé les clubs à faire cela, à faire les démarches. Et puis c’est encore créer de belles installations pour les journalistes, c’est restaurer des vestiaires au niveau des équipes, ou encore développer une économie des clubs basée sur du public et des VIP avec des gens qui sont heureux de se rencontrer lors des rencontres et qui restent autour de réceptions. Tout cela, c’était dans le projet et cela a été accompagné il y a deux ans et demi maintenant par une nouvelle tranche de 23 propositions d’évolution sur la professionnalisation des clubs et la mise en place des labels. Ces derniers obligent chaque club pro à avoir un general manager et un directeur sportif ainsi qu’une organisation médicale qui suit en déplacement. Cela fait augmenter le niveau des clubs. C’est très formel. On voit bien que notre niveau en Euroligue a beaucoup monté, un niveau même jamais atteint. On dépasse ainsi à présent des grands clubs dans cette compétition. Il y a un troisième volet enfin qui est économique. J’ai renforcé le rôle du contrôle de gestion que j’ai voulu strictement indépendant de la Ligue. Il ne peut pas y avoir de cabale. Un club, s’il est en déficit, il faut qu’il comble. S’il ne comble pas, il a un an pour le faire sinon il redescend. On en veut pas et ce n’est jamais arrivé. Ce qui fait que l’on a des clubs très solides économiquement. La preuve : après le Covid, il y a un seul club sur 36 qui a une situation nette légèrement négative. A part en NBA, cela n’existe nulle part dans le monde cela. Cela n’existe pas en Europe, cela n’existe pas en France dans les autres sports. C’est la garantie que l’on ne se structure pas à crédit, c’est ce que je veux dire.
BR : Beaucoup de chemin parcouru donc depuis cette prise de fonction. Du coup, quels sont vos projets pour votre prochain mandat, quels sont vos objectifs ?
Le travail de l’an dernier et de l’année d’avant cela a été de baisser la tête, de se serrer les coudes et de travailler avec le gouvernement pour cela et c’est réussi. Les clubs sont en très bonne santé et il faut s’en féliciter. Il y a les cinq plus gros budgets jamais atteints par la Ligue qui sont en place. Des joueurs français qui jouaient à l’étranger sont revenus. Les clubs peuvent payer ces joueurs et c’est très bien pour tout le monde. L’objectif c’est encore du comptable mais aussi de recréer du spectacle de basket qu’on a perdu pendant deux ans. De redonner l’envie aux gens de rentrer dans les salles pour prendre du plaisir avec nous. C’est encore d’augmenter l’économie de la Ligue pour redistribuer aux clubs parce qu’on s’est enrhumé pendant le Covid mais la Ligue a tenu. L’année la plus difficile c’est celle que l’on vit car le plus compliqué c’est de remettre les choses en place. Donc cela c’est l’objectif et puis pour les années suivantes, c’est s’autonomiser. On a commencé sur la diffusion audiovisuelle. On a investit massivement dans le programme des 23 propositions dans le numérique. On a crée une plateforme OTT qui produit tous les matchs. Des matchs gratuits et commentés, ce qui n’était pas le cas avant. On se fait aider d’ailleurs par les télévisions locales pour augmenter la qualité des images. Maintenant, on veut investir massivement dans la qualité des images produites pour créer une plateforme basket qui sera peut être payante, on verra, de façon à créer des revenus pour les clubs. Ce qui nous laissera serein par rapport aux télévisions payantes qui comme vous le savez ont délaissé les sports en salle y compris l’Euroligue pour le moment. D’ailleurs, ce n’est pas terminé. Pour ne faire que du rugby et du foot. C’est leur choix, c’est comme cela. Mais comme on est en avance, parce qu’on travaille dessus depuis 18 mois à la Ligue de basket, les étrangers viennent nous voir, y compris l’Euroligue qui voudrait nous rejoindre sur la plateforme. C’est le grand objectif car dès l’instant où on est autonome, on est libre de son destin plutôt que d’aller tirer des sonnettes. Et puis, à partir de là, on est capable d’aller recruter des sponsors nationaux, voir internationaux. Car ma façon de voir les choses c’est que la Ligue n’a pas à gagner d’argent, ni à en perdre d’ailleurs et que tout ce qu’elle gagne, elle doit le redistribuer aux clubs.
« Maintenant, on veut investir massivement dans la qualité des images produites pour créer une plateforme basket »
BR : Sur le côté patrimoine maintenant, en 2012, on se souvient d’une publicité avec Jean Michel Sénégal, Jacques Monclar, Alain Gilles et d’autres. Nous croyons savoir à Basket Rétro que c’est un sujet, l’histoire du basket, sur lequel vous êtes très sensible.
AB : Complètement ! C’est une manière de voir les choses liée à l’entreprise. Si on est là d’abord c’est que d’autres ont fait le boulot avant. Et la première chose que l’on doit faire, c’est de protéger ce qui a été fait. Et la deuxième chose, c’est d’améliorer ce qui a été fait pour le porter vers le haut. J’ai bien remarqué que les clubs crées de toutes pièces avaient beaucoup de mal à sortir de l’anonymat. Et que même dans le foot, les clubs qui se sont auto imposés ne restent pas. Moi, pour l’histoire du basket, je veux que l’histoire du basket soit connue et que les gens qui sont intéressés pour le faire interviennent. C’est à dire que les anciens joueurs, les anciens coachs puissent intervenir dans le management de la Ligue et puissent intervenir dans les centres de formation pour expliquer aux gamins qui arrivent et qui ont aujourd’hui 14, 15 ou 16 ans que ce n’est pas eux qui ont inventé le basket, que c’est d’autres personnes. Et que ceux qui sont là à présent, sont là pour faire mieux que ce qui a été fait avant. Qu’il y a des règles, qu’il y a des anciens et que les anciens sont là pour donner des conseils aux jeunes. Il y a la fédération qui travaille beaucoup sur le sujet aussi avec le Hall of Fame, le Musée du basket et avec les meilleurs supports bien sur. Mais à chaque fois qu’on organise des manifestations à la Ligue, il y a toujours le club des anciens internationaux. On les cite et on les faire venir si c’est possible, parce que ce qu’il faut que les gens comprennent et se mettent bien dans leur tête : c’est que ce qu’ils vivent actuellement, cela a été bâti sur ce qui a été fait avant. Cela a été bâti par des champions qui ont été beaucoup donné. Ces gens là, il ne faut plus jamais les oublier parce qu’ils ont gagné des titres nationaux et internationaux. Parfois, ils ont dû allier cela en travaillant, parce que le basket ne donnait pas toujours suffisamment pour manger. Et ces gens, il faut les remercier. Les remercier sans arrêts. Et donc c’est pour cette raison, que les anciens internationaux interviennent dans les centres de formations pour expliquer l’histoire du basket. Ils insistent ensuite sur le danger des addictions : l’alcool, la drogue, etc… Ils parlent aussi des risques des carrières et insistent sur le fait que tout le monde ne sera pas en NBA. Ce qui est important aussi, c’est de leur expliquer que le basket puisse leur apporter aussi à ces jeunes de centre de formation un métier quel qu’il soit comme professeur de mathématique, menuisier ou maçon mais avec un diplôme. Ces gens là, le basket ne leur redonnera pas le rôle de Tony Parker ou Boris Diaw. On met les anciens internationaux en avant autant que l’on peut d’autant que parfois, il y a des gens qu’on peut oublier.

BR : Depuis un certain temps, de nombreuses choses ont été faites dans le basket. Il y a eu les 30 ans de la LNB ou l’archivage des statistiques. Alors que faire pour faire perpétuer l’histoire du basket et de son patrimoine. Avez vous des projets en ce sens dans les années à venir ?
AB : Oui évidemment. Nous, on préfère travailler de concert avec la fédération pour cela car évidemment il y a une liaison avec les équipes nationales pour les meilleurs joueurs. On va revenir au spectacle avec le All-Star Game dont on a été privé cette année. Et à chaque fois, on va créer un événement la dessus que l’on va paramétrer par l’intermédiaire d’internet. On a d’ailleurs des millions de followers qui sont plutôt jeunes d’ailleurs. Et on veut insérer une partie de l’histoire dans ces événements. On a quelqu’un chez nous qui a tous les livres donc une bonne partie de l’histoire. Avec la fédération, on va donc mettre en avant d’anciens grands de notre sport mais aussi d’anciens grands clubs dont certains ont disparus d’ailleurs. Je pense chez les filles à Mirande ou chez les garçons à Berck notamment mais pas que. Or ces clubs ont construit notre histoire. Après, ils ont disparu parce qu’ils étaient trop petits pour devenir de grands clubs professionnels tout simplement en terme économique. Et on veut se servir des moyens de communications modernes qu’on maitrise parfaitement pour pouvoir ne pas mettre le couvercle sur l’histoire. Et plutôt même que de mettre le couvercle, l’ouvrir et tourner la soupe de manière à ce que tout le monde la connaisse et la trouve bonne !
BR : Parfois aussi, on a tendance à oublier que le basket a existé bien avant 1987, date de la création de la Ligue. Or parfois, on trouve très peu d’information sur le basket d’avant.
AB : Oui tout à fait c’est vrai. D’abord, les méthodes de communication et d’archivages n’étaient pas tout à fait les mêmes. Il faut se souvenir qu’avant c’était du papier. Et puis vous savez, la fédération prend tout ce qui va de la départementale à l’équipe de France alors que la Ligue ne s’occupe que des pros. La ligue, le matin, elle pense aux pros, le midi elle pense aux pros et le soir elle pense toujours aux pros. Ce que je veux dire c’est qu’elle se crée son périmètre. Ce périmètre là était beaucoup plus flou avant 1987 alors oui parfois c’est très difficile de tirer sur la pelote et de trouver quelque chose au bout. Alors que nous depuis, on a fait un stock de données, de statistiques, de noms, de beaucoup ce choses en fait. On a de la matière aujourd’hui à partir de cette pelote là.
BR : Justement on parle souvent de la responsabilité de la Ligue pour la diffusion du patrimoine mais qu’en est-il pour les clubs ?
AB : Les clubs ne font pas tous le même travail. Certains ont édité leur livre d’or avec notre support. Je pense à Pau, Cholet, Nanterre, Gravelines mais aussi des clubs de Pro B et ce pour pouvoir raconter leur histoire. Il y a Tours aussi. Ces clubs ont les photos, les images en leur possession. Si vous allez à Cholet par exemple, derrière les tribunes, il y a une galerie d’exposition de photos depuis le premier jour. Une galerie évidemment marquée par la période Michel Leger. Mais tout cela appartient aux clubs. La Ligue n’a pas cela en stock et c’est normal. Et ces clubs font beaucoup d’efforts. Certains disent dans les centres de formation à leurs jeunes que les gens sur les photos viendront peut être un jour leur expliquer comment ils ont vécu les choses dans le passé et leur dire : voilà ce qu’était le club à cette époque là.
« Et ces clubs font beaucoup d’efforts »
BR : Pour résumer les choses, quelle place a l’histoire du basket au sein de la Ligue ?
La première place c’est le championnat et celle des affaires évidemment. Pour moi, l’histoire c’est le socle. C’est sur quoi on a bâti, alors l’histoire sera toujours là. Comme je vous l’ai déjà dit, on travaille autour des nouveaux moyens de communication pour la faire vivre. Ce sont des hommes, des femmes, d’anciens grands champions qu’il faut considérer. D’ailleurs, la porte des instances de la Ligue Nationale leur est totalement ouverte. Ils sont les bienvenues même si quand on décroche on a pas trop envie de se mêler de tout cela. L’histoire, je la veux dans les instances. Pierre Dao a d’ailleurs fait parti du comité directeur. Il est parti et je l’ai fait revenir en comité sanitaire éthique. Je veux en fait que des gens puissent veiller sur le présent avec leur expérience du passé. Cela veut pas dire qu’ils décident de tout. Cela veut dire qu’ils savent pourquoi certaines choses n’ont pas marché. Et puis l’histoire du basket, on va la mettre dans la communication numérique de la Ligue pour raconter cette histoire de ces hommes et de ces femmes. Je veux que l’on ait une page ouverte sur le passé, une page qui s’alimente, qui se change. On y mettra des anecdotes et des interviews intéressantes. Donc quelle place ? Pas la place majeure, mais une place importante dans le sens et en étant banal « si tu veux savoir où tu vas, mieux vaut savoir d’où tu viens. »
BR : Un mot de la fin ?
Déjà je suis très content que l’on parle de cela. Dès que je peux, j’assiste aux réunions des anciens internationaux que préside Isabelle Fijalkowski. Enfin j’assistais pour être plus précis parce que le Covid est passé par là. Dès que je peux, je leur témoigne d’ailleurs notre attachement à ce qu’ils ont fait. Alors très humblement bien sur parce que je suis tout sauf un bon joueur de basket. Mais je pense que si on est solide aujourd’hui, c’est qu’ils nous ont donné les bons messages.
Propos recueillis pour Basket Retro par Patrick Parizot.
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