[Portrait] Gerald Wilkins, au nom du frère.
Portrait
S’il est tout naturel de citer Dominique lorsque l’on évoque la famille Wilkins, occulter son petit frère Gerald de la discussion serait une grossière erreur. Auteur d’une carrière discrète dans l’ombre envahissante de son showman de frangin, le cadet aura su se forger un prénom. Basket Rétro remise au placard les querelles de famille et vous propose de revenir sur le cas Gerald Wilkins.
Né le 11 Septembre 1963 à Atlanta, Gerald Bernard Wilkins est donc le petit frère de Dominique. Il est aussi au passage le papa de Damien Wilkins, qui évoluera en NBA de manière assez anecdotique durant 10 saisons. Une vraie famille de basketteur donc. Mais revenons à celui qui nous intéresse, en l’occurrence Gerald. Cet arrière/ailier de 1,98 m effectue la majeure partie de son cursus universitaire dans le Tennessee à Chattanooga entre 1982 et 1985. Un cursus qu’il conclut à l’âge de 21 ans avec un total de 85 matchs au compteur et une moyenne de 17 points et 4,1 rebonds par match. Trois ans après son aîné, Gerald est ainsi sélectionné par les New-York Knicks au second tour de la draft. En 47ème position pour être exact.
UN SECOND TOUR EN PREMIÈRE LIGNE
Si les Knicks pensaient tout d’abord miser sur Patrick Ewing pour redorer leur blason (le pivot fût lui aussi sélectionné lors de la draft 85 par la franchise New-Yorkaise), c’est finalement l’arrière qui tire son épingle du jeu. Ewing est blessé lors de sa saison rookie, et Wilkins a le champ libre pour prouver à ses dirigeants qu’ils peuvent compter sur lui. Il démarre 53 matchs dans la peau d’un titulaire, et participe à 81 rencontres. Il inscrit une moyenne de 12,5 points par match en passant 25 minutes sur le parquet. Pas mal pour un second tour. Peut-être par mimétisme familial, ou plus probablement juste pour le fun, Wilkins participe dès sa première saison dans la ligue au Slam Dunk Contest lors du All-Star Game. Le tenant du titre de l’édition 1985 n’est autre que son frère Dominique. Il terminera à la quatrième place du concours, échouant en demi-finale. Son dunk au dessus d’une chaise ne suffira pas à convaincre le public.
La saison suivante il retentera sa chance, mais terminera cette fois à la dernière place. Lors de sa seconde saison Gerald Wilkins confirme toutes les qualités entrevues lors de sa rookie-season. Son staff lui fait confiance. Il débute 73 matchs et frôle de peu la barre symbolique des 20 points par match. Il termine avec une moyenne efficace de 19,1 unités inscrites par partie. Il faut noter que New-York est une franchise en reconstruction, et que les blessures cette saison là de Bernard King et de Patrick Ewing laissent le champ libre à Wilkins pour s’exprimer offensivement. Le chantier se poursuit du côté de Big Apple. Les pépins physiques épargnent enfin Pat’ Ewing, et les arrivées conjuguées du rookie Mark Jackson et du coach Rick Pitino terminent le tableau. Les Knicks accrochent les playoffs, et Gerald Wilkins goûte pour la première fois aux joies de la post-season. Pour fêter ça, Wilkins rend une copie extrêmement solide. Malgré l’élimination 3-1 contre les Celtics, Gerald Wilkins vaut 20 points et presque 5 assists en moyenne par match sur cette série. Pour un baptême du feu, ce fût plutôt réussi.
L’embellie va se poursuivre à New-York. Gerald Wilkins est un acteur important de la montée en puissance des Knicks, tant au niveau du scoring que du temps passé sur le parquet. Statistiquement Gerald réalise une grosse série en 1991. Il enchaîne les perfs fin Février et début Mars, et il décroche le titre de « player of the week » le 3 mars. Il passe notamment 26, 22 et 23 points contre les Bullets, les Spurs puis les Nets. Il accompagne tout ça de 7 rebonds contre Washington ou 7 assists contre San Antonio. Solide et efficace. Cependant New-York peine à franchir le dernier palier. Les joueurs New-Yorkais ne passeront jamais le stade des demi-finales de Conf’ (sortis tour à tour par les Bulls puis par les Pistons). C’est à la suite de ces échecs répétés que le front office décide de placer Pat Riley (qui reste sur 4 titres de champions NBA en tant qu’entraîneur des Lakers) à la tête de l’équipe pour démarrer la campagne 91/92.
Lors de la première saison de Riley sur le banc, Gerald Wilkins bénéficie de toute la confiance de son coach. Il est le starter au poste de shooting-guard lors des 82 matchs de saison régulière. Mais un certain John Starks commence à sérieusement mettre le nez à la fenêtre. Le protégé de Riley bénéficie quasiment du même temps de jeu que Wilkins, et il est même plus prolifique offensivement en passant moins de temps sur le parquet que Gerald. Lors de la campagne de playoffs de cette saison 91/92, Gerald Wilkins voit sa moyenne de points inscrits passée sous la barre des 10 unités pour la première fois depuis son arrivée en NBA.
Il faut dire que Wilkins se coltine deux clients avec tout d’abord Joe Dumars au premier tour, puis Jordan en demi-finale. Il est également intéressant de noter que les deux séries seront plutôt défensifs. Sur les 12 rencontres disputées par les Knicks, les new-yorkais n’atteindront la barre des 100 point qu’à deux reprises. L’émergence de John Starks convainc le front-office de ne pas prolonger Gerald Wilkins. Sa campagne sous le jersey des Knicks s’achève donc après 7 saisons et 593 matchs disputés, playoffs inclus. Avec 14,9 points, 3,2 rebonds et 3,5 assists de moyenne en saison régulière, le terme bons et loyaux services peut largement s’appliquer à la carrière de Gerald Wilkins dans la grosse pomme.
LA NOUVELLE ARME DE LA CAVALERIE
C’est en tant que free-agent que Gerald Wilkins atterit chez les CAVS de Cleveland. Dans l’Ohio, Wilkins rejoint une franchise qui reste sur une finale de conférence perdue contre les Bulls de Chicago. L’effectif est riche, composé de Mark Price, Larry Nance ou encore Brad Daugherty. Les Cavaliers ne manquent pas d’atouts, et en enrôlant Wilkins, le front office espère être en mesure de faire tomber les Bulls. Il faut dire que Wilkins n’est pas qu’un scoreur régulier, il est aussi un très bon défenseur. Et il a déjà donné beaucoup de fil à retordre à Michael Jordan lors de leurs précédents affrontements. Wilkins, la pièce manquante du puzzle des CAVS ? Les fans y croient, et l’intéressé aussi. La preuve, dans un excès de confiance, Gerald s’auto-proclame » The Jordan stopper » et déclare tout simplement :
« Je suis le seul type de la league à savoir prendre Jordan en un-contre-un »
Il n’en fallait pas plus pour ouvrir l’appétit de sa majesté. Résultat des courses, lorsque les Cavaliers croisent la route des Bulls en demi-finale de conférence, c’est Jordan qui ouvre les hostilités et qui balance 41 unités sur la truffe de Wilkins. A 6:37 de la fin de la rencontre, Jordan assène un mythique » He can’t guard me « , rappelant à son défenseur qu’il vaut mieux tourner sa langue 7 fois dans sa bouche avant de vouloir clasher le meilleur joueur de la planète. Interrogé après la rencontre sur la prestation de son garde du corps, c’est tout sourire que Jordan mettra un terme à cette histoire en déclarant :
« The Jordan stopper had a tough time tonight »
Les CAVS se font balayés 4-0 par Chicago avec un Jordan à 31 points de moyenne sur la série. Offensivement, Wilkins s’en tire avec les honneurs en affichant une moyenne de 15,3 points inscrits par match en jouant 33 minutes. Insuffisant cependant pour inquièter le futur champion. La saison suivante les deux équipes se retrouvent face à face au premier tour des playoffs. Jordan n’est plus là et Wilkins sort d’une saison régulière en tant que titulaire indiscutable. Starter lors des 82 rencontres, il passe quasiment 34 minutes sur le parquet lors de chaque rencontre (son plus gros total en carrière) et score en moyenne 14,3 points. Malgré une série taille patron de Wilkins, les Cavaliers se font une nouvelle fois sortir par Chicago sans ramasser une seule victoire. Gerald facture 20,3 points de moyenne en jouant 42 minutes. Mais les blessures de Larry Nance et de Brad Daugherty sont insurmontables pour la franchise de l’Ohio. La saison 94/95 sera sa dernière sous le jersey des Cavaliers. Une saison qui n’en sera pas vraiment une puisqu’il ne disputera aucune rencontre à cause d’une blessure.
FIN DE CARRIÈRE ET RETROUVAILLES
Lorsqu’en 1995 la ligue décide d’intégrer deux nouvelles équipes à son roster, les Grizzlies et les Raptors ont carte blanche (ou presque, les équipes pouvant bien entendu verrouiller la destinée de leurs joueurs majeurs) pour piocher dans les effectifs des autres franchises. C’est ce qu’on appelle l’expansion draft. Wilkins est retenu par les Vancouver Grizzlies. Un véritable traquenard pour l’arrière. Les Grizzlies sont une véritable voie de garage. Wilkins ne retrouve pas l’étendue de ses capacités physiques et il ne prend part qu’à 28 rencontres dont 14 en tant que titulaire. Une parenthèse pourrie dans une carrière qui bat de l’aile du jour au lendemain. Wilkins ne s’attarde pas à Vancouver. Coupé par les Grizzlies, il signe en tant que free agent au Magic d’Orlando où il rejoint des joueurs comme Penny Hardaway ou Horace Grant.
Sa première saison en Floride est plutôt correcte. Il sort du banc en étant utilisé 27 minutes par match. Il prend part à 80 rencontres, et il repasse au dessus des 10 points par match après sa saison catastrophique au Canada. Gerald Wilkins goûtera pour la dernière fois de sa carrière aux joutes du printemps. Orlando affronte Miami au premier tour des playoffs. Le Magic se fait sortir, et Wilkins participe aux 5 rencontres de la série en inscrivant une moyenne de 9,4 points. Les deux dernières saisons de Wilkins à Orlando seront beaucoup plus anecdotiques. Elles seront d’ailleurs les deux dernières saisons professionnelles de Gerald. Il est amusant de noter que les frères Wilkins seront réunis sous le jersey d’Orlando au cours de la saison 98, Dominique rejoignant Gerald après une pige du côté de Bologne.
Terminer sa carrière sous le même jersey que son grand frère, voilà une façon originale de boucler la boucle pour le cadet des frangins Wilkins. Le clin d’œil de l’histoire est plutôt sympathique. Certes Gerald Bernard Wilkins n’est pas le plus flashy de la famille. Ce n’est pas de lui que l’on se souvient en premier lorsque l’on évoque les Wilkins. Mais Gerald reste malgré tout un représentant honorable des joueurs NBA des années 80/90. Ces joueurs qu’on voyait ça et là au détour d’un clip sur une VHS usée et dont on ne savait rien car pas assez marquant ou médiatique pour les magazines de l’époque. Et pourtant, c’est aussi grâce à ces joueurs de l’ombre qu’aujourd’hui nous sommes des fans de basketball et de la NBA. Alors rien que pour ces raisons, Gerald Wilkins méritait bien que Basket Retro revienne en détails sur son honorable et respectable carrière.
SES STATS NBA
- Points: 11 736 soit 13 par match
- Rebonds: 2 646 soit 2,9 par match
- Assists : 2 697 soit 3 par match
- Matchs: 900 matchs disputés dont 653 en tant que titulaire
- 55 matchs de playoffs dont 41 en tant que titulaire
- Élu joueur de la semaine le 3 Mars 1991
UN MIX DE GERALD WILKINS
Crédits photos : nba.com/gettyimages
Montage une : Laurent Rullier pour Basket Rétro
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