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[ITW] – Odile Santaniello – Partie 1 : « Je suis fière d’avoir commencé à Auboué ! »

Interview

Montage Une : Laurent Rullier pour Basket Rétro

Cela fait 20 ans qu’elle a mis ses baskets au placard mais sa passion pour le jeu reste intacte. Venue au Basket dans le mythique club Lorrain d’Auboué, Odile Santaniello a accepté de revenir pour Basket Retro sur son immense carrière. Entre Auboué, le CREPS de Nancy, le Mosa Jambes, Aix ou ses débuts avec les bleues : pleins feux sur un parcours et une personnalité uniques. Interview !

Basket Retro : Paoline Ekambi mentionne que lorsque vous entrez sur un parquet, vous ne pensez qu’à une chose : gagner. Vous confirmez ?

Odile Santaniello : Je confirme ce que dit Paoline et je dis toujours qu’il faut se faire plaisir en gagnant. On ne peut pas toujours être là et faire style « l’important c’est de participer ». Non, non ! C’est Pierre de Coubertin qui a d’ailleurs repris cette expression à l’évêque de Pennsylvanie, dans le cadre des JO de Londres. Mais moi je ne suis pas du tout comme cela, donc oui je confirme.

BR : Parlons alors de ce match totalement incroyable. Nous sommes à Mirande, en demi finale du Championnat de France 1989. Il ne reste quelques secondes à jouer et vous êtes sur le point de vous qualifier pour la finale mais sur une remise en jeu, Loetitia Moussard envoie Nathalie Fortun marquer contre son camp. Résultat : prolongation, défaite et donc élimination. A ce moment là, vous pensez à quoi ?

OS : Je me souviens surtout du temps mort. Sandrine Chiotti venait de marquer et on lui disait mais pourquoi tu as marqué ? Et pendant ce temps mort, Guylaine Renaud nous répétait :  » il ne faut plus marquer ». Bref…tout le monde s’énervait. Moi la première… Je me suis dit ensuite mais quelle nullité ce règlement, parce que c’est pas possible qu’un truc comme cela puisse exister dans des règles. La suite, elle est connue. Cela a été compliqué après de venir à Mirande. Il y a eu beaucoup de colère.

BR : Si on vous a posé ces questions d’emblée, c’est parce qu’à Basket Retro on pense bien connaitre votre carrière et avec le recul, on s’est dit qu’au final cet évènement frustrant a décuplé une envie de gagner déjà très présente. Qu’en pensez-vous ?

OS : Non pas vraiment. J’étais venu à Aix pour réaliser de grandes choses avec Guy Boillon. On a souvent eu d’ailleurs les moyens de nos ambitions. A mon avis, on a pas toujours eu de chances et on eu trop d’entraineurs. Je veux dire qu’il y a eu trop de va et vient, sans vraiment de constance. On se l’est dit avec Guy avec du recul et on était d’accord tous les deux. Je ne critique pas les entraineurs attention mais je me dis qu’on pas eu les bonnes personnes au bon moment. Parce qu’ à Aix des joueuses de talent, il y en a eu un paquet !

BR : Parlons à présent d’autre chose. Vous êtes née en Lorraine, en 1966. Qu’est ce que vous voulez nous dire de votre enfance ?

OS : Je suis la dernière de la fratrie. J’ai deux sœurs et un frère. J’étais l’enfant gâtée, la dernière, le bébé de la famille. J’ai vécu une belle jeunesse en Lorraine. Avec les mines et les usines, on passait, nous les enfants, tout notre temps à jouer dehors. A l’époque, c’était comme cela. Par rapport à mon père, il est toujours resté italien jusqu’à sa mort. Il m’a toujours dit qu’il remerciait la France de l’avoir accueilli mais qu’il garderait sa nationalité et qu’il en était fier. J’ai gardé un peu ce côté-là. Je veux dire, je suis française, je suis née en Lorraine et j’en suis fière mais je garde ce petit côté italien que m’a donné mon père.

BR : C’est votre frère Vincent, avec qui vous jouez dans le jardin familial, qui vous fait découvrir le basket ?

OS : Au départ, pour être honnête, il m’a forcé la main. J’allais voir mon frère jouer au basket quand j’étais enfant. Mon frère : c’était mon idole. J’adorais le regarder jouer. Ce n’est pas parce que c’est mon frère mais il était très très fort et j’étais impressionnée par ce qu’ il pouvait faire. Il jouait à Auboué. D’ailleurs je suis fière d’avoir commencé au CSMA qui est une référence en Lorraine, un grand club.

BR : Vous avez encore déclaré que Francoise Quiblier du CUC était votre idole de jeunesse. Vous avez suivi comment le fabuleux parcours des Demoiselles de Clermont ? Grâce à la télé, par la lecture de magazines ?

OS : A la télé, on parlait un peu des « demoiselles » mais c’est surtout dans les magazines et les journaux que je les ai découvertes. Elles gagnaient, et les demoiselles de Clermont c’était quelque chose pour l’époque. Je ne sais plus vraiment pourquoi je me suis arrêtée sur Françoise Quiblier mais oui je l’adorais.

BR : Et puis vous signez votre première licence à Auboué, près de Nancy. Odile Santaniello, elle vit pour la gagne depuis son premier ballon ?

OS : L’école de basket, c’est tellement loin…. Je ne me souviens plus très bien par contre je me rappelle que ma première licence de basket était rose comme le permis de conduire (elle se marre). Je me souviens par contre très bien des derbys contre Joeuf Homécourt. J’avais 11 ans et dans les salles, c’était chaud bouillant. On jouait aussi contre Jarny. De beaux souvenirs !

BR : Si nous vous parlons de Maurice Pichon, Jeannette Kaufman ou de Monsieur Human cela vous fait penser à quoi ? Ils ont quelle importance pour vous ?

BR : Maurice Pichon entrainait mon frère et l’équipe sénior. Je me souviendrais toujours de son béret noir. Il nous a entrainé un peu et c’était un grand joueur. Il était très dur comme tous les entraineurs que j’ai eu à cette époque. Monsieur Human venait du handball. Il était prof d’EPS à Auboué. Il a commencé à m’apprendre à jouer au basket et est décédé peu de temps avant que j’aille dans ma famille le noël dernier. Cela m’a fait quelque chose, c’était bizarre parce qu’il a compté pour moi au début. Madame Kaufman tout le monde la nommait « la Jeannette » mais avoir un surnom en Lorraine, ce n’est pas des moqueries, c’est normal. C’était une excellente joueuse passée d’Homécourt à Auboué. Cela avait fait beaucoup de bruit à l’époque. Elle était très dure avec nous, elle criait mais elle m’a appris à être disciplinée, exigeante et rigoureuse. On avait peur d’elle même si moi je n’ai jamais eu peur de personne… Tout à changé à son arrivée à Auboué car on a beaucoup gagné avec elle. J’ai eu des soucis avec elle ensuite et cela m’a rendu très triste. On montait en Nationale 4 et elle voulait absolument que je reste. Et moi, je voulais partir pour progresser et intégrer le CREPS de Nancy et jouer en Nationale 2. Alors cela a été compliqué avec Madame Kaufman.

Maurice Pichon à Auboué en 1943 (numéro 8) – Source : Les amis de l’histoire d’Auboué.

J’étais l’enfant gâtée, la dernière, le bébé de la famille. J’ai vécu une belle jeunesse en Lorraine. Avec les mines et les usines, on passait, nous les enfants, tout notre temps à jouer dehors. A l’époque, c’était comme cela. Odile Santaniello

BR : Vous êtes repérée par les instances en jouant avec l’Équipe de Lorraine. Dans une ITW à Maxi Basket, vous dîtes pourtant être passée sous les radars.

OS : Ca c’est certain. Je devais être la perle rare de Lorraine et on n’a pas voulu la montrer de peur de se la faire voler. J’exagère pas, c’est cela. Mais le sort en a décidé autrement, par chance. Bernard Keriquel, le CTR de l’époque, quand je l’ai rencontré des années après, il me remet la médaille de championne de France Inter ligue cadettes. En demi, avec la Lorraine, on bat l’Alsace puis en finale l’Auvergne et ce n’était jamais arrivé ! Donc quand je le revois, il me dit : « oui c’est vrai, on ne t’a pas mis sur les listes pour les pré-sélections en équipe de France cadette ».  Les gens qui me connaissent savent que je suis modeste, mais je marquais parfois 50 points. Un jour avec l’ASSU (NDRL : UNSS à présent) j’en ai même mis 64. Alors là je me disais, il y a un problème, c’est pas possible ! Après sur le moment, je ne me suis pas posée plus de questions que cela mais on m’a tout simplement gardé au chaud.

BR : Ensuite, vous intégrez le CREPS de Nancy où garçons et filles cohabitent. Quels sont vos souvenirs de cette période ?

OS : Pierre Jouvenet,  je le remercie. C’est lui qui est à l’origine de cela. C’était génial : Les 3 filles, nous étions toutes les 3 sélectionnées en équipe de Lorraine et il y avait 12 garçons aussi. Cela a donné un vrai coup de boost à mon basket parce qu’avec les garçons tu dois jouer plus haut, plus vite et plus fort. Là je suis obligé d’utiliser des superlatifs parce que tu comprends ta douleur quand tu vas au rebond contre Luc Bisset ou Christophe Gorak qu’on appelait Goldorak et qui faisait 2m02 à 16 ans. Et puis à chaque fois, ton vis à vis pendant les séances, il faisait deux têtes de plus que toi…. Après, on va dire : « Odile Santaniello, elle joue comme un mec ! ». Ba oui, mais je ne pouvais pas faire autrement. Pierre a du sentir qu’on était capable de gérer cela. Il a entrainé Bordeaux, Nancy, il a été prof de fac aussi. Merci Pierre.

Pierre Jouvenet. Source : L’Est Républicain

BR : Vous continuez à gravir les échelons en disputant, cadette, le championnat d’Europe junior en Italie, à Pescara. Vous vous souvenez de cette compétition ? De vos coachs, de vos coéquipières ?

OS : Chantal Matichard n’a pas pu faire le championnat à cause de moi. Il faut dire que les filles venait de l’INSEP et se connaissait toutes. Et puis Jackie Delachet me donne ma chance : « Tu viens au stage et on verra ». Moi, en compétitrice, je me suis donnée à fond et j’ai été prise. J’étais devenue quand même un peu l’ennemie des joueuses à qui on allait piquer la place. Moi, la campagnarde d’Auboué (elle se marre)… J’ai appelé mon père de suite quand je l’ai su et c’était un bon championnat. J’y ai fait quelque bons matchs mais qu’est ce que j’étais stressée ! Avec Armelle Delhoume, on était les plus jeunes. Il y avait aussi Myriam Larochelle, une grande copine de l’époque, qui jouait à Asnières, j’y ai passé de super moments.

BR : Et puis en mars 1984, à 17 ans, lors d’un match contre Challes-Les-Eaux vous êtes suspendue deux ans suite à une altercation avec une arbitre.

OS : Les gens ont parlé et j’ai lu et entendu sur cela toutes les versions imaginables. Je sais ce que j’ai fait et ce que je n’ai pas fait. Je n’ai jamais donné de coup de poing à cette arbitre. J’ai poussé l’arbitre oui et je lui ai dit des noms d’oiseaux. J’ai été disqualifié pendant le match. C’était un gros match, la montée s’y jouait . Une des sœurs Falcoz, part en contre attaque, elle fait 3, 4 pas avant de marquer. L’arbitre la laisse et c’est parti en vrille. Après ce que je regrette, c’est qu’on avait notre président Monsieur Zelback du SLUC qui ne veut pas régler la somme pour faire appel. Mon père n’était pas au courant des problèmes administratifs car je n’aurai jamais du prendre cette sanction de deux ans. Ok on ne touche pas un arbitre, mais deux ans c’est énorme. Suite à cela, je me dis que ma carrière était foutue.

BR : C’est ainsi que vous signez en Belgique, au Mosa Jambes.

OS : J’ai envoyé mon dossier à la FIBA pour rejouer en Belgique et j’ai demandé en même temps à changer de nationalité comme mon père est italien. La FIBA fait des recherches et accepte. Pendant mes recherches la FFBB met son véto et m’accorde une licence en Belgique. Il faut dire que j’avais téléphoné à la fédération belge. J’avais eu les contacts de tous les clubs belges : flamands et wallons. J’ai envoyé des courriers aux clubs en expliquant la situation. Et les dirigeants du Mosa Jambes me répondent et demandent à rencontrer mes parents. Lorsqu’ils viennent à Auboué, j’avais tout prévu. J’avais les clés du gymnase à côté de mon ancienne école primaire. L’entraineur, Thierry Briot, prend la caméra et me demande si je peux faire ça, ça, ça et ça. Je crois qu’il y avait son assistant aussi Christian Gilon. Cela a duré 5 minutes. Je m’en souviens encore très bien. En Belgique, c’était déjà très américain : tout était en anglais. Avec l’accent namurois, ils me disent : « tu fais stop jump, jump shot, reverse et lay back etc… » Je le fais et il me regarde et me dit : « c’est bon j’ai compris ». On est revenu chez moi et ils ont demandé à mes parents l’autorisation pour que je signe chez eux. Ils ont dit à mes parents : « On vous recontactera pour revenir vous donner l’argent par contre, on vous fait signer le contrat maintenant. » La somme d’argent, c’était rien, dérisoire, mais je m’en moquais. Ce que je voulais, c’était me sauver pour pouvoir jouer au basket.

Odile Santaniello au Mosa Jambes (Debout 3ème en partant de la droite). Source : Facebook

Lorsqu’ils viennent à Auboué, j’avais tout prévu. J’avais les clés du gymnase à côté de mon ancienne école primaire. Odile Santaniello

BR : Quels souvenirs avez vous du championnat belge ? Quel est son niveau par rapport à la France ?

OS : C’était un championnat à deux vitesses. Il y avait 14 équipes avec des play-offs (1-8 , 2-7, etc…), chose qui est arrivée bien plus tard en France. On fini la saison 5ème, nous la petite équipe du championnat… J’ai terminé à 17 ans deuxième marqueuse du championnat à plus de 30 points de moyenne derrière une Hongroise, une intérieure, Kiss : quelle joueuse ! On était les deux meilleures étrangères du championnat. Parfois j’ai mal vécu les choses parce que tous les arbitres savaient ce qui s’était passé et on me sifflait de ces trucs… Mais bon, j’ai tenu malgré mon caractère de chien. J’ai résisté !

BR : En 1986, votre suspension prend fin et vous hésitez entre Aix et le CUC. Et au delà de cette question, qui gère votre carrière à cette période là ?

OC : C’est moi qui ai toujours géré ma carrière.

BR : Dès votre arrivée à Aix, Guy Boillon le président du club mets les petits plats dans les grands pour vous en quelque sorte. Il se souvient d’ailleurs parfaitement du jour où il vous a fait signer. C’était dans un café en face de la Gare du Nord à Paris.

OS : Oui, je me souviens de ce moment quand il revient me chercher à la gare alors que j’arrive de Belgique. Mais on s’était vu aussi avant, à un tournoi, lorsque j’étais suspendue. Il voulait que je reste à Aix et que je m’y entraine seulement mais il fallait que je joue c’était impossible pour moi. Guy savait ce que j’allais devenir. Guy, pendant ces deux années, il me téléphonait tous les mois pour prendre des nouvelles et savoir comment j’allais. Je sais qu’il était stressé à l’idée qu’un autre club qu’Aix me signe mais moi je n’ai qu’une parole et je lui avait donné.

BR : Votre arrivée à Aix, c’est une période où vous explosez sportivement puisque vous tournez vite à plus de 20 points de moyenne. Vous devenez MVP du championnat. Vous avez 20 ans.

OS : Oui ! Je joue meneuse. Il n’y en avait pas. A l’époque, c’était compliqué une meneuse qui mangeait le ballon… Emmanuelle Blanchet, Rose Marie Scheffler, mes autres coéquipières : excusez moi c’était pas toujours facile pour vous de jouer avec moi. Après, quand une autre joueuse est arrivée à la mène, c’était mieux.

Odile Santaniello, sportive de l’année 1988 de la ville d’Aix. Source : Bimestriel du Pays Aixois.

Je sais qu’il était stressé à l’idée qu’un autre club qu’Aix me signe mais moi je n’ai qu’une parole et je lui avait donné. Odile Santaniello

BR : Vous vous faites un autre beau cadeau, en juin 1987, avec votre première sélection nationale. Vous y retrouvez Jackie Delachet qui vous a coaché chez les juniors.

OS : Oui c’est cela et je m’en rappelle bien parce que je ne voulais pas y aller. J’en voulais tellement à la terre entière… On m’a raisonné en me disant « tu vas pas encore être suspendue, penses à ta carrière, allez oublies, etc… » Et puis j’y suis allé.

BR : Pour votre première sélection vous affrontez la Pologne, vous qui avez un maman d’origine Polonaise et vous déclarez un peu plus tard à Maxi Basket vouloir un jour jouer en Italie, vous dont le papa est d’origine Italienne. Du coup, deux questions dans une. Comment vivez vous ce moment et quel rôle jouent vos parents dans votre début de carrière ?

OS : Mes parents m’ont toujours suivi oui mais j’ai toujours géré ma carrière seule. Mon père me disait toujours : « Ma fille c’est à toi de faire tes choix pour ta carrière. C’est ta carrière, c’est ton avenir, je ne vais pas prendre des décisions à ta place, fais comme tu le ressens. ». Pour être franche, je ne me souviens plus de ce match contre la Pologne mais cela a forcément dû être spécial parce que je suis très attachée à mes racines que ce soit du côté de ma mère ou de celui de mon père.

BR : 1987, 1988, 1989, 1990, 1991 MVP du championnat de FranceRacontez nous comment cela se passait vos remises de trophée. C’est Maxi Basket qui organise ce vote ? Ils doivent être grands les meubles chez vous pour pouvoir mettre tout ces trophées (LOL) ?

OS : Je dois avoir 5 trophées Maxi Basket. Quand j’étais à Bourges, je les avais emmené mais quand j’ai déménagé je ne les ai pas gardé avec moi. Ils sont actuellement dans le grenier chez ma sœur en Lorraine. Ce sont de beaux trophées, ils sont lourds et beaux. Par contre, on a pas eu de grandes remises. Je me souviens d’une fois ou deux peut-être où on est avec Antoine Rigaudeau. C’est Pascal Legendre le journaliste de Maxi qui nous les donnait.

BR : Sous les ordres de Michel Bergeron, vous participez en mai 88 à un TQO organisé en Malaisie, à Bornéo. Objectif Séoul raté …

BR : Le gros souvenir que j’ai, c’est le match contre le Zaïre. Il y a 95% d’humidité. J’avais des baskets Converse trempées et l’eau y faisait pschitt, pschitt en courant sur le terrain. Horrible ! Les conditions de jeu étaient catastrophiques. On perd contre les Yougoslaves qui ont une médaille ensuite et après ce match, on était épuisées. Sinon je me souviens que Françoise Amiaud se fait mordre par un singe dans son lit pendant le jour de repos. Parfois, les matchs je ne m’en souviens plus mais les anecdotes si et là, c’était trop drôle. Rose-Marie Scheffler a ramené également une étoile de mer dans son bagage à main. L’étoile pourrissait et il y avait une odeur. Cela puait. En arrivant, on a rigolé mais quelle odeur ! Après les Jeux oui, c’est sur que j’aurais voulu les faire. Aller voir les compétitions, jouer contre les meilleures, voir des champions au village, l’ambiance, mais bon c’est comme ça. C’est la vie.

Odile Santaniello (numéro 9) avec les bleues, en 1988 . Source : Revue Basket-Ball

Sinon je me souviens que Françoise Amiaud se fait mordre par un singe dans son lit pendant le jour de repos….. Rose Marie Scheffler a ramené également une étoile de mer dans son bagage à main. Odile Santaniello

BR : Puis en novembre 1988, vous faites une tournée avec l’équipe de France aux Etats-Unis. Vous rencontrez 6 universités américaines : Vanderbilt, Tennessee Tech, Tennessee, Louisville, Murray State et Southern Illinois.

OS : Ces sélections ne comptent pas. On a halluciné et on était tellement fatiguées de jouer tant en si peu de temps. A ce moment, là je me blesse à la cheville et notre kiné précurseur en ostéopathie me remet vite sur pied. Par contre, je ne me souviens plus très bien de cette tournée.

BR : Des bleus avec qui passez vos étés comme par exemple en 1991 ou vous affrontez la Finlande, la Suède, Chypre ou le Portugal dans le groupe B européen.

OS : C’était la galère. Jouer contre ces équipes. La Finlande, la Suède ce sont des nations qui ne nous convenaient pas en fait. Elles jouaient dur et dans l’équipe à l’époque tout le monde n’acceptait pas le combat physique dans les duels.

BR : A Aix, vous faites route avec Guy Boillon. Parlez nous de lui.

OS : Avec Guy, on a un lien. Et quand je me lie à quelqu’un, c’est pour la vie. Moi, je n’ai pas de milieu. Guy a eu confiance en moi, il est venu me chercher et on est très complice. C’est un deuxième père pour moi et je l’aimerais toujours pour cela. Après je suis parti parce que je n’en pouvais plus d’être à la porte des finales. Il a compris mon départ, je le sais comme il sait aussi que j’ai persisté pour lui aussi à Aix. Il comptera toujours pour moi.

Jean Pierre Siutat et Guy Boillon. Source : Twitter.

C’est un deuxième père pour moi et je l’aimerais toujours pour cela. Odile Santaniello

BR : La Pioline c’est un peu chez vous. Vous faites chavirer régulièrement cette salle qui scande votre prénom. On vous y adore. Vous avez des matchs en tête ?

OS : Difficile de ressortir des matchs mais contre Mirande, le Racing ou Orchies c’était chaud ! Contre Mirande, j’y vais l’épaule en vrac. Je joue quand même avec 40 de fièvre une autre fois. C’est la Pioline, c’est ma deuxième maison. J’adorais jouer là-bas.

BR : On dit aussi que c’est là également que vous piquez vos plus grosses colères.

OS : Oui c’est vrai. C’était des bêtises de jeunesse et j’ai fait en sorte de m’améliorer avec les années.

BR : Parallèlement avec les bleues vous terminez deuxième des Jeux Méditerranéens à Salonique en Grèce . Vous êtes élue dans le meilleur 5 de la compétition avec Isabelle Fijalkowski.

OS : En Grèce, je me blesse aussi. J’ai une entorse à la cheville et je joue quand même. A mon retour, il m’ a fallu trois mois pour récupérer. Je suis dans le meilleur 5 : merci la cheville !

BR : Puis deuxième du Championnat d’Europe en 1993 en Italie avec un match de dingue contre les Russes (23 points). Vous êtes encore élue dans le meilleur 5 de la compétition toujours avec Isa Fijalkowski.

OS : C’est la surprise mais on était dans une bonne dynamique. Et dans l’équipe, on s’entendait très bien aussi. Aller battre les italiennes en Italie, cela a été un truc de dingue ! On était très fatiguées pour la finale quand on joue l’Espagne. On a eu un jour de repos en moins et on se retrouve dans un grand état de fatigue. Physiquement moi, je n’en peux plus à ce moment là. Et en demi, Carole Force nous fait gagner le match avec son panier de 28 mètres. Il y avait Corinne Zago aussi, Isa (Fijalkowski), Pao (Ekambi), Yannick (Souvré), Amy Cissé ou Loetitia Moussard pour ne citer qu’elles. Il y avait un mélange de génération fait d’anciennes et de jeunes joueuses. C’est un super tournoi. Et je me souviens avoir fait un bon championnat.

BR : On poursuit chronologiquement vous l’aurez compris. A l’été 1994, vous découvrez l’Australie avec les bleues lors des Mondiaux.

OS : On termine 9ème. C’était un drôle de championnat parce qu’il y avait des matchs de classement. C’était un peu bizarre. Contre l’Australie, équipe très physique, on a pas existé. Les souvenirs c’est Adélaïde quand on arrive deux semaines avant la compétition. Sur un bateau, à Sydney ensuite, on mange en face de l’opéra. Toutes les délégations avaient été reçues par la fédération australienne. C’était super. Et après au niveau du groupe, la FIBA avait fait des changements que j’ai pas toujours trouvé très cohérents. J’y étais capitaine mais voilà, je garde de cette compétition un souvenir mitigé.

BR : Par contre vous ne participez pas aux Goodwill Games en Russie la même année. C’est votre dos qui commence à vous poser des soucis ?

OS : Non c’est pas le dos. Je me suis fais opérer de l’épaule suite à une luxation. On était alors en stage à Antibes.

BR : Pendant que l’on parle de l’étranger, vous vous souvenez de matchs particuliers en coupe d’Europe par exemple ?

OS : Ce dont je me souviens quand on allait dans les pays de l’Est, c’est quand on allait à Moscou. On allait derrière le Kremlin acheter au marché noir la boite de caviar à 100 francs la boite. Aujourd’hui, c’est 15 euros et maintenant pour 15 euros, tu n’as rien. Après les matchs, il y en a eu tellement… Je me souviens avec Bourges être tombée en panne à la frontière Hongroise. On jouait contre Ruzomberok. Le bus fumait, on a été obligé d’en appeler un autre. On a dû attendre des heures et des heures qu’on vienne nous chercher.

BR : 1992, 1993, 1994 MVP… et comme vous avez de très grands meubles chez vous, vous décidez de partir pour Bourges en 94. Plus sérieusement, partir d’Aix c’était inévitable pour gagner collectivement ? Et comment avez vous vécu ce départ ?

BR : Les gens ne s’en rendent pas compte. 8 fois ! Je ne sais pas si cela arrivera à nouveau un jour. Je ne crois pas. Et à l’époque il y avait de très bonnes joueuses françaises qui jouaient en France. C’était beaucoup de travail. Le basket était physique et la musculation n’existait pas ou très peu à cette période. En France, on était très en retard là dessus. Aujourd’hui, cela a complètement changé. Mais certains entraineurs nous faisait faire du physique différemment et c’était très dur. Je crois avoir été en avance sur ma génération de par mon jeu. Là aujourd’hui, c’est moi qui vous le dit mais les entraineurs le disait aussi d’ailleurs. Je crois en fait qu’à peu près tout le monde l’a dit que j’étais en avance. Mais attention, j’ai la tête sur les épaules, pas de grosse tête parce qu’il faut rester humble parce que d’abord ce n’est que du basket et ensuite je sais d’où je viens. Colette Passemard et Jackie Delachet quand elles me prennent en sélection cadette quand on voulait pas me mettre sur les listes, elles me disent c’est quoi cette extraterrestre : mais d’où tu viens, toi ? Mais moi je viens d’Auboué ! (elle se marre). On a beau faire des comparaisons aujourd’hui, je crois que les gens ne se rendent pas compte. Alors merci à mes parents pour ma génétique extraordinaire.

A suivre : Bourges, la WNBA, Schio, sa fin de carrière et un touchant message pour le Mosa Jambes…

Interview réalisée pour Basket Rétro par Guillaume Paquereau

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Amoureux de Gozilla depuis mon plus jeune âge, je suis devenu fan des Suns ! De Sir Charles à Dan Majerle en passant par Nash, via Stoudemire pour aller jusqu'à Devin Booker : PHX a le monopole de mon coeur. Je veux du soleil !

2 Comments on [ITW] – Odile Santaniello – Partie 1 : « Je suis fière d’avoir commencé à Auboué ! »

  1. Félicitations Guillaume pour cet interview d’une icône du basket féminin français.

    Mais il faudra un jour rétablir la vérité historique.
    Le ballon redonné à Sandrine Chiotti par Loetitia Moussard pour arracher des prolongations contre Aix et le panier contre son camp de Nathalie Fortun (contre le Racing de mémoire) sont deux anecdotes historiques différentes…
    Je ne vous dit pas l’état de la chaise qui avait « bénéficié » d’un coup de pied d’Odile à Mirande avant le temps-mort dont elle parle……

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  2. Guillaume Paquereau // 21 janvier 2022 à 18 06 55 01551 // Réponse

    J’en prend bonne note ! C’est parfois compliqué de s’y retrouver. Le mieux sera de prendre notre temps et de réécrire quelque chose sur cet évènement. Merci Pierre !

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