ITW Pascal Donnadieu (JSF Nanterre) – Partie 1 : « Je n’arrivais pas à me dire qu’on était champion de France »
La Jeunesse Sportive des Fontenelles de Nanterre (JSF) a fini sa saison tandis que que les autres équipes françaises jouent actuellement les playoffs de Pro A. Basket Rétro en a profité pour s’entretenir avec Pascal Donnadieu, coach du club francilien. Dans cette première partie, l’entraîneur français nous dévoile sa découverte du basket, son parcours, son histoire si particulière avec ce club et ses souvenirs de la NBA. C’est la nouvelle interview à lire dans la rubrique « le basket vu par ».
Basket Rétro : Comment avez-vous découvert le basket ?
Pascal Donnadieu : Par l’intermédiaire de mon père Jean Donnadieu qui était joueur et entraîneur du club de Nanterre. Je suis donc tombé dedans. Le fils d’un basketteur qui découvre ce sport, c’est assez classique.
BR : A quel âge avez-vous commencé à jouer ?
Pa.Do : Tout petit, j’ai eu le virus du basket. Je crois que c’est vers l’âge de 7-8 ans.
BR : Jusqu’à quel niveau avez-vous évolué ?
Pa.Do : J’ai joué jusqu’en Nationale 3 à Rueil. C’est le niveau le plus élevé que j’ai atteint. Avant cela, j’ai évolué tout le temps à Nanterre. Malheureusement je me suis blessé deux fois les croisés au niveau du genou. J’ai dû vite arrêter. (Ndlr : il arrête la compétition en 1991 à 27 ans après une seconde et grave blessure au genou)
BR : A quel poste et quel était votre style de jeu ?
Pa.Do : J’ai joué au poste de meneur. Ca peut prêter à rire mais ma morphologie a bien évolué depuis. J’étais un joueur plutôt rapide et adroit.
BR : Sur le terrain, des joueurs français, européens, ou de NBA vous inspiraient-ils dans votre jeu ?
Pa.Do : Oui forcément le beau jeu de l’école yougoslave et celui espagnole à l’époque m’inspiraient et étaient de très grande qualité. La NBA c’était un peu plus lointain avec les images de Larry Bird. Je n’ai pas la modestie de me comparer à ce genre de joueurs.
BR : Quels sont vos premiers souvenirs de la NBA ?
Pa.Do : Ce sont les oppositions entre les Boston Celtics et les Los Angeles Lakers. A l’époque il y avait pas de matchs NBA diffusés, mais ca a commencé avec Canal Plus et George Eddy. J’avais un assistant coach à Rueil qui était fan absolu de la NBA et du basket universitaire. On a donc commencé à regarder des matchs en cassette à l’époque des Magic Johnson, Kareem Abdul Jabbar, James Worthy du coté des Lakers et Kevin Mchale, Larry Bird de l’autre avec les Celtics.
BR : Avez-vous un souvenir marquant de NBA : performances d’un joueur, matchs de playoffs ?
Pa.Do : Il y en a eu beaucoup. Là en ressortir un c’est difficile. Mais je vais reparler de la rivalité Celtics-Lakers, deux équipes avec deux styles de jeu différents. Les Lakers étaient flashy, couraient, relançaient. Boston était plus collectif et appliqué. Et il y avait deux grands personnages avec Larry Bird et Magic Johnson. Et puis que dire de Michael Jordan qui avait vraiment tout.
BR : Quels sont vos joueurs préférés en NBA ?
Pa.Do : Au-delà des joueurs cités précédemment, il y a aujourd’hui Tony Parker avec sa carrière phénoménale et il mérite une telle reconnaissance. Comme il est français, on s’en rend pas compte. Quand il sera plus là, on s’en rendra compte. J’aime bien aussi le style de joueur qu’est Ginobili et aussi Kevin Durant, un joueur complet.
BR : Quel serait votre 5 majeur idéal de toute l’histoire de la NBA ?
Pa.Do : Magic Johnson à la mène, Michael Jordan, Larry Bird, sur les ailes. En 4, Dirk Nowitzki avec une faculté telle de jeu. En 5, j’hésite entre Tim Duncan et Kareem Abdul Jabbar deux excellents garçons. Ca serait pas mal à voir tous ces joueurs complémentaires.
« J’avais un assistant coach à Rueil qui était fan absolu de la NBA et du basket universitaire. On a donc commencé à regarder des matchs en cassette à l’époque des Magic Johnson, Kareem Abdul Jabbar, James Worthy du coté des Lakers et Kevin Mchale, Larry Bird de l’autre avec les Celtics ».
BR : Pouvez-vous nous raconter comme vous avez rejoint le club francilien au poste d’entraîneur ?
Pa.Do : Nanterre est mon club de cœur. J’y habite. Moi je suis parti jouer à Rueil en Nationale 4. Comme moi j’entrainais déjà des jeunes à Rueil, des potes m’ont demandé si je pouvais donner un coup de main à Nanterre avec de jeunes joueurs et donc les aider à s’entrainer. Ils voulaient donc rebâtir une équipe sympa à Nanterre. Voilà comment ca a commencé. (Ndlr : En 1985, Jean Donnadieu décide de dissoudre son équipe première et de repartir tout en bas de l’échelle, au niveau départemental, la saison suivante).
BR : On sait qu’il y a eu les montées successives (11 montées pour arriver jusqu’en Pro A sans descente en 24 ans) le titre de champion de France en 2013, la Coupe de France cette année, quel est votre meilleur souvenir d’entraineur avec le club de Nanterre ?
Pa.Do : Forcément il y a plein de souvenirs. Ca peut paraitre fou et les gens vont peut être pas forcément comprendre mais j’ai l’habitude de dire que les grands moments au niveau départemental/régional sont des émotions pas forcément moins fortes que celles vécus dernièrement avec la victoire en Coupe de France ou l’Euroligue. Pour moi ça était les mêmes émotions. Evidemment, l’impact autour de vous n’est pas la même.
BR : Revenons sur le match 4 à domicile contre Strasbourg l’année dernière en finale de Pro A. Quels ont été les mots à vos joueurs pour aller chercher ce titre et puiser dans leurs réserves ?
Pa.Do : On était dans une superbe dynamique. On sortait de nulle part. On était pris par cet engouement, cette folie. On était très focus, très déterminé. On avait vécu une grosse déception avant en perdant contre le Paris Levallois en finale de Coupe de France 2013. On avait donc cette espèce de rage de vaincre avec un mélange de confiance. Il fallait tout donner, se surpasser, faire un truc complètement fou et se transcender. C’est ce qu’on a essayé de faire.
BR : Et que se passe t-il dans votre tête dès le coup de sifflet final qui vous offre le titre de Pro A ?
Pa.Do : J’ai connu des montées, des grands moments comme la victoire cette année en Coupe de France où j’étais super content. Dans le titre de champion de France, je n’ai pas réalisé du tout. Il me fallait beaucoup de temps. Je savais qu’il se passait quelque chose de hors-norme. Impossible de réaliser. On est pris dans un tourbillon. Je n’ai pas pris conscience et je n’arrivais pas à me dire que voilà on est champion de France de Pro A.

Nanterre n’a pas démérité cette saison en Euroligue notamment face au FC Barcelone (c) Nicolas Luttiau – l’Equipe
BR : La JSF Nanterre n’est pas passé loin d’atteindre le Top 16 de l’Euroligue cette saison. Qu’est ce qu’il a manqué à votre équipe ?
Pa.Do : Il y a des équipes beaucoup plus fortes que nous. Souvent dans notre poule on considérait qu’il y avait 2 petits : Nanterre et Kiev. Sauf que le budget du club ukrainien est plus élevé que le notre : 12 millions contre 4 millions d’euros. On avait l’impression d’être dans la même cour mais ce n’est pas le cas. Il y a donc les moyens, la richesse de l’effectif. Dans cette Euroligue, cette saison, on a tout donné. On a certainement surpris au début. Les grosses cylindrées, en début de saison, ne sont pas forcément prêtes complètement même si c’est un exploit d’aller gagné à Barcelone. On a été rattrapé par la réalité. Des équipes qui nous sont largement supérieur, forcément ont imposé leur force et puissance sur la durée lors des matchs de poule. On nous avait promis l’enfer. Mais on est satisfait car on s’en est pas mal sorti.
BR : On n’attend de nos clubs français qu’ils brillent en Euroligue et que l’un d’entre eux gagne cette compétition prestigieuse comme Limoges en 1993. Pourquoi selon vous est-ce difficile pour les clubs français d’atteindre le Top 16, le Final Four et de remporter une coupe d’Europe ?
Pa.Do : Comme Nanterre, on a moins de moyens que les autres. Mais on dira que dans d’autres pays, il y a des clubs qui arrivent à créer la surprise en coupe d’Europe. C’est vrai mais surtout et dans le championnat de France de Pro A, on remarque que ce n’est jamais la même équipe qui joue en Euroligue 2 années de suite. Ce n’est jamais le même champion. Et les équipes françaises se retrouvent avec aucune expérience en Coupe d’Europe alors que dans les autres pays, même sans forcément des moyens colossaux, des clubs arrivent à jouer l’Euroligue tous les ans. Il y a donc forcément une connaissance du niveau, de la compétition. La difficulté et le souci sont que pas une fois une équipe française n’a fait deux années de suite l’Euroligue et ce depuis quelques années. Il faut avoir la faculté d’enchaîner les matchs, d’assurer l’organisation autour de l’équipe. On n’a pas eu à se plaindre. Mais ce sont ces choses là, ces habitudes. Je pense qu’on verrait la différence si une équipe avec des moyens corrects, arrive à enchaîner 2-3 saisons d’Euroligue. Si Strasbourg a encore le bonheur de se retrouver en Euroligue, une deuxième année avec ce qui s’est passé l’année dernière, ils ont dû voir le style et ce qu’il leur manquait.
« J’ai l’habitude de dire que les grands moments au niveau départemental/régional sont des émotions pas forcément moins fortes que celles vécus dernièrement avec la victoire en Coupe de France ou l’Euroligue. Pour moi ça était les mêmes émotions. Evidemment, l’impact autour de vous n’est pas la même ». (au sujet des différents souvenirs de la JSF Nanterre)
BR : Entraîneur depuis 24 ans de la JSF. Pour revenir sur la pente ascendante du club, comment expliquez-vous la réussite du club progressivement ?
Pa.Do : J’espère que c’est un peu grâce au talent et aux compétences qu’on a. Comme on l’a toujours dit, on a essayé de garder les valeurs et d’avoir de l’ambition. Si on en est là, c’est qu’on a dû en avoir. Mais tout en gardant les valeurs qu’on avait au début : originalité, partage. Après il y a aussi les gens qu’on rencontre. Maintenant on est dans un système avec les agents et les contrats. Il y a donc 2-3 opportunités de rencontres de gens dont un garçon qui s’appelle François Godener qui jouait avec moi à Rueil et qui était un très bon joueur de Nationale 3. J’étais entraîneur qui jouait à Rueil. Je n’étais pas un petit joueur. Je me dis que je n’allais pas faire carrière. Et je suis revenu à Nanterre pour être entraîneur joueur. Mon parcours était assez rudimentaire. Je me débrouillais bien. Godener maintenant dentiste, me dit que la N3 et les déplacements le weekend étaient trop difficiles pour lui. C’était un super joueur et un super mec. Il me dit j’aimerais bien jouer avec toi à Nanterre. Il a eu un impact énorme. Il suffit de quelques rencontres pour provoquer le destin.

La JSF Nanterre n’a cessé de gravir les échelons et a été récompensé en 2013 par un titre de champion de France de Pro A (c) Claire Macel
Propos recueillis par Richard Sengmany
Dés lundi, retrouvez la seconde partie de l’interview avec Pascal Donnadieu. Il reviendra pour Basket Rétro notamment sur son travail de coaching qu’il poursuivra à Nanterre, l’actualité de la Pro A et de la NBA.
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