La Phi Slama Jama – l’art de la haute voltige
NCAA
Ça aura duré trois ans. L’université des Cougars de Houston fut nommé « Phi Slama Jama » en référence à leur style de jeu décomplexé et aux antipodes de ce que le public avait l’habitude de voir en NCAA. Le dunk était leur marque de fabrique, retour sur l’épopée de cette bande de fous furieux.
Le surnom fut donné par un journaliste sportif local, Thomas Bonk en janvier 1983. Houston développait un jeu spectaculaire qui consistait à se créer le plus d’opportunités possible de partir en contre-attaque et terminer par un dunk retentissant. Tout à fait le type de tactique qui ne plaisait pas aux puristes et à devenir un manque de respect au basket universitaire. Un effectif composé de joueurs talentueux et possédant des qualités athlétiques au-dessus de la moyenne. Clyde Drexler était le fer de lance, la star des airs alors qu’Akeem Olajuwon en était la tour défensive. Michael Young complétait le big three et d’autres joueurs ont fait aussi la renommée des Cougars comme Greg « Cadillac » Anderson, Larry Micheaux, Ricky Winslow (père de Justise Winslow qui joue pour le Miami Heat en NBA), Benny Anders, Lynden Rose ou encore Rob Williams.
La salle Hofheinz était une des plus intimidantes du pays où n’importe quelle université s’attendait à vivre un enfer et se voir repasser en boucle dans les highlights à la télévision. Le coach Guy Lewis à la tête de l’université de Houston depuis 1953 est convaincu que ce type de basket peut cartonner malgré les critiques et les doutes. Lewis s’est inspiré de l’ABA et plus particulièrement des Nets de New York où présidait le roi du dunk dans les années 70, Julius Erving.
TROIS ANS DE SUITE AU FINAL FOUR – PAS DE TITRE
Les Cougars, c’était comme l’antéchrist, le contraire du jeu léché et appliqué par les spécialistes comme John Wooden, l’entraîneur le plus titré de l’histoire de la NCAA avec 10 trophées de champion entre le milieu des années 60 et 70 avec UCLA. Ainsi le jeu ultra rapide était préféré au demi-terrain, les qualités athlétiques mises en avant au dépourvu des fondamentaux et bien sûr le dunk prioritaire du shoot. Clyde Drexler disait qu’un jump-shot était sympa à prendre, mais que le dunk était son péché mignon. Preuve de leur trop grand amour au spectacle, Houston était l’une des plus mauvaises équipes du pays aux lancers-francs, 61% en général! Un péché qui va leur priver du titre suprême. En 1982, c’est les Tar Heels, futurs champions, qui les éliminent en demi-finale. Un premier pas dans la défaite pour Clyde Drexler face à Michael Jordan.
L’année suivante paraît être la bonne, numéro un des Etats-Unis avec 31 victoires pour 2 défaites, sur une série incroyable de 25 succès d’affilée avant le retour au final four avec pour adversaire, Louisville. Les Cardinals ont aussi un goût de revanche après leur élimination en demi-finale contre Georgetown en 1982, mais l’obstacle texan va être bien compliqué à manoeuvrer. Histoire d’ajouter un peu d’huile sur le feu, les Cougars mettent leur maillots blanc et rouge affublé d’un logo « Phi Slama Jama ». La rencontre connut un buzz mémorable dans les médias à tel point qu’il brisa un record d’audience TV avec plus de 15 millions de téléspectateurs! Plus communément nommé « The Louisville Game« , les Cougars ont offert un véritable déluge de dunks et font de ce match encore aujourd’hui, l’un des meilleurs de l’histoire. ESPN avait résumé comme ceci: « Le plus grand show que vous n’ayez jamais vu sur quarante minutes! ».
Deux jours ont passé après cette victoire de Houston et personne ne mise sur North Carolina State. Grosse erreur et alors qu’aucune équipe n’avait réussi à stopper la cavalerie texane, les Wolfpacks freinent les ardeurs des Cougars en proposant une défense de zone imperméable. Avec un jeu au ralenti et un Clyde Drexler handicapé par les fautes, Houston faiblit et seul Olajuwon arrive à maintenir les siens à flot (20 points – 18 rebonds – 7 blocks). Connaissant leur maladresse chronique aux lancers-francs, le coach des Wolfpacks demande à ses joueurs de faire faute dans le money-time alors que les Texans réalisaient un comeback impressionnant.
La tactique marche, Houston s’effondre sur la ligne, 10/19 sur le match, égalité à 52 partout. La défense des cougars tient le choc pour cette dernière possession, Dereck Whittenburg prend un shoot désespéré très loin derrière la ligne à trois points, un airball qui se transforme en passe décisive quand Lorenzo Charles la claque comme un alley-hoop au buzzer! Incroyable, l’ogre Houston a été vaincu, une fin terrible où Guy Lewis livre son ressenti:
On a shooté à 38%, notre plus mauvais pourcentage de l’année. On a raté des shoots facile et on en a eu largement assez pour gagner ce match. Ce n’est pas leur défense ou le tempo ralenti qui nous fait perdre, c’est notre incapacité à rentrer ces lancers-francs. En étant plus concentrés, on les aurait mis et la victoire était à nous…
Un véritable coup de poignard d’autant plus que Clyde Drexler prend la direction de la NBA et la draft en juin 1983. Ce départ n’est pourtant pas aussi dommageable qu’on pouvait l’imaginer. Akeem passe un cap et devient l’arme fatale du pays. La pluie de dunks continue et c’est un retour en finale pour les cougars. Un duel de puissance et de taille entre Akeem Olajuwon et Patrick Ewing. Georgetown l’emporte et c’est ainsi que se ferme l’ère de la Phi Slama Jamma. Olajuwon et Michael Young se présentent à la draft 1984.
SESSION RATTRAPAGE CHEZ LES PROS

Michael Young – Hakeem Olajuwon – Clyde Drexler, et Larry Micheaux, membres du Phi Slama Jama (c) Michael Paulsen, Houston Chronicle
Ce fut long, mais finalement à défaut d’un titre universitaire, certains d’entre eux ont pu se rattraper en NBA ou ailleurs. Michael Young champion d’europe en 1993 avec le CSP Limoges, Hakeem Olajuwon qui prend sa revanche sur Patrick Ewing en finale 1994 et l’arrivée de Clyde Drexler chez les Rockets pour reformer le duo terrifiant et permettre le doublé de Houston et la première et seule bague pour The Glide.
Aujourd’hui, tout le monde profite de la retraite, chacun à leur manière. Hakeem s’occupe d’entraîner les joueurs NBA, des leçons particulières qui ont été donné à Kobe Bryant, Lebron James, Dwight Howard, rien que ça. Clyde Drexler commente les matchs de Houston sur la chaîne locale, Fox Sports. Michael Young dirige le programme de basket des Cougars depuis une dizaine d’années et directeur des opérations basket. Larry « MrMean » Micheaux est professeur au lycée de Stafford, quelques séances de coaching et organise des camps d’été. Rob Williams a vu sa santé décliner après une attaque cardiaque en 1998, mais vit toujours.
Benny Anders est porté disparu, aucun de ses amis ou ex-coéquipiers ne l’ont retrouvé. Les rumeurs parlent d’un boulot comme chauffeur poids-lourd à travers le pays. Guy Lewis est décédé le 26 novembre 2015 à 93 ans. Intronisé au Hall of Fame en 2013, Guy Lewis a été un artisan dans l’intégration des joueurs noirs dans les équipes de basket dans le sud des Etats-Unis. Son fils, Vern, a retenu une phrase symbolique de son père sur la période des Cougars de 1982 à 1984.
« le dunk est bien plus sûr et une meilleure réussite qu’un jump-shot. Alors dès que vous pouvez, courez au plus vite et dunker dès que vous en avez l’occasion » G.Lewis
Aussi qui de mieux pouvait nous concocter un mix de haute qualité composé d’images rares de cette équipe de Houston que l’éternel Clutch-23? Près de 15 minutes du meilleur des cougars, un régal comme toujours!
MIX PHI SLAMA JAMA PAR CLUTCH 23
Crédits photos : ESPN/NBA.com
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