Dominique Wilkins, l’histoire d’un virtuose solitaire
Portrait
Athlétique, racé, félin ou encore explosif. Les adjectifs pour définir le style de Dominique Wilkins (63 ans aujourd’hui) sont nombreux. Joueur offensif par excellence, Do’ Wilkins avait dans son jeu pas mal d’atouts pour marquer l’histoire du basket.
Wilkins y parviendra, trustant les prix et les distinctions individuelles. Malheureusement, sa fidélité et son attachement aux Hawks d’Atlanta ne lui permettront pas d’accrocher de titres collectifs à son palmarès NBA. Il lui faudra attendre la Dream Team 2 en 1994 et son passage en Europe pour enfin remporter des trophées en équipe. Basket Rétro revient aujourd’hui sur l’histoire du Human Highlight Film. Action !
Fils d’un membre de l’US Air Force, Jacques Dominique Wilkins voit le jour en France, à Paris plus précisément, le 12 Janvier 1960. Après une enfance ou le gamin voit du pays en raison des déplacements professionnels de son paternel, c’est à 15 ans qu’il se pose enfin après avoir déménagé plus de 9 fois. A la fin des années 70 il évolue sous les couleurs de la Washington High School en Caroline du Nord. En plus de pratiquer le basket, Do’ grâce à ces qualités physiques s’intéressent également à l’athlétisme. Il opte finalement pour la balle orange et intégre à l’âge de 20 ans l’université de Géorgie. Sous le maillot des Bulldogs, Dominique fait déjà parler la poudre. En trois saisons et 78 matchs il facture une moyenne de 21,6 points par match. Il s’illustre aussi au rebond en captant une moyenne de 7,5 ballons. Des stats qui lui valent en 1982 les honneurs d’une sélection dans la troisième équipe NCAA All-American.
La NBA lui tend les bras. Il est sélectionné en 3ème position de la draft 1982 par les Utah Jazz. Immédiatement Dominique Wilkins fait part de son refus de jouer dans l’Utah et se fait transférer chez les Hawks d’Atlanta qui au passage réalise une des plus belles affaires de l’histoire en échangeant Do’ contre les obscurs John Drew et Freeman Williams. Après une saison rookie ou il vaut déjà 17,5 points par match, Dominique Wilkins passe la seconde. Dés sa deuxième saison chez les pros, » Nique » (un autre de ces surnoms) franchit la barre des 20 unités. Il s’offrira le luxe durant dix saisons d’affilée de ne jamais passer en dessous de ce seuil symbolique. Costaud l’animal. Il faut dire que chez les Hawks, Dominique est en représentation permanente. L’effectif est faible, et le jeu offensif ne repose que sur ses épaules. Les Hawks ne dépassent que rarement le premier tour des playoffs (quand ils parviennent à se qualifier). Le premier coup d’éclat de Do’ en post season intervient en 1986. Il balance 50 points dans le buffet des Pistons. En 1988, lors d’une demi-finale épique, perdue 4-3 contre les Celtics de Larry Bird, les deux hommes offrent un duel mémorable aux fans. Le match se résume à l’affrontement entre les deux scoreurs. Wilkins termine avec 47 points mais les Hawks s’inclinent de deux petits points lors du game 7. Ils laissent ainsi passer leur chance, ils n’iront jamais au-delà des demi-finales de conférence, et ce malgré de nombreuses saisons régulières au dessus des 50 victoires. Ni Mike Fratello, ni Lenny Wilkens ne parviendront à inculquer le fighting-spirit nécessaire à la franchise pour se faire violence et briller en playoffs. De son côté, Dominique Wilkins se plait en Géorgie, malgré l’incapacité chronique de son équipe à répondre présente lorsque le ton se durcit en playoffs.
Une véritable histoire d’amour. Il faut dire qu’en dépit de résultats collectifs peu reluisants, Wilkins lui est devenu une des plus grandes stars de la NBA. All-star régulier, meilleur marqueur en 1986, présent dans les All-NBA Team de fin de saison, » Nique » a fait son trou dans la grande ligue et à Atlanta on lui a donné les clefs du camion depuis longtemps. Mais malgré un excellent chauffeur, le camion des Hawks n’avance pas très vite. En 1993 la presse de Chicago revenait d’ailleurs sur le contraste entre le niveau de Wilkins et celui du reste de l’effectif d’Atlanta à la suite de l’élimination des Hawks par les Bulls :
A la suite de cette série, Jordan, dans un style un peu plus classe et plus solennel que les journalistes de l’Illinois, déclarera au sujet de Dominique Wilkins :
» C’est un immense joueur. »
Classe. Surtout à l’égard de l’un de ses plus grands rivals de l’époque. Les deux hommes se retrouvant souvent dans les finales du Slam-dunk Contest pour des joutes aériennes devenues désormais mythique. Le seul bémol pour Dominique à cette époque est sa grave blessure survenue en Janvier 1992. Fraîchement sélectionné pour son 7ème All-Star Game, Wilkins se pète le tendon d’achille lors d’un match contre les Sixers. La saison avait pourtant bien commencée pour » Nique « . Il s’offre ainsi un record en Décembre contre les Bulls en réussissant 23 lancers sans en rater un seul. Il plante également 52 unités à la solide défense des Knicks. Avant de s’écrouler sur le parquet de l’Omni (la salle des Hawks) et de mettre un terme à sa saison, Wilkins tournait à 28 points de moyenne. Rageant. D’autant plus que cette blessure l’empêchera de pouvoir prétendre à une sélection au sein de la Dream Team légendaire de Barcelone.
« Je suis né basketteur chez les Hawks. Je resterai ici tant qu’ils voudront de moi »
Qu’importe, son retour à la compétition neuf mois plus tard est également historique. Il franchit la barre des 20 000 points en carrière contre les Knicks lors du premier match de l’exercice 92/93. Au cours de la saison il efface des tablettes Bob Petitt en jouant son 794ème match sous le jersey des Hawks. Il continue d’écrire l’histoire en devenant le meilleur marqueur de l’histoire de la franchise d’Atlanta. L’idylle entre la Géorgie et Do’ Wilkins semble éternelle. Pourtant, en février 1994, c’est le coup de tonnerre. Alors que les Hawks font la course en tête de l’Atlantic Division, au coude à coude avec les Bulls (au 14 février les deux équipes proposent le même bilan avec 34 victoires pour 13 défaites), le front-office décide de se séparer de son meilleur marqueur qui affiche alors une moyenne de 24,5 points par match. De façon presque prémonitoire, Wilkins déclarait quelques semaines auparavant au sujet du bon début de saison de son équipe :
Et bien il semblerait que le temps soit venu. A la surprise générale d’ailleurs. Dominique Wilkins ne méritait pas ça. Il atterit à L.A, chez les Clippers, le cancre de la ligue à cette époque. Dans l’affaire les Hawks récupère Danny Manning, un ailier élégant au style de jeu beaucoup moins explosif que Do’ et au physique en mousse. Même si le discours du coach des Hawks, Lenny Wilkens, laissait planer quelques zones d’ombres quant à la collaboration des deux hommes, personne n’envisageait l’éventualité d’un trade du franchise-player historique en début de saison :
» Je lui ai demandé d’être plus concentré sur le collectif que dans la passé. Dominique avait tendance à prendre trop de shoots. Je voulais qu’il se transforme en chef d’orchestre et qu’il oublie un peu sa partition de soliste. «
Wilkins n’est-il parvenu suffisamment à faire évoluer son style de jeu aux yeux de son coach ? La question mérite d’être posée. Quoiqu’il en soit le deal est acté, Manning tout nouveau All-Star débarque en Géorgie. Alors qu’il tourne à 23,7 points de moyenne avec les Clippers en début de saison, son arrivée chez les Hawks prend rapidement une tournure pathétique. En 26 matchs il n’inscrit plus que 15,7 points en moyenne. Ridicule. En plus, Manning est free-agent à la fin de l’exercice et il met les voiles chez les Suns de Phoenix sans demander son reste. Erreur de casting phénoménale. Pendant ce temps Dominique Wilkins capte 7 rebonds par match et balance une moyenne de 29 points par match dans les défenses adverses. A l’instar de Manning, Do’ Wilkins ne traînera pas longtemps en Californie. Avant toute chose, Dominique Wilkins s’envole pour Toronto et les championnats du Monde. Avec la Dream team 2 il devient champion du monde. Son premier titre collectif. Sa présence est amplement méritée, surtout après son rocambolesque trade. Don Nelson, coach de la sélection US rend hommage à son ailier :
» Il mérite les louanges et l’affection de tout les fans de basket. Les championnats du monde arrivent à point pour couronner l’ensemble de son œuvre. «
Au Canada, Wilkins répond présent malgré un début de tournoi hésitant (2 points lors du premier match). Il réalise une pointe à 22 unités contre Porto Rico et score 20 points en 22 minutes en finale contre la Russie. Il boucle le tournoi avec une moyenne de 12,6 points.
A l’aube de la saison 94/95, deux légendes vont s’associer. Dominique Wilkins rejoint les Celtics de Boston. Alors qu’il est agé de 35 ans, Do’ prend part à 77 rencontres. Il s’offr même le luxe d’être le meilleur marqueur de la franchise cette année là, mais il passe sous la barre des 20 points pour la première fois depuis sa rookie-season. 17,8 points, pas si mal pour un vétéran. Mais dans une équipe en reconstruction et en manque de leaders Wilkins sent que sa place est ailleurs. Il prend la direction de l’Europe. Il amène son expérience et son talent au Panathinaikos d’Athènes. Il en profite pour étoffer son palmarès. Une coupe nationale, et surtout la coupe d’Europe viennent s’ajouter à son CV. » The Human Highlight Film » apporte sa pierre à l’édifice en scorant 35 pions en demi-finales contre le CSKA Moscou et 16 en finale contre le Barça. L’histoire est belle, d’autant plus que le final four se déroule à Paris, sa ville de naissance. Auréolé du titre de MVP du tournoi, Wilkins repasse par la case NBA, chez les Spurs de San Antonio. L’effectif texan est plombé par les blessures, et Do’ Wilkins saisit sa chance. A 37 ans il termine la saison avec 63 matchs au compteur et plus de 18 points de moyenne. Visiblement, Dominique se plait en Europe puisqu’il file à Bologne pour une saison. Il ne rencontrera pas la même réussite qu’avec le Pana’, mais il démontre qu’il n’est pas encore fini en disputant 34 matchs de championnat pour une moyenne de 17,8 points. A presque 40 piges, la carrière de Do’ Wilkins arrive forcément vers la fin. Il signe tout de même un dernier contrat en NBA avec Orlando. Mais en Floride la magie n’opère plus pour » The Human Highlight Film « . Une 20aine de matchs plus tard, il est remercié, en même temps que son frangin Gerald qui évoluait lui aussi sous le jersey du Magic.
Une page se tourne pour Dominique Wilkins qui met alors un terme à sa carrière. Que retenir de Nique’ avec le recul ? D’abord, on se souvient de lui pour ses dunks et ses duels avec Michael Jordan. Normal, qui n’a pas usé jusqu’à la corde les bandes des K7 vidéo du slam dunk contest de 1985 ? Mais Dominique Wilkins n’était pas qu’une machine à dunks. C’était aussi un esthète. Un marqueur hors-pair, certes parfois au détriment du collectif. Mais comment lui en vouloir devant la faiblesse chronique de l’effectif des Hawks, avec tout le respect que l’on a pour Kevin Willis ou Mookie Blaylock. Rares sont les joueurs à avoir facturé un minimum de 25 points de moyenne durant dix saisons d’affilée. C’est simple d’ailleurs, dans la liste on ne retrouve que des types emblématiques, des cracks, des joueurs parmi les meilleurs ; Jerry West, Jordan, ou encore Allen Iverson font parti du club. Grâce à ces 26 668 points en carrière, Wilkins pointe actuellement à la 12ème position du classement des meilleurs marqueurs en carrière. Son smash favori, le » Windmill « , cocktail détonnant de vitesse, d’explosivité et de poésie n’a pas fini de faire lever les foules, et ce même 30 ans après. Une preuve de plus que Dominique Jacques Wilkins appartient bien à la famille des légendes de la balle orange. La NBA l’a bien compris, faisant de lui un magnifique hall of famer en 2006. Sa Géorgie chérie ne l’a pas oubliée non plus, les Hawks retireront fort logiquement son maillot le 13 janvier 2001. Il est aujourd’hui en charge des affaires basket de la franchise. Dominique Wilkins n’a peut-être pas ramené le titre à Atlanta, mais il a gagné le respect de tous les fans de Basket du monde entier. Un juste retour des choses pour ce soliste hors-pair qui aurait mérité au moins une fois de jouer son entraînante partition avec un véritable orchestre autour de lui. Qu’est ce qu’on aurait aimé voir ça !
SES STATS NBA
- Points : 26 668 soit 24,8 par match
- Rebonds : 7 169 soit 6,7 par match
- 1 074 matchs de saison régulière disputés pour 995 titularisations
- 56 matchs de playoffs pour une moyenne de 25,4 points par match
SON PALMARÈS
- All-Rookie First Team en 1983
- Meilleur marqueur NBA en 1986 (30,3 points de moyenne)
- 9 fois All-Star (de 1986 à 1984)
- All NBA First Team 1986
- All NBA Second Team (87, 88, 91, 93)
- All NBA Third Team (89 et 94)
- Vainqueur du Slam Dunk Contest 1985 et 1990
- Recordman du nombres de tirs tentés en 1985 et 1986
- Champion du Monde 1994
- MVP et vainqueur de l’Euroleague en 1996
- Vainqueur de la coupe de Grèce 1996
- Hall of Famer en 2006
- Maillot n°21 retiré par les Hawks d’Atlanta
MIX DE LA CARRIERE DE WILKINS
DO’ WILKINS VS LARRY BIRD EN 1988
Crédits photos : Pernchumchom/Pumpmylife/NBAE/Wikia/Boston.com
Votre commentaire