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[Portrait] Dennis Johnson, la main verte

Portrait

Montage Une : Laurent Rullier pour Basket Rétro

Il aurait eu 65 ans le 18 septembre. De la grande équipe des Celtics des années 80, il est le quatrième mousquetaire après Bird, McHale et Parish. Respecté par les puristes du jeu, il est moins connu du grand public que l’axe 3-4-5 des Verts mais sans aucun doute le ciment du 5 majeur.

UNE JEUNESSE CALIFORNIENNE

Difficile d’imaginer que Dennis Johnson, né en 1954 et tellement associé à Boston et la Côte Est, est originaire de Californie, tout comme Paul Pierce, autre Celtic célèbre. Il est le 8e enfant d’une fratrie de 16. Tout jeune, Dennis est plutôt attiré par le baseball et les Dodgers qu’il va voir en famille et, devenu lycéen, n’ayant pas encore eu de poussée de croissance, il joue peu sur les parquets de la Dominguez High School. Ayant enfin atteint sa taille adulte, cet athlète d’1m93 et 83kgs est repéré jouant avec ses frères sur les playgrounds de Summer League à San Pedro par Jim White, coach du Los Angeles Harbour College, un Junior Collège. Dennis Johnson y obtient une bourse d’études et y joue deux saisons. Des statistiques flatteuses mais un caractère indiscipliné font que les propositions ne se bousculent pas pour rejoindre le cursus NCAA. Il reçoit quand même une proposition de l’université de Pepperdine coachée par Gary Colson qui se souvient:

« Nous l’avons recruté alors que personne ne le voulait vraiment et voir désormais son maillot accroché au plafond du TD Garden rend son histoire spéciale comme un conte de Cendrillon. »

Johnson effectue une saison qui ne manque pas de sel à Pepperdine avec des statistiques de 15,7 points, 5,8 rebonds et 2,4 passes décisives de moyenne en 27 rencontres. L’arrière au caractère bien trempé et les Waves, surnom des joueurs, surfent jusqu’au tournoi final NCAA où la vague se brise au second tour face à UCLA.

Dennis devance d’une année son entrée en NBA et s’inscrit à la draft 1976. Ses parents se séparant et la maison familiale ayant brûlé, il répond aux sirènes de la ligue et d’un contrat professionnel. Gary Colson le conseille dans cette direction. Il est drafté au deuxième tour, 29e choix au total par les Supersonics. Il est à noter que Robert Parish, son futur coéquipier à Boston est lui drafté en 8e position par Golden State. Son premier achat ? Une maison pour sa maman. Un cœur tendre finalement ce Dennis.

Il reste 4 saisons à Seattle à partir d’octobre 1976. Sa première année sous les ordres de la légende Bill Russell, qui quittera la franchise à l’issue de la saison, est la seule de sa carrière sans participation aux playoffs avec un bilan de 42v/40d. Dennis Johnson est un joueur athlétique occupant le poste de shooting guard. La deuxième année commence mal d’un point de vue des résultats mais l’arrivée en cours de saison de l’entraîneur Lenny Wilkens, bien connu dans la ville de l’Etat de Washington, booste l’équipe vers un bilan de 47v/35D qui la qualifie pour les playoffs. Les Sonics atteignent même à la surprise générale la finale face aux Bullets de Washington d’Elvin Hayes, Bob Dandridge et Wes Unseld. La série est disputée et se termine au game 7. Dennis Johnson réalise au cours de cette dernière rencontre une des pires performances de l’histoire des Finals avec un catastrophiques 0 sur 14 aux shoot. Sur les cendres de ce couac va peut être naître la clutchitude souvent associée à Dennis Johnson.

En effet, dès l’année suivante, les Sonics retrouvent les Bullets pour le titre mais cette fois ci les avions vont plus vite que les balles et Seattle remporte ce qui sera l’unique titre de son histoire. Dennis, hyper complet des deux côtés du terrain, est élu MVP des Finals. Toutes ses catégories statistiques sont en hausse par rapport à la saison régulière: 22,6 points, 6 rebonds et 6 passes décisives de moyenne en 5 matches. On peut comparer les Sonics aux Pistons champions 2004. Pas de réelle superstar mais un collectif de joueurs talentueux et soudés, tels Gus Williams, Fred Brown ou Jack Sikma réunis dans un même objectif de cette conquète du titre 1979.

seattletimes.com

L’année suivante, Dennis Johnson se voit affubler de son fameux surnom « DJ » par le commentateur des Sonics en raison de la présence de trois « Johnson » dans l’équipe dont le futur micro-ondes Vinnie. Même si la saison régulière est meilleure que la précédente en terme de résultats, les Sonics se crashent en finale de conférence face aux talentueux Lakers du jeune Magic. Des tensions entre Dennis Johnson et Lenny Wilkens se font ressentir conduisant Seattle à trader leur arrière.

DJ est ainsi échangé contre Paul Westphal des Suns de Phoenix, excellent arrière, membre du meilleur 5 de la ligue en 1977, 1979 et 1980. En Arizona, DJ garde ses standards statistiques et découvre peu à peu le poste de meneur de jeu. Son équipe, dirigée par John MacLeod, participe pendant ses 3 saisons ensoleillées aux playoffs mais ne dépasse jamais les demi-finales de conférence. DJ assoit sa réputation de fort défenseur en compilant les nominations dans les meilleurs 5 défensifs (9 au total en carrière) associées aux sélections au All Star Games (5). Il fait partie du meilleur 5 NBA en 1981 ce que, peut être, beaucoup d’entre nous ont oublié. Cependant le compétiteur qu’est DJ vit mal la situation des échecs en postseason et, comme à l’accoutumée, entre en conflit avec son coach. Un changement de carrière est nécessaire et le malin General Manager de Boston va en profiter. Red Auerbach, qui connait lui aussi bien la musique, joue la sérénade à Phoenix et récupère DJ en échange de Rick Robey, un pivot sans grand impact réalisant ainsi un des trades les plus geniaux de l’histoire de la NBA.

LA SYMPHONIE CELTE ET LES TITRES DE 1984 ET 1986

Dennis Johnson arrive donc à Boston en 1983. Il change de numéro, passant du 24, retire en l’honneur de Sam Jones en 1969, au numéro 3. Les Celtics sont bien sûr une équipe déjà bien en place mais qui ont été valsés par les fringants Bucks lors des playoffs. Ce sweep coûte sa tête à Bill Fitch, coach victorieux du titre de 1981. Red Auerbach a diagnostiqué une problème à la mène. Tiny Archibald étant vieillissant, Gerald Henderson trop tendre, Danny Ainge et Quinn Buckner plutôt utilisés en poste 2. Dennis Johnson est l’ajout idéal pour solidifier le backcourt en vue des joutes futures en playoffs. Et fort justement, les Celtics améliorent leur classement, se vengent des Bucks en finale de conférence, avec un DJ muselant le talentueux Sidney Moncrief, et rejoignent les NBA Finals .

La finale 1984 face aux Lakers demeure dans la mythologie de la NBA, un duel mémorable allant jusqu’au Game 7. L’histoire de la NBA sera marquée à jamais par cet affrontement entre deux villes, deux équipes, deux stars, deux styles, deux philosophies, deux couleurs. De nombreux flashs reviennent en mémoire des fans de cette époque: la chaleur du Garden, les chemises ouvertes des supporteurs, la veste jaune de Jack Nicholson, les maillots échancrés gorgés de sueur, l’oxygène pour Kareem, le coup de la corde à linge de McHale sur Rambis, la vitesse Pourpre et Or face à la rudesse verte, le passe-et-va entre Bird et Maxwell, le chambrage de ML Carr, le coup de gueule de Larry, l’interception d’Henderson sur la mauvaise passe de Worthy et pour finir les serviettes qui tournent, l’envahissement du parquet usé de Boston et le cigare de Red Auerbach. 

Dennis Johnson passe par différents sentiments au cours de cet affrontement. L’entraîneur, K.C. Jones, demande à Gerald Henderson de défendre sur Magic à la place de DJ au cours des trois premières rencontres.  On peut lire dans l’excellent livre retraçant les carrières de Bird et Magic écrit en collaboration avec Jackie McMullan, «Quand le Jeu était à Nous», que le meneur des Lakers est plutôt agréablement surpris de ce changement, ayant du mal habituellement à se défaire des griffes de Dennis. À partir du match 4, les Celtics étant menés 2 à 1 et Henderson en souffrance dans sa mission sur le meneur angelino, DJ « The Defensive Wizard » reprend la garde du « Magicien de Lakerland » tout en pesant en attaque grâce à sa science du jeu. Il n’avait pas osé parler de sa déception initiale à K.C. Jones, traînant depuis la High School, en passant par Pepperdine, Seattle et Phoenix une réputation de râleur vis à vis des décisions du coach. Mais DJ est devenu un joueur mûr. Il est respectueux de l’institution celtique, de Red Auerbach à qui on ne la fait pas, et de KC Jones. C’est un vrai leader, un joueur clutch, parfaitement conscient de ses forces et faiblesses, pensant équipe avant tout, afin d’obtenir ce deuxième titre.

La saison 1984-85 de Boston, conclue par un excellent bilan de 63v/19d voit DJ passer définitivement du poste 2 au poste de meneur, Gerald Henderson étant parti aux Sonics. La revanche tant attendue face aux Lakers est au rendez-vous à l’issue de playoffs maîtrisées mais les Pourpre et Or terrassent les Celtics 4 à 2 grâce notamment à un grand Kareem Abdul-Jabbar. On retient néanmoins le shoot victorieux de DJ lors du match 4 ramenant la série à égalité 2 partout.

La saison suivante, on attend la belle entre les deux formations mais les Rockets de Houston menés par leurs deux Twin Towers éliminent les Lakers à l’Ouest grâce au shoot miraculeux de Ralph Sampson et ont le privilège d’affronter les Celtics de nouveau finalistes pour la 3e fois consécutive. Le 5 Majeur DJ-Ainge-Bird-McHale-Parish est à son apogée. La partition en playoffs est quasi parfaite et Boston remporte le titre 1986, le troisième de la carrière de DJ, toujours aussi complet dans la quête du graal.

DJ ET LARRY

Lorsqu’un basketteur tel Larry Bird déclare que vous êtes son coéquipier préféré, cela classe son homme. Larry Oiseau est pourtant un dur, avare de compliments, mais le courage, la dureté et la volonté farouche de DJ ont conquis le grand blond. Une vidéo extraordinaire (à la fin de cet article) démontre cette alchimie entre les deux joueurs, «The Secret Play».  Toujours le même scénario, le numéro 3 en tête de raquette et le 33 se jouant de son défenseur en ligne de fond pour une passe laser backdoor conclue par deux points dans la peinture.

Ces deux là étaient faits pour se rencontrer. Larry aime ce type de joueur n’ayant peur de rien ni personne. Ce sont deux compétiteurs haïssant la défaite et ils correspondent parfaitement à l’esprit du Boston Garden. Quel régal de voir cette connexion entre eux, ces regards de respect réciproque, ces accolades d’amitié virile. 

Dans ses 7 saisons celtes, à partir de 1983, DJ se mue progressivement en meneur pur, complément de Bird, lui-même précurseur du statut de point forward. La puissance collective de Boston se trouve multipliée par cet hydre à deux têtes. La connexion entre le 3 et le 33 de Boston se symbolise notamment à travers deux actions lors de la finale de la conférence est en 1987 face aux Pistons de Detroit: Une brillante passe avec l’aide du panneau de DJ à Bird et la fameuse interception de Larry sur la remise en jeu d’Isiah Thomas lors du Game 5. Le meneur, malin et connecté à son coéquipier, se dirige immédiatement vers le panneau réceptionnant la passe de l’ailier pour un lay-up main droite à gauche au nez et à la barbe de Joe Dumars. Les Celtics éliminent les Pistons en 7 matchs et pour atteindre la belle tant attendue face aux Lakers et leur showtime. Los Angeles remporte cet ultime combat Celtics/Lakers des années 80.

Outre les compliments de son coéquipier, le grand Larry, Magic Johnson, son adversaire, déclare que DJ est le meilleur arrière défenseur all time. Cela classe un peu plus son homme.

LA FIN DE CARRIÈRE

Les années passant, le physique de Dennis devient de plus en plus atypique. Très cambré, les fesses rebondies dans son short court tellement années 80’ et des bras anormalement longs se terminant par deux wristbands blancs et des mains gigantesques balançant ces fameuses passes tendues. La bouille malicieuse de Dennis Johnson, ses cernes et surtout ses taches de rousseur donnent l’impression que cet afro-américain a aussi des origines irlandaises et le Fighting Spirit s’y rapportant. Après quatorze années de NBA, Dennis tire sa révérence à l’été 1990 laissant les Celtics orphelins. Avec les retraites à suivre de Bird et McHale, le départ de Parish et la mort de Reggie Lewis en 1993, Boston rentre dans une période de disette et assiste à l’avènement des Bulls. Les Celtics honorent DJ en retirant son numéro 3 le 13 décembre 1991.

«Boston a été un conte de fées pour moi. Avoir mon numéro retiré, c’est l’honneur ultime.»

Dennis Johnson laisse l’image d’un joueur battant, excellent défenseur, bon intercepteur et passeur, shooteur dans la moyenne sauf à trois points mais ce n’est pas encore la mode. Le 5 fois All-Star est réellement sous estimé au vu de son impact et de son côté clutch.

UNE APRES-CARRIÈRE AU BORD DES PARQUETS

Le Celtic embrasse bien sûr une carrière d’encadrant. D’abord comme assistant-coach à Boston entre les saisons 93-94 et 96-97, années de grande souffrance pour les supporteurs de l »équipe puis dans sa région natale aux Clippers entre les saisons 99-2000 et 2002-2003 avec un court intermède comme coach pricipal en CBA aux Bobcats de La Crosse au tournant du millénaire. DJ obtient une chance d’être entraineur en chef en NBA toujours aux Clippers en 2003 pour les 24 derniers matchs de la saison en remplacement d’Alvin Gentry. L’expérience est plus que mitigée avec un bilan de 8v/16d avec une équipe jeune dont Elton Brand, Lamar odom ou Andre Miller. Il poursuit son expérience de coaching en league de développement une saison au Florida Flame puis aux Toros d’Austin. lors de sa 2e année à Austin, lee 22 février 2007, Dennis est victime d’un arrêt cardiaque à la sortie de la salle d’entrainement des Toros. Il rejoint au paradis vert le grand Red Auerbach parti 4 mois plus tôt. 

CreditRodolfo González/Austin American-Statesman via Associated Press

En 2010, le Hall au Fame introduit à titre posthume Dennis Johnson. Son frère Gary, très ému, prononce le discours de remerciement accompagné de Donna Johnson, l’épouse de Dennis, et Larry Bird. Gary raconte l’influence de son frère Kenny sur le jumpshot de DJ et rend hommage à tous les gardiens qui ont laissé les frères Johnson jouer au basket tard le soir dans les salles californiennes. Dennis et Donna ont eu trois enfants dont le prénom commence eux aussi par un « D »: Dwayne, Daniel et Denise. « D » comme Défense et Détermination, deux cactéristiques symbolisant ce joueur battant que les fans des Celtics n’oublieront jamais.

SES STATS

SON PALMARÈS

  • Champion NBA en 1979 avec les Supersonics et en 1984 et 1986 avec les Celtics.
  • MVP des Finals en 1979.
  • NBA All Star en 1979, 1980, 1981, 1982 et 1985.
  • All-NBA First Team en 1981.
  • All-NBA second Team en 1980.
  • NBA All-Defensive First Team en 1979, 1980, 1981, 1982, 1983 et 1987.

RÉTROSPECTIVE DE LA CARRIÈRE DE DENNIS JOHNSON 

LA CONNEXION DJ / LARRY

About Vincent "Baby TER" Reculeau (24 Articles)
passionné de la NBA des années 80 et 90, des drafts de Bird et Magic jusqu'au 6e titre de MJ. Et plus si affinités... Biberonné à Maxi-Basket, 5 Majeur, Canal+ et Pontel.

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