Playoffs 1993 : les Boston Celtics piqués au vif par Charlotte
NBA Playoffs Hitory
Charlotte Coliseum, le 5 Mai 1993. Le chrono annonce qu’il reste exactement 3,3 secondes à jouer. Les Hornets de Charlotte ont dans leurs mains la dernière possession de ce match au couteau. Charlotte doit marquer pour s’imposer, et ainsi, remporter pour la première fois de sa jeune histoire une série de playoffs…
Mais les vieux briscards des Celtics de Boston ne l’entendent pas de cette oreille. Eux que l’on pensé même définitivement hors du coup à l’entame du quatrième quart-temps avec un déficit de 18 points à remonter. Les dés semblaient jetés et on vous aurez déclaré fou si vous aviez osé misé sur tel scénario.Pourtant, dans un dernier sursaut d’orgueil, les légendaires Celtics sont revenus dans ce match. Ils sont même devant au score à 3,3 secondes de la fin de la partie. Le bruyant Charlotte Coliseum n’a jamais été aussi silencieux. La ville retient son souffle. Alonzo Mourning se retrouve seul en tête de raquette, il hérite de la gonfle. Le grand Zo’ prend ses responsabilités et déclenche un jump-shoot. Le bruissement moelleux du filet transperce le silence. » Nothing but net « . Mourning met dans le mille, le Charlotte Coliseum plein jusqu’à la gueule peut exploser. Les bras en croix, allongé sur le parque, le pivot des Hornets se retrouve sous un amas de corps humain venu le féliciter. Basket Rétro vous propose de revivre en détails cette série de playoffs. Vous avez dit classique !
LA FOUGUE FACE A L’EXPÉRIENCE
Mais avant de revenir de façon plus approfondie sur l’affrontement qui nous intéresse ici, il est essentiel de planter le décor de cette série pas vraiment comme les autres. D’un côté nous retrouvons les Celtics de Boston, franchise ô combien légendaire de la ligue. Les Celtics ont à leur actif quantité de titres et nous n’aurions pas assez de nos dix doigts pour recenser les stars ayant porté le célèbre jersey frappé du trèfle. Face à eux se dressent les Hornets de Charlotte. Une toute jeune équipe. Les frelons ont vu le jour en 1989 et nous sommes en 1993. Tout ou presque opposent les deux formations. Les hommes de Caroline du Nord sont des jeunes loups affamés. Aucun joueur majeur du roster ne dépasse la trentaine. Les deux leaders du coach Allan Bristow sont Larry Johnson et Alonzo Mourning, qui découvre la grande ligue, Mourning est rookie, Johnson ne joue que sa deuxième saison. Du côté de Boston, l’équipe est composé de vieux briscards. Certains, comme McHale ou Parish sont là depuis des lustres. D’autres comme Xavier McDaniel sont arrivés à Boston avec l’esprit revanchard. Parish et McHale ont tout deux dépassés les 35 piges. » The Chief » affiche même 39 printemps au compteur. Un âge où l’on est plus proche du Hall Of Fame que d’une demi finale de conférence en somme. Le choc entre les deux équipes s’annonce épique et sans merci.
Le game 1 de cette série se déroule au Boston Garden. Les Celtics ont l’avantage du terrain grâce à un meilleur bilan que les Hornets au terme de la saison régulière. L’autre avantage évident des Celtics sur les Hornets vient de leur expérience. Les bannières qui garnissent le plafond de la salle sont là pour le rappeler à chaque instant. Les grand rendez-vous, c’est une habitude à Boston. Les deux formations sont donc dans les starting block. Du côté de Boston, la méfiance est de mise. Les Hornets sont jeunes et jouent vite. Leur attaque de feu (la deuxième de la saison régulière avec un total moyen de 110,1 points par match) risque de mettre à mal les organismes vieillissants des Celtics. Pourtant le premier à flanché du côté de Boston ne sera pas le plus âgé. En plein milieu du premier quart-temps, l’ailier Reggie Lewis s’effondre sur le parquet. Stupéfaction. Lewis est considéré par les fans du garden comme le possible successeur de Larry Bird. Il n’a que 27 ans. Personne ne comprend ce qui se passe, un murmure descend des gradins. Lewis reviendra bien faire un essai en début de seconde période, mais ça sera tout pour lui. Plus tard on lui diagnostiquera une cardiomyopathie. Carrière terminé pour le jeune joueur. Première coup dur pour les Celtics qui perdent là un atour offensif de premier ordre, Lewis facturait en effet 20,4 points de moyenne en saison régulière. On a frôle le pire ce soir là, Lewis l’expliquera après la rencontre :
» J’ai eu peur. C’était une sorte de vertige. Allongé sur le parquet, j’ai eu un flash. Pendant quelques secondes j’ai pensé à Hank Gathers «
Hank Gathers, ce jeune joueur qui s’était effondré lui aussi sur un parquet en 1990, mais qui ne s’était pas relevé. Lewis lui est revenu sur le banc pour suivre la fin de la partie de ses coéquipiers. Reggie Lewis nous quittera cependant quelques mois plus tard. En attendant cette fin tragique, ces coéquipiers sont galvanisés par ce coup du sort. Xavier McDaniel redevient le X-Men de ses années Supersonics et balance 21 points. La marque est bien répartie pour les Celtics, ils sont 6 joueurs à inscrire plus de 10 points au cours de ce match. Le discret Sherman Douglas frôle même le triple double avec 9 rebonds, 11 assists et 13 points. Suffisant pour venir à bout des Hornets. Ce soir là, la mécanique des frelons s’enraye. Le collectif peine à faire la différence, et le jeu des Hornets ne se reposera que sur les joueurs du cinq majeur. Malgré 30 points et 11 rebonds de Mourning, ou encore 15 assists de Mugsy Bogues, le banc ne pèse pas suffisamment sur la rencontre et Boston conserve l’avantage du terrain. Score final ; 112-101 pour les locaux. Le triomphe est modeste du côté de Boston. Reggie Lewis est out pour la série, et son absence pèsera forcément dans la balance au moment de faire les comptes. Les Celtics ont trop d’expérience pour ne pas le savoir.
PAS DE PITIÉ POUR LES LÉGENDES
2 jours plus tard, ce sont des frelons au dard aiguisés qui déboule sur le parquet du Boston Garden. L’écueil du premier match de playoffs est passé. Fini la pression et les jambes qui tremblent, les gars de la Caroline du Nord sont venus pour récupérer l’avantage du terrain. Larry Johnson en tête. Remonté comme un coucou Suisse, celui que l’on surnomme » GrandMama » annonce la couleur :
» On s’est fait bouffer ! Lors du prochain match, moi je vais mettre du muscle là dedans. «
Et quand on connait l’impressionnante musculature de LJ, mieux vaut prendre ses menaces au sérieux. Le match sera long et défensif. Deux prolongations seront nécessaire pour départager les protagonistes. Sous les coups de boutoir de Johnson et de Mourning, McHale et les siens finissent pas céder. Deux prolongations, un programme trop chargé pour les carcasses usées des anciens de Boston qui n’auront pourtant pas démérité. Kevin McHale et Robert Parish défendront la maison verte jusqu’au bout. Les deux signent un double-double (16 rebonds et 19 points pour Parish, 30 points et 10 rebonds pour McHale) mais le reste de l’effectif, McDaniel en tête avec ses six malheureuses unités, est totalement hors sujet. Charlotte est sans pitié et vient s’imposer d’un tout petit point. 98-99, les Hornets repartent en Caroline du Nord avec la possibilité de finir la série.
Les fans des Celtics commencent à envisager le pire. Déjà privé de Reggie Lewis, il va désormais falloir aller gagner au Charlotte Coliseum pour survire dans cette série au meilleur des 5 manches. Et l’affaire s’annonce compliqué tant la ferveur des fans de la Caroline du Nord est grande. Depuis sa création, la franchise de Charlotte caracole en tête des affluences de la ligue. Les frelons furent même accueillis en héros à leur retour de Boston. C’est un Tyrone Bogues sous le charme qui se souvient de ce moment de communion :
» C’était beau ! J’avais presque l’impression que nous étions champions. Je n’ose même pas imaginer la suite. «
Alors imaginé un peu le bazar envisageable pour ce premier match de playoffs de l’histoire de la franchise. 23 698 spectateurs se tassent dans les gradins. La salle bourdonne de plaisir pour ce Game 3 qui sera un véritable récital du basket offensif des joueurs d’Allan Bristow. Un jeu flamboyant et altruiste qui met à genoux les Celtics. Les joueurs de Boston n’ont jamais paru aussi vieux que ce soir du 3 Mai 1993. L’addition est salée. Les Hornets s’imposent de 30 points. Ouch, ça pique. Le bateau vert et blanc tangue plus que dangereusement et traverse cette rencontre sans capitaine à la barre. Le meilleur marqueur côté Celtics se nomme Kevin Gamble, et il pointe à seulement 19 unités. De l’autre côté du parquet, Larry Johnson s’éclate et signe un double double (29 points et 11 rebonds). Dell Curry en 6ème homme de luxe finit le boulot en balançant 27 points dans une défense totalement amorphe. Plus qu’une seule victoire, et Charlotte remportera la mise.
L’HISTOIRE S’ECRIT EN BLEU TURQUOISE
Nous voilà donc à ce fameux Game 4 et à son buzzer beater. Un buzzer beater inscrit comme un symbole par le rookie Alonzo Mourning. Les Hornets s’imposent d’un point et se qualifient donc pour une demi-finale de conférence où ils rencontreront les Knicks de New-York. La marche sera trop haute cette fois et il n’y aura pas de second exploit. Mais qu’importe, Charlotte est une franchise qui va compter dans l’avenir. C’est sûr, il ne pourra en être autrement. Les observateurs en sont persuadés. Les fans également. Même Michael Jordan himself y va de son pronostic et envisage un avenir radieux pour les Hornets :
» Si ils ne font pas de conneries, on n’a pas fini d’en parler. Ils ont le matériel nécessaire pour faire régner la terreur dans les prochaines années. »
Mais le basket n’est pas forcément une science exacte. Ce groupe de joueurs ne tardera pas à imploser, l’association de caractères aussi fort ne pouvait que se terminer par des coups de gueules et des déchirements. Entre Mourning la diva, LJ la grande gueule et Kendall Gill l’associable, la vie ne pouvait pas être un long fleuve tranquille pour les Hornets. Malgré des résultats qui resteront décevant les saisons suivantes, Charlotte sera jusqu’à sa disparition une franchise marquante de la décennie des nineties. Son merchandising flashy et bariolé en parfait accord avec les modes de l’époque n’étant pas étranger à cet engouement populaire. Et pour Boston, cette série sera le point de départ d’une longue traversée du désert. Une seule participation aux playoffs jusqu’à la saison 2002 où les Celtics retrouveront leur lustre d’antan en atteignant la finale de conférence. Finalement, d’une série que beaucoup voyaient comme un passage de témoin entre deux franchises au destin sensé s’entre-croiser, il ne restera dans les mémoires que ce panier décisif de Mourning et le dernier match de la carrière du regretté Reggie Lewis. Assez d’arguments pour classer cet affrontement dans la catégorie des duels de légendes.
LES HIGHLIGHTS DU GAME 1, DERNIER MATCH PRO DE REGGIE LEWIS
crédits photos : basketballists.com/hoops-nation/stolen-bikes-fast-rider
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