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[Portrait] Pepe Sanchez, Le Cérébral

Portrait

Montage Une : Laurent Rullier pour Basket Rétro

Souvent en retrait des projecteurs, Juan Ignacio “Pepe” Sanchez, fut le chef d’orchestre de la génération dorée Argentine championne Olympiques en 2004. Très proche de Manu Ginobili, avec qui il a commencé le basket à Bahia Blanca, Sanchez est le premier argentin à avoir jouer en NBA.  Son jeu cérébral et un caractère plutôt discret ne lui ont pas permis de faire carrière dans un basket qui ne reconnait malheureusement trop souvent que l’instantanéité et le brillant. C’est donc sur le vieux continent que cette pépite s’est épanouie.

C’est à Bahia Blanca, ville portuaire du bord de l’atlantique, que tout débute. Loin d’être une mégalopole (300000 habitants) “la baie blanche” n’est même pas dans le top 10 des villes argentines. Improbable donc d’en trouver la moindre ligne dans un lonely planet, guide michelin ou autre routard. Cependant, pour tout fan de basket, Bahia Blanca est une capitale. C’est même “The place to be” pour tout fan basket vadrouillant en Amérique du Sud. La rumeur raconte même que c’est dans son club de l’Estudiantes que les premiers ballons de “Basquetebol” ont rebondi en Argentine. Son gymnase, l’Estadio Osvaldo Casanova respire et transpire  l’histoire du basket Albiceleste.

C’est entre ces murs froids en hiver et suffocants en été qu’au début des années 90 deux pépites éclosent, à peu près au même moment. “El” Manu Ginobili et Juan Ignacio “Pepe” Sanchez. Chacun né en 1977. Le duo est éblouissant. Si la future légende de San Antonio est un attaquant pure race, Sanchez en est son parfait complément, altruiste et passeur d’exception, il déclarait en 2007 à Euroleague Magazine:

 “Passer est naturel pour moi. Je passe comme ça depuis l’âge de 5 ans. J’ai des cassettes vidéo quand j’avais 8 ans, et je passais de la même manière que maintenant. C’est  une capacité naturelle, mais j’ai aussi appris de  joueurs comme John Stockton. J’ai appris de lui comment passer d’une seule main, en utilisant le poignet uniquement, comme les joueurs de baseball au lieu du bras entier, car c’est plus rapide ainsi.”

Année après année, catégorie après catégorie, rien ne résiste au duo et le gymnase de Bahia devient vite trop petit pour contenir le phénomène. Trop forts pour le modeste championnat national, les deux s’exilent au sortir de l’adolescence. Gino ira parfaire ses gammes en Italie, pendant que Sanchez prendra la direction de Philadelphie et de la Fac de Temple en NCAA.

LE GARDIEN DU TEMPLE

Sous les ordres de John Chaney le coach iconique des Owls, que Pepe, qui ne parle pas un mot d’Anglais à son arrivé va découvrir la NCCA et sa conférence Atlantic 10. Si, hormis Eddie Jones, peu de “grands noms” du basket NBA en sont sortis, la fac de Pennsylvanie est pourtant toujours une habituelle du tournoi final universitaire. Et Sanchez s’appliquera lors de tout son cursus en “cerise et blanc” à faire perdurer le rendez vous printannier. En véritable chef d’orchestre, Sanchez veille, match après match à ce que les systèmes de coach Chaney soit appliqués à la lettre.

En NCAA, avec les Temple Owls (Crédits Photos abbbasket.com)

Maitre à penser de son équipe sur le terrain, Pepe se révélera également être un étudiant brillant. Lui qui à son arrivé était incapable de demander son chemin dans la langue de Shakespeare, se verra, 4 ans plus tard, double diplomé (en philosophie et en histoire) et récompensé du titre d’étudiant-athlète de l’année en 2000, grace à des résultats scolaires remarquables.

Avec John Chaney, coach iconique de l’université de Temple. Crédits Photos: Basquet Plus

Coté terrain, son bilan est également bien fourni:

  • 4ème meilleur intercepteur de l’histoire NCAA.
  • Deux fois joueur de l’année de la Big Five (regroupement des universités de Philadelphie: Villanova, Lasalle, Penn State, Saint Joseph et Temple).
  • Meilleur passeur et intercepteur de l’histoire de Temple.
  • Mvp et defensive player of the year de la conférence l’Atlantic 10 lors de sa saison senior.

Aujourd’hui, “Pepe” est bien évidemment un membre incontestable du Hall Of Fame et du “ring of Honor” des Owls. Il y a été introduit en 2016 (en compagnie d’un certain Terence Stansbury ex-Levalloisien bien connu chez nous.)

DON’T CRY FOR ME PHILADELPHIA

La soirée du 28 juin 2000 sera longue pour le sud-américain, lors de la draft, il entend David Stern égrainer 58 noms, sans jamais prononcer le sien. Non sélectionné, il réussit néanmoins à gagner sa place dans le roster de Philadelphie, définitivement sa ville d’adoption. Le 31 octobre 2000, Larry Brown le fait entrer en jeu pour le Sixers au Madison Square garden, il devient au quart d’heure près, le premier argentin à jouer en NBA. (Quelques minutes plus tard sur le parquet des Vancouver Grizzlies, Ruben Wolkowisky avec les Sonics en sera le second!). Avec seulement 4,5 pts de moyenne lors derniere année en NCAA, Sanchez avait déjà montré ses limites au scoring. Il était  donc complètement illusoir d’imaginer qu’un meneur de son style puisse briller dans cette ligue, et encore moins dans une franchise dont le contenu du playbook de l’époque tient sur un post-it et se résume à un nom: “Allen Iverson”. 

Le premier Argentin en NBA. (Crédits Photos: Sanluisdelegantesports.com)

Il laisse donc rapidement à Aaron Mckie (Autre ancien de Temple et actuel coach de la fac) le rôle de doublure de the Answer. Philly ira tout de même, cette saison la (sans Sanchez) jusqu’en finale NBA.

Après quelques bouts de contrats au Hawks (5 matchs) et au Pistons, Pepe traverse l’atlantique et débarque au Panathinaïkos, où il découvre un basket Européen taillé sur mesure pour lui. Sous les ordres de Zeljko Obradovic, l’argentin est comme un poisson dans l’eau, dans un jeu ou les possessions durent et ou les ballons tournent. Il remporte l’Euroleague, dès sa première saison, face au Kinder Bologne de… Manu Ginobili.

LES LAURIERS OLYMPIQUES

C’est avec le maillot bleu ciel et blanc de son pays, que Sanchez écrit les plus belles pages de sa carrière, et de tout le basket Argentin. En 2002 lors du championnat du monde à Indianapolis, les Albicelestes deviennent les premiers à battre une équipe composée de joueurs NBA. Circonstance aggravante de l’humiliation US, le larcin est commis dans l’Indiana, lieu de naissance de Larry Bird et des” Hoosiers”, un État où l’on compte probablement plus de paniers que d’habitants et dont le coeur ne bat que pour le basket.

Véritable leçon de jeu collectif, avec Pepe à la baguette ce match est aujourd’hui, toujours visionné lors de clinics sur le “spacing” ou le “ball movement”. Malgré cette performance, les argentins s’inclinent finalement en finale face à la Yougoslavie.

Deux ans plus tard, lors des olympiades d’Athènes, la bande d’El Manu va redéfinir pour un moment les cartes du basket mondial.

Le départ sera poussif, avec d’entrée deux revers, face à deux gros costauds, l’Espagne, puis l’Italie. Mal engagés, les hommes de Rubén Magnano reprennent vite du poil de la bête et enchainent 3 victoires dont une au bout du suspens face à la Serbie. La légende en marche, les blancs et bleus régalent, et se régalent. En demi, il ne feront qu’une bouchée d’une Team USA qui ne fait plus peur à grand monde, (déjà battue 2 fois en moins d’un mois, face à l’Italie en préparation et contre Porto-Rico en ouverture du tournoi). En finale, les argentins prennent leur revanche sur la Squadra qui les avait battu lors des poules. Les voilà sur le toit du monde.

Les argentins champions olympiques 2004 avec Sanchez en bas à droite (Crédit Photo Basket USA)

Lors de la quinzaine Pepe Sanchez aura fait… Du  Pepe Sanchez. Capable de dominer un match sans marquer le moindre point, discret, mais ô combien important. Comme le résume  bien Juan Espil, l’un des leaders de la génération précédente:

“Il contrôle totalement tout ce qui se passe autour de lui. Il devine les pensées des autres. Il n’est pas rapide, mais il est attentif, intelligent et intuitif. Jamais impulsif. Ses yeux perçoivent au-delà de ce que son regard indique.”

EURO SUPERSTAR

En 2004, Pepe fort de son succès olympique est contacté par les Warriors, mais est coupé à la fin de la pré-saison. Il s’engage alors en liga ACB avec Alicante pendant une saison, puis avec Malaga les trois suivantes. En Espagne, dans un championnat qui compte la crème de la crème des meneurs européens: Igor Rakocevic, Juan Carlos Navarro, ou bien son compatriote Pablo Prigioni, Sanchez remporte une coupe du Roi en 2005 et offre à Malaga le premier titre de liga de son histoire en 2006. En 2007, il qualifie l’Unicaja pour le Final Four de l’Euroleague grâce à un “triples” venu d’ailleurs qui envoi le Barça, favori de la compétition, en vacances.

 
Le panier à 3pts qui qualifie Malaga pour le Final Four de l’Euroleague en 2007

MERCI BAHIA

A 32 ans, et avec probablement le double dans les articulations, Juan Ignacio Pepe Sanchez rentre au pays et boucle la boucle avec un retour à Bahia Blanca pour y terminer sa carrière de joueur, entre 2010 et 2013. Il est aujourd’hui président du club. Mais tout président qu’il soit, Pepe est avant tout un homme de terrain, et ne conçoit pas exercer ses fonctions ailleurs que sur le parquet. Toujours le premier arrivé au gymnase, il n’en repart qu’après de longues séances de tirs avec les jeunes pousses, au cours desquelles il leur distille de précieux conseils, grappillés de-ci de-là, année après année auprès des plus grands. De John Chaney à Željko Obradović, en passant par Sergio Scariolo lors de ces année à Malaga. Il déclarait en 2016:

“Je leur enseigne un condensé de tout ce que j’ai vu de mieux durant ma carrière”

Dans son club de Bahia dont il est désormais président (Crédits Photos:Clarin.com)

Il est fort bien probable que, si d’avenir, le basket Argentin doit connaître une prochaine génération dorée, c’est une fois de plus le petit gymnase de Bahia Blanca et le cerveau de Pepe Sanchez qui en auront été le berceau.

PALMARES

  • Vainqueur de l’Euroleague 2002
  • Champion Olympique 2004
  • Vainqueur de la Copa del Rey 2005
  • Champion d’Espagne 2006

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