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7 juin 1999, « He Got Game » sur nos écrans

Cinéma

Montage Une : Laurent Rullier pour Basket Retro

Fin des années 1990, la planète basket est déjà servie par des longs métrages tels que White men can’t jump (Les blancs ne savent pas sauter) sorti en 1992, ou encore Blue Chips et Above the rim en 1994. Il manque cependant un dernier film afin de boucler cette fin du XXème siècle en beauté et pas n’importe lequel. He Got Game est en effet une production de Spike Lee, fan iconique des New-York Knicks présents à tous les matchs en bord du terrain du Madison Square Garden, et figure de proue de la communauté Afro-Américaine. Ce dernier n’avait pas encore réalisé de film sur le basket, un sport qui le passionne tant.

Ray Allen et Denzel Washington dans He Got Game (© TOUCHSTONE ALL RIGHTS RESERVED)

A l’instar des films de basket sortis lors de cette décennie, Spike Lee se devait de choisir un joueur NBA pour incarner, Jesus Shuttlesworth, le personnage principal considéré comme le meilleur espoir du pays. Pour le rôle, il a plus d’un nom en tête. Tout d’abord Kobe Bryant, avant que celui-ci ne se désiste, frustré par la défaite en playoffs contre le Utah Jazz, préférant passer son été à travailler. Par la suite, Tracy McGrady a été jugé trop réservé ; et la prestation d’Allen Iverson n’a pas impressionné Spike. Ne trouvant pas de terrain d’entente avec Kevin Garnett puis Stephon Marbury, il jette finalement son dévolu sur Ray Allen. Bien qu’il n’ait jamais joué dans le moindre film, Ray-Ray accepte le défi et prend des cours de théâtre. Si Denzel Washington (dans le rôle de Jack Shuttlesworth, le père) et Ray Allen (Jesus Shuttlesworth, le fils) occupent les deux premiers rôles, d’autres célébrités s’ajoutent au casting. De Rosario Dawson (dans le rôle de la petite amie de Jesus) à Milla Jojovich (dans la peau d’une prostituée battue par son mari) en passant par John Turturro, Roger Guenveur Smith ou encore Bill Nunn, la liste est longue. Spike Lee propose une véritable réunion des joueurs NBA de l’époque tels que Michael Jordan, Scottie Pippen, Shaquille O’Neal, Charles Barkley ou Rick Fox, John Wallace et Travis Best. Même Reggie Miller est de la partie (malgré sa grande rivalité avec les Knicks et les nombreux échanges de mots doux entre lui et Spike Lee). S’ajoutent à cela des légendes NBA et des coachs de références : Bill Walton, John Thompson (entraîneur de l’université de Georgetown), George Karl (entraîneur du Utah Jazz), Nolan Richardson (entraineur de l’université d’Arkansas). On note également la présence de Jim Brown, l’ex fullback de la franchise NFL Cleveland Brown reconverti en acteur suite à sa retraite en 1965. Activiste de la cause afro-américaine, Brown a été l’organisateur du Cleveland Summit du 4 juin 1967, cette conférence de presse réunissant onze sportifs noirs en soutien à Muhammad Ali suite à son refus de rejoindre l’armée en pleine guerre du Vietnam. Évidemment, un casting digne de ce nom se doit d’avoir un scénario à la hauteur.

Inutile de rappeler à quel point Spike Lee est actif pour la communauté Afro-Américaine, luttant contre les nombreux problèmes de société que compte les États-Unis; que cela soit par ses prises de position via la presse, mais aussi par ses films. Le synopsis de ce film va bien au-delà du sport et du basket-ball en dénonçant toute cette controverse derrière le sport universitaire gangrené par les affaires d’argents et de pot-de-vin. En tant qu’athlète courtisé, il doit choisir sa fac, autrement dit, le choix le plus important de toute sa vie. Le parcours est semé d’embûches. Jesus Shuttleworth se voit confronté à des problèmes d’argent et doit s’occuper seul de sa petite sœur. Le réalisateur soulève là une autre problématique  : la dure réalité des quartiers pauvres. En bon New-Yorkais qu’il est, Spike Lee a évidemment choisi la Big Apple comme lieu de tournage mais pas seulement. Les 23 jours de réalisation sont également partagés entre Chicago, Los Angeles, Brooklyn, la Caroline du Nord ou encore la Virginie. Le scénario traite des histoires de violences conjugales et dénonce la faiblesse du système carcéral américain par la corruption des gouverneurs. Tous ces sujets tabous sur la société américaine font de ce long-métrage une référence récompensé.

Spike Lee à l’occasion du 25eme anniversaire de He Got Game (Slam Magazine)

Dans le sillage de la maison de production 40 Acres and a mule filmworks, le film se retrouve projeté à la première place du box-office lors de la semaine qui suit sa sortie en salle ; une première dans la carrière de Spike Lee. Malgré un chiffre d’affaires de $21,5 millions pour un budget de $25 millions, ne vous y détrompez pas, il reste un succès. Dès la fin d’année, les récompenses sont au rendez-vous. He got game se retrouve nommé à l’Acapulco Black Film Festival de 1999 avec le trophée de meilleur acteur pour Denzel Washington, de meilleur réalisateur et meilleur scénario pour Spike Lee. Lors de du NAA CP Image Awards de cette même année, Denzel Washington remporte une nouvelle fois le trophée de meilleur acteur, Zelda Harris celui de meilleure jeune actrice en plus du trophée de meilleur film. Dans la foulée, Ray Allen est nommé meilleure révélation masculine de l’année au MTV Movie Award. Il faut attendre deux ans pour voir l’œuvre arriver dans les salles en France pour un total de 22 212 entées.

Pour les fan de basket cherchant à se créer une culture cinématographique, He got game est un incontournable, sans aucun doute le film le plus réaliste de son époque. Les scènes de jeu sont réelles avec des vrais basketteurs à l’instar de Coach Carter, Above the rim ou Blue Chips qui ne comportent pas uniquement des joueurs. De plus, Spike Lee apporte un certain engagement sur plusieurs terrains que l’on ne retrouve pas autant dans les autres films de basket de l’époque faisant de ce film une véritable œuvre artistique à part entière. L’occasion au passage de voir Denzel Washington chausser ses Jordan XIII, afro au vent, enchaînant les shoots aux côté du jeune prodige qu’était Ray Allen avec son tir en suspension d’une grande pureté. Par la suite, une rumeur au début des années 2010 a laissé prétendre à une partie II où Ray Allen replonge dans son rôle de Jesus Shuttleworth cette fois en fin de carrière NBA… finalement le projet ne voit pas le jour.

Dans la filmographie de Spike, He got Game occupe une place importante parmi ses plus grandes réalisations. Les amateurs de cinéma et de balle orange ont pu profiter du talent du natif de New-York qui se devait d’ajouter sa pierre à l’édifice d’une culture si chère aux yeux des Américains. Dans l’imaginaire collectif, ce film reste encore aujourd’hui iconique si bien que Ray Allen a adopté le surnom de… Jesus. La bande son He Got Game de Public Enemy en featuring avec Stephen Stills résonne encore dans mémoires sans prendre une seule ride.

Une B.O signée Public Ennemy
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About Léo Daulon-Nicolas (14 Articles)
Etudiant en L2 Information-Communication dans l'objectif d'entrer dans le monde journalisme. Beaucoup de sujets historiques avec un peu d'actualité sur la NBA et le basket en général, l'histoire n'a pas fini d'être racontée dans un devoir de mémoire des plus grandes légendes.

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