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Don Meineke, à jamais le premier

Portrait

Montage Une : Laurent Rullier pour Basket Retro

A l’aube de la saison 1952-1953, le commissionnaire Maurice Podoloff introduisit la première récompense individuelle de fin de saison. Nommée dans un premier temps “Eddie Gottlieb Trophy”, cette distinction devait récompenser le meilleur rookie de l’exercice. Le tout premier lauréat sera le pivot des Fort Wayne Pistons, un dénommé Don Meineke. Retour sur la carrière d’un joueur méconnu. 

DE SANS DIPLOME A STAR UNIVERSITAIRE

On sait peu de chose sur lui. Don “Monk” Meineke est né le 30 octobre 1929 dans une famille modeste de Dayton, dans l’Ohio. Peu assidu à l’école, il abandonne dans un premier temps ses études à l’âge de 16 ans pour travailler dans l’usine locale de la firme General Motors. Un choix de vie qu’il va vite regretter en découvrant la rudesse du travail à la chaine. En 1947, il reprend finalement ses études au sein de la Wilbur Wright High School, établissement où il fera justement la découverte du basket-ball. Bien que déjà âgé de 18 ans lorsqu’il intègre l’équipe de son lycée, Don Meineke s’appuie sur des qualités physiques indiscutables, mesurant près de deux mètres pour quatre-vingt-quatorze kilos. Ainsi, lorsqu’il termine sa scolarité en 1949, il reçoit plusieurs propositions de bourse sportive. Attaché à sa ville natale, il s’engage avec l’équipe universitaire locale des Dayton Flyers.  

Rapidement installé comme pivot titulaire, “Monk” Meineke s’impose comme un des intérieurs les plus dominant de la Men’s Independent Conference. A l’aide d’une présence constante au rebond et d’une bonne palette offensive au poste, il termine sa saison freshman avec 15.9 points de moyenne, à 45% de réussite au tir et 73% de réussite au lancer franc en trente-deux matchs. Cette première année encourageante sur le circuit universitaire lui permet ainsi de s’imposer comme l’élément central du programme. Bien que limité par quelques pépins physiques la saison suivante, il affiche une belle progression et signera même une performance historique en inscrivant 49 points sur un match ! Jusqu’en 1974 et les 52 points de Don Smith, Don Meineke sera ainsi le détenteur du record au scoring sur un match avec les Flyers. Il prendra part à vingt-trois rencontres sur l’exercice 1950-1951, pour 28.7 points, 15.7 rebonds et 4.4 passes de moyenne, à 51% au tir et 76% au lancer franc. 

 

Bien que productives, ces deux saisons se concluent avec un parfum d’inachevé. En effet, Dayton ne parvient pas à obtenir sa qualification pour la prestigieuse March Madness. Un projet pour lequel Tom Blackburn avait été recruté en 1947 en devenant le premier entraîneur à plein temps engagé par l’université. Dayton viendra finalement à bout de la malédiction l’année suivante en décrochant vingt-huit succès en trente-trois rencontres ce qui lui ouvrira pour la première fois les portes du NCAA Tournament. Don Meineke y est pour beaucoup avec 21.1 points, 11.7 rebonds et 2.7 passes par match sur sa saison junior. Ces performances lui valent une nomination par les médias dans la Consensus All-America Second Team. Petit Poucet du tournoi, les Flyers feront plus que de la figuration durant sur cette édition 1952 en venant à bout de Princeton au premier tour (77-61) avant de chuter lourdement en demi-finale régionale contre Illinois (61-80). Cette défaite marque la fin de la troisième et dernière saison de “Monk” Meineke sous les couleurs des Flyers. Véritable légende sur le campus de Dayton, il aura joué 96 matchs en trois ans avec l’université. Avec 1866 points, il demeure jusqu’en 1966 le meilleur marqueur de l’histoire du programme et occupe encore aujourd’hui la sixième place de ce classement.  

Désormais fort d’un statut de joueur reconnu sur le circuit NCAA, Don Meineke prend la décision d’inscrire son nom à la draft NBA, sa bonne cote lui donnant toutes les chances d’être sélectionné. C’est chose faite le 26 avril 1952 où il est appelé en douzième position par les Fort Wayne Pistons. Le pivot fait son entrée dans la grande ligue à vingt-trois ans sans se douter qu’il écrirait, à sa façon, une page de l’histoire.  

UNE SAISON ROOKIE A JAMAIS DANS L’HISTOIRE

Pour la première fois de sa vie, Don Meineke se retrouve à devoir quitter Dayton et son Ohio natal. Heureusement pour lui, la ville de Fort Wayne où évolue sa franchise se trouve dans l’Indiana voisin, à deux petites heures de route. Dirigé par Paul Birch, l’équipe sort d’une saison en négatif (vingt-neuf victoires et trente-sept défaites sur l’exercice 1951-1952) conclue par une élimination au premier tour des playoffs. Avec un effectif compétitif mené par le All-Star Larry Foust, les Pistons peuvent se permettre de rêver du titre dans une ligue qui ne compte encore que dix franchises. Après tout, n’ont-ils pas atteint les finales deux ans plus tôt ? Don Meineke n’a d’ailleurs pas été la seule addition faite à l’effectif durant l’intersaison. L’équipe possédait également le troisième choix de la draft, lui permettant ainsi de mettre la main sur l’arrière de Duke, Dick Groat.  

Rapidement, l’ancienne star de Dayton s’installe avec succès dans la rotation, prenant part à soixante-huit matchs sur soixante-neuf, dont la majorité en tant que titulaire. Il signera d’ailleurs son record en carrière de points et de rebonds sur un match moins d’un mois après ses débuts, le 7 décembre face aux Knicks, en cumulant vingt-sept unités et dix-sept prises. Seul bémol, Don Meineke commet des fautes…beaucoup de fautes. Il va ainsi entrer dans l’histoire en étant expulsé à vingt-six reprises pour six fautes durant la saison, un record qui tient encore de nos jours ! En trente-trois minutes de temps de jeu moyen, l’intérieur de Fort Wayne commet 4,9 fautes par match, un chiffre là aussi sans égal depuis.  

Fort heureusement, si l’année rookie en question est à ce point historique, ce n’est pas en raison de ce record peu enviable. En effet, le commissionnaire Maurice Podoloff met en place avant le début de l’exercice 1952-1953 la première récompense individuelle officielle de fin de saison. Dénommée dans un premier temps “Eddie Gottlieb Trophy” en hommage à l’entraineur des Philadelphia Warriors, cette distinction serait dorénavant remise chaque année au joueur ayant réalisé la meilleure saison rookie. En réalité, cette récompense était déjà attribuée depuis 1947 par un panel de médias, mais sans pour autant être reconnue par les instances de la ligue qui ne décernait alors aucun trophée à titre individuel. Il faudra notamment attendre 1955 pour que le titre de MVP de la saison régulière soit introduit. Fraichement drafté, Don Meineke fait donc parti des joueurs éligibles à cette nouvelle récompense. Néanmoins, la concurrence est au rendez-vous, à commencer par son coéquipier Dick Groat, lui aussi titulaire au sein des Pistons, sans oublier le futur hall of famer Clyde Lovellette des Minneapolis Lakers. 

Les semaines et les matchs s’enchaînent, et petit à petit, Don Meineke s’affirme comme un candidat très sérieux pour le trophée. Certes, ses sorties sont irrégulières au possible et ses statistiques loin d’être exceptionnelles, mais son rôle de premier plan dans une franchise au bilan correct lui permet de se placer parmi les favoris. Il faut également souligner la faible concurrence proposée par les autres joueurs de la cuvée 1952, dont seulement douze des cent-six joueurs sélectionnés évolueront plus d’une saison dans la ligue. A l’issue de la phase régulière, les Fort Wayne Pistons décrochent sans difficulté leur ticket pour les playoffs avec un bilan en net amélioration de trente-six victoires pour trente-trois défaites, soit le cinquième de la ligue. Pour sa première année dans la ligue, Monk Meineke aura pris part à soixante-huit rencontres avec un temps de jeu moyen de trente-trois minutes par match. Il est ainsi le troisième joueur le plus utilisé par le coach Birch derrière Larry Foust et Fred Schaus. Du côté des débutants, seul le pivot des Baltimore Bullets Don Henriksen affiche une moyenne de minute par match supérieure. Ces minutes passées sur le parquet sont également productives puisqu’il tourne à 10.7 points, 6.9 rebonds et 2.2 passes de moyenne sur l’ensemble de la saison, le plaçant là aussi indéniablement parmi les rookies les plus impactant.  

 

Alors que la postseason doit débuter, la ligue réunit en mars 1953 un panel de journalistes pour décerner le tout premier titre individuel de l’histoire. Bien qu’aucun détail sur le vote n’ait été communiqué à l’époque, on peut imaginer que le scrutin fut longtemps indécis et disputé pour désigner le meilleur joueur d’une cuvée d’où nul ne sort réellement du lot. L’information sera finalement dévoilée dans les journaux le lendemain matin : Don “Monk” Meineke remporte le “Eddie Gottlieb Trophy”, le faisant ainsi rentrer dans l’histoire comme le tout premier rookie de l’année ! 

UNE PERFORMANCE SANS SUITE

Si ses débuts dans la grande ligue pouvaient laisser présager une belle carrière, avec à la clé une récompense individuelle, Don Meineke ne parviendra jamais à confirmer les attentes qui découlèrent de sa première saison. Éliminés en demi-finale de conférence lors des playoffs 1953, les Pistons se renforcent durant l’intersaison avec la draft du futur All-Star Jack Molinas, devenu tristement célèbre pour son implication dans des scandales de paris. Les bonnes performances de ce dernier, qui évolue au même poste que Meineke, vont grandement impacter son temps de jeu. Sur les soixante-et-onze matchs qu’il jouera sur l’ensemble de l’exercice 1953-1954, il ne passe plus que vingt minutes en moyenne sur les parquets, contre trente-trois la saison précédente. Son impact va en pâtir avec un scoring de plus en plus irrégulier, passant de 10,7 points par match à 5,7. Petit à petit, l’intérieur de 24 ans recule dans la rotation de Paul Birch. Fort Wayne terminera la saison avec un bilan en légère amélioration de quarante victoires pour trente-deux défaites, avant de sortir par la petite porte dès le premier tour des playoffs.  

Cette désillusion engendrera la fin du mandat de Birch sur le banc des Pistons et l’arrivée de Charles Eckman. Un changement qui sera grandement bénéfique en termes de niveau de jeu, mais beaucoup moins pour Don Meineke qui verra son utilisation diminuée un peu plus, avec un temps de jeu moyen qui atteint désormais à peine les quinze minutes par rencontre. C’est donc essentiellement du banc qu’il assistera à la première grande saison de l’histoire des Pistons, la franchise terminant en tête de sa conférence à l’issue de la phase régulière. Un excellent bilan auquel il contribuera avec ses 5,8 points et 3,6 rebonds par match. Les acquis de la saison régulière vont ensuite se confirmer pour Fort Wayne qui atteindra les finales NBA 1955 en éliminant les Minneapolis Lakers avant de chuter à un pas du titre face aux Syracuse Nationals dans une série qui ira jusqu’au match sept. Auteur de cinq points et quatre rebonds de moyenne sur les seules finales de sa carrière, Don Meineke vient de disputer sa dernière rencontre avec les Pistons. Il sera en effet échangé le 30 septembre 1955 contre Odie Spears et envoyé vers les Rochester Royals. 

 

Désormais dans l’État de New York, “Monk” Meineke se retrouve dans une équipe en reconstruction avec des ambitions bien moindres de que ce qu’il avait pu connaître du côté de Fort Wayne. Utilisé en sorti de banc, ses statistiques vont connaître une légère amélioration, avec dorénavant 7,1 points et 4,6 rebonds de moyenne en dix-huit minutes par match. Sans surprise, l’équipe de Bobby Wanzer n’obtiendra pas son ticket pour les playoffs à l’issue de la saison, terminant dans le négatif avec un bilan de trente-et-une victoires pour quarante-et-une défaites. N’entrant pas dans les plans de la franchise sur le long terme, il sera échangé aux Lakers, puis coupé. Désormais sans contrat et fatigué du basket professionnel, il met un terme à sa carrière en 1956 à 26 ans et après quatre années dans la ligue. Une retraite qui ne sera finalement que temporaire puisqu’il rechaussera ses converses dès la saison suivante. Signé par son ancienne franchise des Royals qui évolue désormais à Cincinnati, Don Meineke occupera un rôle de vétéran dans ce qui sera, cette fois-ci pour de bon, sa dernière saison. Plus performante sur le terrain, l’équipe parviendra à décrocher sa qualification pour les playoffs au terme d’une régulière conclue avec trente-trois succès pour trente-neuf revers. Comme un symbole, c’est son ancienne franchise des Pistons qui enverra Don Meineke à la retraite en éliminant les Royals au premier tour. Le pivot de 28 ans aura tout de même joué soixante-huit matchs pour sa dernière année dans la ligue, compilant 4,9 points et 3,4 rebonds de moyenne.  

Après cinq saisons passées sur les parquets NBA, Don Meineke se retire du basket professionnel pour se reconvertir dans le monde des affaires où il fera carrière. Il aura disputé 343 matchs dans la grande ligue pour des statistiques légèrement inférieures à sept points et cinq rebonds. Décédé dans sa ville natale de Dayton le 3 septembre 2013, il restera à jamais dans l’histoire comme le tout premier rookie de l’année. Comme quoi, un passage bref peut suffire pour laisser une trace indélébile.  

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