ITW Isabelle Fijalkowski – Part 1 : « Championne d’Europe en 2001 ? Un aboutissement pour le basket en France »
Interview
Après Edwige Lawson-Wade, Céline Dumerc et Cathy Melain, Basket Rétro est allé à la rencontre d’une autre joueuse emblématique de l’équipe de France : Isabelle Fijalkowski. De passage à Paris le 3 novembre dernier pour diriger un entraînement des minimes du club du Paris Lady Basket, l’ex-pivot française, âgé de 42 ans, a accepté de revenir longuement notamment sur sa carrière de joueuse pro, sur la NBA dans la première partie de cette interview.
Basket Rétro : Comment avez-vous découvert le basket ? Qu’est ce qui vous a donné envie de faire une carrière professionnelle ?
Isabelle Fijalkowski : J’ai découvert le basket en club. J’étais toujours plus grande que les autres. Mes parents n’étaient pas du tout sportifs ni basketteurs. Mais ils m’ont plutôt orienté vers le basket. Moi ça m’a plu. Même si j’étais grande, je n’étais pas forcément avantagé. Quand on est grande, on a d’autres problématiques. Ce n’est pas facile. Le basket m’a plu car c’est un sport collectif. J’étais dans un groupe de copines. Et c’est ce qui m’a vraiment attiré vers cela.
BR : A quel endroit avez-vous commencé à jouer?
IF : J’ai commencé à côté de Clermont-Ferrand, dans la banlieue, à Cébazat. J’ai joué deux ans là-bas. J’ai commencé à 9 ans.
BR : Vous débutiez déjà à cet âge au poste de pivot ?
IF : Il n’y avait pas de poste de jeu. On jouait comme des benjamines. Moi je découvrais complètement : les règles, le côté technique. Pour moi c’était compliqué. J’étais grande et avais des problèmes de coordination. J’avais besoin d’apprendre. Et dans ce petit club, on nous faisait jouer mais techniquement, il n’y avait pas d’apport suffisant. Ca fait qu’au bout de deux ans, j’ai arrêté de jouer. Je n’arrivais pas à jouer. Les gens critiquaient ‘ t’es grande, tu devrais pouvoir mettre un panier ’. J’étais découragé. J’en faisais à l’UNSS au collège. J’ai une copine de collège qui jouait à l’AS Montferrand, club qui était en première division à l’époque et avait un centre de formation. Elle m’a fait venir dans le club pour jouer dans le championnat de France. Et c’est là à 12 ans que j’ai vraiment appris le double pas, à tirer, dribbler et donc vraiment à jouer au basket.
BR : Donc tout ce qui est technique et tactique ?
IF : Oui technique dans un premier temps et tactique après.
BR : Avant de revenir sur votre carrière pro. Abordons la NBA. Quels sont vos premiers souvenirs de la NBA ?
IF : Je me souviens de la Dream Team en 1992 avec Jordan, Magic, Charles Barkley. Les JO cette année-là se passent en Espagne à Barcelone. Cela fait qu’il y a tout un buzz autour de ces équipes. On s’intéressait vraiment encore plus à l’équipe américaine. Y avait ces joueurs emblématiques.
BR : Quels sont les joueurs/équipes (actuels ou passés) que vous aimez en NBA ?
IF : J’ai adoré regarder jouer les Bulls à l’époque où il y avait Jordan, Pippen, et Rodman. C’était l’équipe qui était championne et qu’on pouvait voir un peu plus facilement. J’ai vraiment aimé même si j’étais pas une super fan de la NBA. J’aimais bien regarder certains joueurs. Moi j’aurais aimé voir des filles jouer. Moi ca m’intéressait plus de voir les seniors à l’AS Montferrand, voir le championnat de France de première division par rapport à l’identification. Les garçons, on disait c’est génial, c’est spectacle. Mais il y a la frustration de ne pas voir les mêmes personnes au féminin comme modèle. Dans la NBA actuelle, les Spurs. On a beaucoup adoré leur jeu qui se rapproche de celui européen, de l’Euroligue. En plus avec Tony et Boris, Nando de Colo aussi quand il y était. On a un attachement un peu plus à cette équipe.
BR : Et ceux que vous détestez le moins ? (actuels ou passés)
IF : J’en ai vu des matchs NBA quand j’étais en WNBA. Ce que je n’aime pas en NBA, c’est vraiment un show. Les matchs commencent vraiment qu’au quatrième quart-temps. Ce n’est pas de leur faute. C’est la formule du championnat avec un nombre incroyable de matchs qui sont plus des prétextes à des rencontres entre chefs d’entreprise, fans. Les gens sont dans les tribunes et ne regardent pas le match. C’est ce qui m’a choqué. Ils discutent et se lèvent toutes les 20 minutes pour aller chercher leurs boissons. C’est un brouhaha. Mais c’est des matchs de saison régulière. Et puis ce qui est produit sur le terrain n’est pas forcément passionnant. Le basket, comme nous on l’entend en Europe est différent de la NBA. Le jeu très individualiste, j’en suis pas fan. Le meilleur moment de la NBA, c’est les playoffs c’est vrai. C’est à ce moment-là que je regarde des matchs NBA.
BR : Vous avez dit playoffs, justement y a t-il un match marquant et historique de post-season en NBA qui vous vient à l’esprit, voire la performance d’un joueur, un All Star Game ?
IF : Je reste toujours émerveillé par Jordan et je voyais encore une photo hier de ce joueur. C’est la référence absolue parce qu’il dominait à la fois et il savait jouer en équipe. C’était un basketteur complet. Il dominait physiquement, techniquement, tactiquement. Il faisait gagner son équipe avec un mental incroyable. C’est le joueur qui fait rêver. Même sur des photos, quand on en voit, y a personne qui a réussi encore à l’égaler.
BR : Même question. Avez-vous le souvenir d’un match marquant en Europe, de l’Equipe de France que ce soit chez les filles ou les garçons que vous ayez vue à la télé ou sur place ?
IF : Les matchs, je les voyais à la télé. Etre sur place moins car quand on commence à jouer, on a du mal à aller voir les matchs des autres car on n’a pas le temps. J’ai le souvenir de la finale de Limoges en 1993. C’était extrêmement tendu. On n’osait pas y croire car c’était presque impossible de gagner contre Trevise. C’est l’exploit, la manière de le faire. C’était vraiment super. Vraiment un gros souvenir.
BR : Possédez-vous des produits dérivés NBA, du basket européen : maillots, casquettes, goodies… ?
IF : Non mais j’ai une collection de Trading Card (ndlr : carte sur laquelle on aperçoit le visage d’anciens joueurs de basket avec des informations sur soi et sa carrière) parce qu’on me les a donnés. Ils ont sorti une série sur la première année de la WNBA avec toutes les joueuses. Donc j’ai un classeur. C’est super chouette et cela a fait son petit bonhomme de chemin par rapport aux activités du club des Internationaux. (ndlr : association de celles et ceux qui ont porté le maillot de l’Equipe de France de Basket). Il est ouvert à toutes les Générations. On a aussi crée des séries de Trading Card. Je trouve cette idée car j’en recevais. Les gens les envoyaient, je les signais. On les renvoyait. C’est un produit intéressant.
BR : Quel serait le 5 majeur idéal de toute l’histoire de la NBA pour vous ?
IF : On va dire Jordan, Magic, Julius Erving, Kareem Abdul Jabbar, et Hakeem Olajuwon. Il faut mettre des intérieurs (rires).
BR : Avez-vous le temps de suivre la Pro A ?
IF : Je suis plus la Pro A depuis que j’ai arrêté de jouer. Je ne suis pas non plus à 100% basket. Je sais que des gens suivent vraiment tout ce qui est attrait au basket. Moi j’aime bien avoir un équilibre avec d’autres éléments extérieurs, faire des choses en dehors. C’est sûr que je suivais les résultats des équipes messieurs en France. Là, un petit peu plus car j’ai été amené à entrainer quelques joueurs pro et ça m’a donné envie de les suivre.
BR : Qui avez-vous entraîné ?
IF : J’ai entrainé Johan Passave Ducteil sur un camp pour travailler le tir. C’était il y a deux ans. Antoine Eito, aussi, meneur du Mans. C’était des séances individuelles. Ca fait 3 ans que je fais des camps de développement pour le tir. On propose des camps d’été. Il y a quelques joueurs espoirs, quelques joueurs pros qui viennent. J’ai adoré.
BR : Je voulais donc parler de la Pro A avec vous. On constate que depuis presque 10 ans, différentes équipes sont championnes au fil des saisons. Il y a un manque de régularité. Comment l’expliquez ?
IF : C’est compliqué pour les clubs. Sur le plan financier, pour le staff technique, c’est très compliqué pour les entraîneurs d’avoir des équipes stables. C’est moins le cas chez les filles mais je déplore la formation des joueurs et qu’il y ait peu de français sur les terrains. La dérive fait qu’il y a peu de fidélité dans les clubs. Il y a beaucoup de joueurs étrangers. On ne peut pas construire sur une année. On peut faire des coups. Pour vraiment durer et être performant, faut 2-3-4 ans, pour travailler sur une certaine continuité. Je pense que les clubs n’ont pas les moyens financiers pour pouvoir le faire. Du coup, les entraîneurs font du coup un petit peu du bricolage. Une équipe marche bien car ils ont déniché un joueur étranger qui était pas trop cher. Ils en font une bonne complémentarité. C’est compliqué et les dirigeants veulent des résultats immédiats.
BR : Venons-en à votre carrière. Vous avez gagné beaucoup de compétitions que ce soit en club ou en Equipe de France, reçu plusieurs distinctions personnelles. J’imagine que c’est difficile d’en sortir un mais quel est le souvenir marquant que vous retenez de votre carrière de basketteuse ?
IF : Mon meilleur souvenir, c’est le titre gagné en 2001 avec l’équipe de France au championnat d’Europe au Mans. C’est un aboutissement ce titre de championne d’Europe pour notre discipline en France. C’était le premier : garçon et filles confondues. C’était tellement dur. Cinq ans en arrière, on était dans le Groupe C. On a construit une équipe. Entre temps, on a été au Jeux Olympiques en 2000. On a réalisé des objectifs petit à petit avec une génération. On a été patient pour asseoir les choses, faire développer les joueuses. Il y avait un super amalgame entre les joueuses d’expérience et les jeunes qui arrivent. On a fêté ça en France, réussi à le faire en France. Les filles n’ont pas réussi l’année dernière. C’est encore plus de pression de faire un championnat d’Europe en France. C’est ça qui est difficile et on y est arrivé. C’était exceptionnel.
BR : Lors de ce championnat d’Europe, étiez-vous considéré comme outsiders ?
IF : Non, on n’était pas outsiders. 2 ans avant, on était vice-championne d’Europe. En 3 ans, on est passé du Groupe C à vice-championne d’Europe (1996-1999). On s’est qualifié pour les JO en finissant 5ème. On était attendues malgré tout. Il faut gagner contre des nations et là faut jouer 8 matchs en 10 jours contre les meilleures équipes européennes. Et en finale, il faut battre la Russie.
BR : Vous parlez du Groupe C, ce sont les matchs de poule ?
IF : En fait, le Groupe A c’est celui qui joue le championnat d’Europe. Si vous n’êtes pas qualifiés pour le championnat des qualificatifs, vous n’êtes donc pas qualifié pour le championnat d’Europe. Dans ce cas, vous faites un championnat dont les deux premières vont l’année d’après faire les championnats d’Europe et les autres ne font rien. Nous on a raté une année le championnat d’Europe. On n’était donc pas dans les huit premières. On est donc descendu dans le Groupe B. Quand il a fallu se qualifier, on ne s’est pas qualifié (1996). L’année d’après (1997), on est donc redescendu d’un niveau (Groupe C) où il a fallu se qualifier pour le Groupe B. Et il fallait comme ça remonter les échelons. Je sais plus si c’est ce fonctionnement actuellement. On était au plus bas niveau international.
BR : Vous avez joué en France, en Italie (à Come entre 97-2000), aux Etats-Unis (formation au Colorado 94-95 et 1 saison WNBA à Cleveland en 97-98). Pouvez-vous nous parler de la différence de culture basket entre ces trois pays (les entrainements, le style et niveau de jeu, l’ambiance dans les salles, les supporters) ? Que retenez-vous de ces expériences à l’étranger ?
IF : Aux Etats-Unis, c’est le pays du basket comme en France pour le foot. C’était super de vivre cette expérience. Il y a un engouement, une reconnaissance plus du basket féminin, des femmes, des sportives en général. Il y avait du monde dans les salles. Les matchs sont télévisés. Il y a de la communication, du marketing. On a l’impression de vraiment exister. Les gens dans la rue te disent pas « t’es basketteuse car t’es grande ». Mais c’est plus dire « est-ce que t’es joueuse de basket » (ton étonnant, interrogatif), avec des étoiles « Ah oui mais tu joues où c’est génial. Bonne chance, continues bien ». Les gens demandent des autographes. Ils ont une vision du sportif, très valorisante. Et ça change vraiment par rapport à notre culture qui est moins sportive en France. Le jeu est différent, en université et en WNBA. La WNBA s’apparente un peu plus au jeu NBA avec des têtes d’affiche. Par franchise, il y a deux joueuses stars. Le jeu passe par elles. Faut faire le show, il faut des highlights qui passeront sur le journal du lendemain. C’est quand même centré sur les individus. Malgré tout, les équipes qui gagnent, sont celles qui sont stables au niveau des effectifs, sur plusieurs années et qui développent un jeu collectif. Il y a peu de temps de préparation. Elles ont de très bonnes joueuses individuelles. Ce qui est intéressant est ce challenge, de faire sa place parmi les meilleures joueuses américaines et pas du monde. Dans le monde, y a d’autres joueuses fortes qui ne sont pas américaines et qui font partie de ce championnat. C’était enrichissant culturellement. C’est un autre basket car il faut démontrer, quand tu as la balle, que tu es capable de jouer. Tu es ciblé car t’es étrangère et on te fait pas de cadeau. Faut vraiment que tu montres et démontres que tu peux apporter.
BR : Et en Italie ?
IF : J’ai lu une interview d’Elodie Godin, qui disait que c’était moins physique qu’en France. A l’époque, quand je jouais, c’était un jeu qui était assez physique, basique où c’était du combat, tactiquement pas très développé. Et dans l’engagement défensif, offensif c’était très fort. Il y avait beaucoup de joueuses étrangères dont des Américaines d’un niveau très élevé. A cette époque, les clubs avaient les moyens de faire venir 2-3 étrangères de niveau internationales.
« Aux Etats-Unis, c’est le pays du basket comme en France pour le foot. C’était super de vivre cette expérience. Il y a plus un engouement, une reconnaissance du basket féminin, des femmes, des sportives en général. Il y avait du monde dans les salles. Les matchs sont télévisés. Il y a de la communication, du marketing. On a l’impression de vraiment exister. Les gens dans la rue te disent pas ‘t’es basketteuse car t’es grande’. Mais c’est plus dire ‘est-ce que t’es joueuse de basket avec des étoiles. Ah oui mais tu joues où c’est génial. Bonne chance, continues bien’. Les gens demandent des autographes. Ils ont une vision du sportif, très valorisante. Et ça change vraiment par rapport à notre culture qui est moins sportive en France ».
BR : Comment s’est présentée l’offre de la fac du Colorado ? Quels souvenirs gardez-vous ? Qui vous repère ?
IF : J’étais intéressée pour y aller, pour découvrir, avoir l’expérience. Avant moi, il y avait Paoline Ekambi qui a joué aux Etats-Unis comme Yannick Souvré. Quand on se voyait en équipe de France, on en parlait. C’était l’envie de vivre une expérience dans une université américaine. J’avais 22 ans, je trouvais plus en France un projet où j’avais un certain niveau. Et j’avais l’impression que je pouvais me développer encore. Mais pas vraiment d’offre de projets qui pouvaient me faire avancer individuellement. Par le réseau, par Paoline, des joueuses américaines qui ont joué en France avant moi et qui étaient coachs après et qui sont revenues, j’ai envoyé mes cassettes. Après, une coach du Colorado est venu me voir jouer, à Clermont. J’étais au Stade Clermontois. Ils étaient intéressés et je partais que pour un an pour apprendre et avoir une expérience.
IF : Quel souvenir gardez-vous de votre passage dans cette fac américaine ?
BR : Super souvenir. On était dans une super fac à côté de Denver dans les montagnes. C’était très dur car on ne forme pas que des basketteurs, mais aussi vraiment des guerrières, des filles avec des mentals forts. La concurrence est tellement importante que c’est les plus fortes mentalement qui tiennent. Les séances d’entraînements sont très longues. La présaison est très longue, très physique. Au début de saison, y a 3 entraînements de muscu en plus à 6h du matin. Ce sont des choses que j’ai pas connues en France. Je savais que j’étais là-bas pour bosser. Et on franchit des paliers dans sa tête mine de rien. On s’aguerrit. On découvre. On est seul. Il faut se débrouiller. On est comme une étudiante, on ne connait pas les règles, les coutumes du pays. On doit apprendre une langue. C’était génial ça aussi. En termes de résultat, on était championne de Conférence : Big 8. Au tournoi NCAA, on a perdu en quart de finale. C’était super.
Souvenir de son passage à la fac du Colorado : « La concurrence est tellement importante que c’est les plus fortes mentalement qui tiennent. Les séances d’entraînements sont très longues. La présaison est très longue, très physique. Au début de saison, y a 3 entraînements de muscu en plus à 6h du matin. Ce sont des choses que j’ai pas connues en France. Je savais que j’étais là-bas pour bosser. Et on franchit des paliers dans sa tête mine de rien. On s’aguerrit. On découvre. On est seul. Il faut se débrouiller. On est comme une étudiante, on ne connait pas les règles, les coutumes du pays. On doit apprendre une langue. C’était génial ça aussi ».
BR : Ensuite, comment s’est présentée l’offre des Cleveland Rockers ?
IF : L’offre de Cleveland est consécutive au Colorado. Je me suis fait un peu connaître pendant mon année universitaire. Du coup, la WNBA m’a contacté. J’étais drafté. Ce n’était pas sans difficultés. Ca voulait dire qu’après l’équipe de France et le championnat d’Europe, après la saison régulière en Europe, je me rendais aux Etats-Unis pour faire la saison l’été. Enchaîner c’est pas facile, mais j’ai pu organiser des temps de repos avant et après.
BR : Quels souvenirs gardez-vous de votre passage en WNBA dans la franchise de Cleveland ?
IF : Super positif. Super bien. C’est une autre dimension. On va jouer dans les salles mythiques, que je voyais à la télé, quand je regardais la NBA : Madison Square Garden. On n’a pas fait toutes les salles car il doit avoir juste 16 équipes en WNBA. On est allé à Los Angeles jouer au Forum d’Inglewood. Le Staples Center n’existait pas encore. C’était vivre un petit peu un rêve. Au niveau basket, j’ai fait ma place, réussi à être performante. Mais le jeu là-bas est individualiste. Moi je m’éclatais plus dans des formes de jeu en Europe, en France. C’est une vision du basket un peu différente. J’étais championne de conférence une année avec Cleveland. J’étais avec Eva Němcová, l’autre étrangère de l’équipe. On s’entendait bien.
BR : C’était compliqué j’imagine de basculer du jeu européen, français à celui américain.
IF : Oui il y a un petit temps d’adaptation. Les ballons étaient plus petits. A l’époque, on jouait en taille 7. Ca reste du basket. C’est plus basique. Je pense que c’est plus facile de passer du basket américain ou même universitaire à du basket européen. Faut aimer le défi, se sortir les tripes, aimer faire sa place. On ne vous la donne pas. Faut avoir un peu ce tempérament de compétiteur. Il y a zéro cadeau.
BR : Pour ceux et celles qui vous ne connaîtrez pas, quelle type de joueuse étiez-vous sur le terrain ? Comment décrire votre jeu ?
IF : Moi j’étais un poste 5 qui adorait jouer au contact et qui malgré tout avait des qualités pour une grande. Des 1m95, il y en a pas tant que ça maintenant. J’avais développé des qualités de vitesse, vitesse au pied, réactivité en rapport bien sur avec ma taille, toute proportion gardée. Je traversais le terrain très rapidement. J’avais des qualités de course, d’appuis proches d’une ailière. Je jouais dos au panier, face au panier poste haut. J’avais un tir extérieur assez fiable, ce qui me permettait de jouer les un-contre-un aussi. Moins souvent mais j’adorais tirer à 3 points. Je ne lâchais rien en défense. J’aidais beaucoup mes partenaires dans les rotations (rires). J’étais dure et pouvais m’exprimer aussi en dehors du fait d’être sous le cercle.
BR : Quels sont les qualités et les défauts qu’ont dits vos coéquipières, vos coachs en général durant votre carrière ?
IF : Les défauts, j’avais un jeu très rugueux. Je faisais beaucoup de fautes. Il fallait gérer mes fautes. J’étais rapidement dans la frustration. Quand on est grande, au niveau des arbitres, c’est vrai qu’on nous voit plus. Les impacts qui sont en bas, forcément on nous dit « vous avez baissez les bras ». Mais ouai la fille m’est rentrée dedans. Donc je ne pouvais pas faire autrement. Et une grande peut pas contrer une petite. Il y avait tout un tas de truc comme ça. Mais des fois, j’avais du mal à me contrôler. Sur les qualités, j’avais envie que l’équipe puisse compter sur moi dans les moments difficiles.Voilà c’est l’objectif que j’essayais d’atteindre. Ce n’était pas facile tout au long de ma carrière. Sur ma dernière année, que ce soit sur le titre de championne d’Europe avec l’équipe de France, quand j’ai fini à Valenciennes où on a gagné l’Euroligue, championne de France une année, on a gagné tous les titres. J’avais 30 ans. J’étais plus toute jeune. Quand j’étais sur le terrain, je me faisais un point d’honneur dans les moments difficiles de sortir l’équipe, d’apporter les choses pour qu’on gagne le match, débloquer les situations et pas prendre la pression. Je voulais que les filles se disent « on peut compter sur Isabelle ».
Retrouvez dés vendredi la deuxième partie de l’interview. Isabelle Fijalkowski a continué à nous parler de sa carrière, de son envie d’entraîner et sur ses autres projets dans le basket. En attendant voici un reportage consacré à la joueuse qui a été sélectionné à 204 reprises en équipe de France.
LE PORTRAIT D’ISABELLE FIJALKOWSKI
Montage Une : Gary Storck pour Basket Retro
Propos recueillis par Richard Sengmany
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