La mort du mid-range : comment la NBA a évolué vers un jeu plus extérieur ?
Analyse
Dans les années 80, le jeu et la conception d’une attaque étaient très différents de ce que l’on peut voir dans un match NBA actuel. Première raison évidente, la ligne à 3 points n’existait pas en NBA avant 1979. Popularisée par la ABA, qui avait instauré ce changement dès 1968, c’est lors de la fusion des deux ligues et poussée par les joueurs que cette révolution dans le jeu est démocratisée. Le jeu a donc forcement évolué passant d’un basket dominé par les intérieurs pour arriver à nos jours actuels où les extérieurs sont les joueurs majeurs. Voyons ce qui a amené ce changement et en quoi la mort du mid-range est un tournant majeur de cette évolution.
L’ART DU MIDRANGE
Kobe. Jordan. Bird. West. Iverson. Melo. Ewing. Robinson. Tous ces grands noms se sont façonnés en tant que légendes vivantes (ou en devenir) du Basketball et du sport en général au fil des années. Une qualité les réunit : leur précision à mi-distance. Mais tous n’ont pas la même façon de l’utiliser. Nous avons ici trois types de tireurs. Les premiers, Kobe et Jordan avaient pour habitude de se faire harceler par le (les) défenseur vu leur capacité à scorer rarement égalée. Ils ont donc naturellement développé une facilité à tirer sur la tête du défenseur tout en faisant ficelles sans aucun soucis. Une de leurs armes de prédilection était aussi le fade-away. Tirer en se retournant leur permettait de se créer de l’espace plus facilement et d’éviter d’être contré. Autres joueurs, autre style, le shoot en sortie d’écran.
Larry Bird et Jerry West étaient tous les deux des adeptes du tir en sortie d’écran. Quoi de plus simple que de tirer sans défenseur à moins d’un mètre. L’apport d’un bon screen offre deux solutions au porteur de balle : le tir en première intention ou alors le poseur d’écran qui a déroulé vers le panier.Troisième solution pour réussir son tir : se créer de l’espace grâce à son dribble. Exemple parfait avec Allen Iverson et Carmelo Anthony mais avec deux façons différentes. Iverson va chercher à éliminer son vis-à-vis pour avoir un coup d’avance sur lui et placer son shoot, tandis que Melo lui a son schéma classique. Il va recevoir la balle en étant un peu décalé par rapport à l’axe du panier, faire deux dribbles en direction de la ligne de lancer puis prendre son jumpshot à l’aise. Facilement défendable ? Non, car le défenseur ne peut pas prendre le risque de sauter pour gêner le tir a tous les coups car il prendrait le risque de mordre à une feinte, ce qui laisserait le champ libre au tireur jusqu’au panier.
Le poste de pivot a lui aussi droit à ses tireurs. Malgré les nombreux changement autour de ce rôle, leur façon de prendre leur tir à mi-distant n’a pas tant changé. Regardons deux pivots majeurs que sont Patrick Ewing et Karl Anthony Towns. Tous deux vont profiter de deux atouts majeurs : le premier est le laxisme en défense. Un pivot étant généralement moins fiable aux tirs, ils sont souvent moins défendu dès qu’ils s’écartent du cercle, et c’est de cet espace là que profitent certains grands comme Nikola Jokic et David Robinson. Leur deuxième façon de se trouver un tir est de profiter de leur mobilité pour venir demander la balle en mouvement pour ensuite enchaîner avec un catch and shoot.
POURQUOI EST-IL DISPARU AUJOURD’HUI?
Si il a été très présent et utile, depuis le début des années 2010, le shoot à mi-distance a progressivement été de moins en moins utilisé jusqu’à être quasiment délaissé de nos jours comme le montrent les images ci-dessous.



Comme nous le montre cette photo qui reflète les 200 positions de shoot préférées des joueurs NBA (par Kirk Goldsberry), en l’espace de 20 ans le tir à 3 points est devenu une référence offensives, délaissant le tir en sortie de raquette. Comment expliquer cela ? Premier facteur, le jeu beaucoup plus rapide de nos jours va forcément pousser les joueurs à chercher un panier rapidement. En contre attaque, le drive vers le panier est naturel, tandis que sur jeu posé, tirer en dehors de la ligne est plus rapide car le tir sera forcément plus ouvert qu’au milieu de la défense adverse, et va également demander moins de travail qu’un shoot midrange. Cette évolution coïncide aussi avec l’effacement du rôle de pivot dominant. Forcément, avec un jeu qui prône la rapidité et le tir de loin, l’archétype du grand Big Man peu précis de loin est vite passé à la trappe et des joueurs comme Dwight Howard en ont fait les frais. Troisième facteur, qui va englober les deux premières : le Small Ball.
Cette vision de jeu qui consiste à jouer avec des joueurs dit »petits » va favoriser dans un premier temps la rapidité et la mobilité, mais aussi chercher à multiplier les shooters pour pouvoir scorer de loin. Ce type d’équipe est popularisée par les Warriors mené par Curry qui symbolise parfaitement ce changement d’identité dans le basket. le Small Ball est aujourd’hui poussé au maximum avec les Rockets qui ne comptent aucun pivot et seulement trois joueurs dépassant les 2 mètres dans leur roster actif. A titre indicatif, les Rockets ont une moyenne de 54 tirs à trois points tentés en playoffs cette année, représentant plus de la moitié de leurs tirs.
QUE RESTE-T-IL DU MID-RANGE?
Même s’il est très peu répandu, le midrange reste une des armes favorites de certains. Des joueurs comme Kawhi Leonard, DeMar DeRozan, Bradley Beal ou encore CJ McCollum sont très fiables dans ce domaine et profitent du fait que ce type de tir est moins utilisé et donc moins anticipé pour trouver plus facilement un bon shoot. Les floaters sont aussi de plus en plus utilisés par les joueurs. On peut y voir une certaine évolution qui aurait fusionné le tir en course avec celui à mi-distance. Une spécialité des joueurs comme Isaiah Thomas ou encore Kyrie Irving, tous deux meneurs agiles qui trouvent un moyen de marquer contre les protecteurs de cercle tout en étant un peu éloignés.
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