Héros inattendu du sixième match, Steve Kerr devient l’un des artisans du titre des Bulls le 13 juin 1997, épaulant Michael Jordan grâce à un shoot ultra décisif  dans les dernières secondes.

Les finales NBA sont souvent constituées de belles histoires qui forgent leurs légendes. Celle de Steve Kerr en fait partie.

Fils d’un diplomate américain basé au proche-Orient, le jeune Kerr a d’abord passé son enfance au Liban et en Égypte avant de revenir sur le continent américain pour y passer son cursus universitaire au sein de la prestigieuse équipe des Wildcats de l’Arizona. Petit et peu athlétique, le joueur dispose cependant d’une arme redoutable : un shoot fiable qui fait souvent mouche (ou plutôt « swoosh »). Cette aptitude de shooteur patenté lui vaudra d’ailleurs l’honneur de faire partie de la  sélection américaine pour les championnats du Monde de 1986 en Espagne. Après une saison manquée à cause d’une blessure au genou, Kerr revient dans l’équipe pour disputer le Final Four NCAA en 1988.

Drafté par les Phoenix Suns en 1988, il est rapidement transféré aux Cleveland Cavaliers l’année suivante. Role player en sortie de banc pour balancer des tirs à longue distance, l’homme devient vite  l’un des spécialistes du genre. C’est durant l’été 1993 qu’il signe à Chicago, dans une équipe alors en pleine reconstruction au lendemain de la première retraite de Sa Majesté. Utilisé à bon escient par Phil Jackson, il trouve vite sa place dans la rotation des Bulls pour apporter ses points en sortie de banc derrière B.J Armstrong, Ron Harper ou bien encore  Pete Myers. 1995 voit le retour aux affaires de Michael Jordan qui ne manque pas de le chahuter, voire de le provoquer, à l’entrainement. Une façon pour lui de tester le cran et la fiabilité du shooteur dans les moments chauds. Bon sang ne saurait mentir et celui de Kerr se montre généralement froid puisqu’ il contribue au succès des 72 victoires acquises par les Bulls au terme d’une saison 1995-1996 ponctuée par un titre face aux (regrettés ) Sonics de Kemp & Payton.

En quête du doublé l’année suivante,  Chicago compte de nouveau sur la plus fine gâchette de la ligue dans ses rangs. Un titre confirmé par l’un des meilleurs pourcentages à trois points en carrière de l’histoire (45.4%) et par un trophée glané  au All Star Game de Cleveland lors du concours de tirs à trois points face à Tim Legler. La contribution du remplaçant se montre une nouvelle fois capitale dans le succès de l’équipe. En relais du duo légendaire en attaque, ses posts shoots donnent souvent des solutions alternatives aux schémas tactiques mis en place par Phil Jackson et son staff.

Après un parcours sans véritables embuches en Playoffs, les Bulls vont faire face à l’éternel duo de choc de l’Utah. Emmenés par John Stockton & Karl malone, les Jazz se présentent comme un adversaire de choix pour contester leur suprématie. Une prédiction qui se vérifie tout au long d’une série indécise en finale, avec des fins de matchs souvent serrés. Steve Kerr n’est surement pas le premier nom qui vient à l’esprit des fans des Bulls quand on imagine le joueur désigné pour prendre le tir décisif. Et pourtant, le destin semble en avoir décidé autrement en ce 13 juin 1997 . En menant par 3 victoires à  2, ce Game 6 s’annonce capital pour Chicago afin de décrocher ce nouveau titre tant convoité.

Alors que le tableau d’affichage affiche le score de 86 partout  et qu’il reste moins de 30  secondes à jouer,  Michael Jordan part en direction du cercle grâce à l’un de ses fameux drives. Les Jazz font immédiatement le choix de lui barrer la route, et  c’est fort  logiquement que John Stockton vient en aide à Byron Russell pour faire une prise à deux. Un choix défensif prédit par Jordan et Steve Kerr lui-même sur le temps mort qui précède l’action, faisant déjà  la preuve de son fort QI Basket à cette époque. En anticipant sur la tactique des Jazz, Jordan permet au numéro 25 de se trouver complètement démarqué en tête de raquette. Une erreur fatale que les hommes en pourpres vont immédiatement payer.

Un choix tactique au résultat escompté depuis le départ de l’action, comme le confie la star des Bulls après la rencontre:

«Quand Phil a mis en place la tactique, tout le monde dans la salle et tout le monde devant sa télévision pensait que j’allais avoir la balle. J’ai alors regardé Steve et je lui ait dit « C’est à toi de jouer maintenant » parce que je savais que John Stockton allait venir en aide sur moi, le libérant alors pour le trouver facilement sur une passe. Ce soir Steve Kerr a gagné mon respect »

L’homme providentiel de ce sixième match va à nouveau connaitre les honneurs suprêmes en contribuant au second triplé de Chicago, avant de terminer sa carrière sous le maillot des Spurs pour y décrocher deux nouvelles bagues en 1999 puis en 2003. Après avoir connu les frissons des finales en tant que joueur, c’est dans le costume de l’entraineur que Steve Kerr a de nouveau rendez-vous avec l’histoire. Fin stratège malgré son manque d’expérience à la tête d’une équipe, il emmène une formidable équipe des Warriors dans la course au titre de 2015, quarante ans après leur premier sacre en 1975.

Montage Une : Julien Mc Laughlin