1er mars 2004, la JDA Dijon, l’équipe « Cendrillon » de la Semaine des As
France
La deuxième édition de la Semaine des As s’est déroulée en 2004 à Mulhouse. Bien que l’ASVEL, le Mans ou encore le tenant du titre Pau-Orthez étaient les favoris, c’est le petit poucet dijonnais qui a créé la sensation, en remportant tous ses matchs avec une marge minime. Retour sur cet exploit du 1er mars 2004 avec Nicolas Faure, alors coach de la JDA.
« On s’est qualifiés miraculeusement pour la semaine des As en 2004. Nous avions pourtant commencé fort avec cinq victoires en autant de matchs en début de saison, puis suite à une baisse de régime, nous sommes sortis du top 8 à la 16ème journée au profit de Cholet. C’est lors de la 17ème journée que nous connaissons les qualifiés pour la semaine des As. Cholet perd contre Toulon, et nous battons le Havre, ce qui nous permet de récupérer le dernier spot qualificatif !
Nous nous rendons à Mulhouse sans préparation spécifique. On joue l’ASVEL le jeudi en quarts de finale, sans Bruno Hamm, Dimitri Lauwers et Rowan Barrett. On est en effectif réduit, on doit être sept joueurs à l’échauffement. L’équipe est juste renforcée par Thierry Zig, arrivé en qualité de pigiste, à qui un surmaillot n’a même pas été fourni… »
L’ASVEL a subi une désillusion avec une élimination prématurée en Euroleague, mais reste un prétendant plus que sérieux pour remporter cette semaine des As. Portés par les 17 points de Karim Souchu, les rhôdaniens n’arrivent toutefois pas à prendre le large face à Dijon. Paccelis Morlende n’est pas économisé par Nicolas Faure. En l’absence de meneurs de rotation, il évolue 40 minutes, et score 24 points. Les intérieurs abattent un travail remarquable face à la raquette de l’ASVEL : Jérôme Monnet marque 13 points, Boniface N’Dong rajoute 14 points, 6 rebonds et 3 contres, enfin Vato Natsvlishvili souffle le chaud et le froid avec 9 points (à 3/10) et 11 rebonds, mais 7 pertes de balles. Sorti du banc, le jeune Viktor Sanidzike (17 ans) assure 18 minutes de bonne facture avec 5 points, 4 rebonds et 1 contre.
Jetant leurs forces dans la bataille, les dijonnais mènent en fin de match 75 à 73. Balle à l’ASVEL et temps mort. Nicolas Faure se rappelle :
« Avec Eric Lecerf, mon assistant, nous avions demandé depuis le début de saison aux joueurs de faire systématiquement faute lorsque nous défendions la dernière balle, pour envoyer les adversaires aux lancers-francs. Nous préférions ne pas subir cette dernière possession, et au contraire en regagner une pour décider du sort du match. Mais sur le temps mort, je décide de faire l’inverse : on défend la dernière balle de l’ASVEL, sans faute ! Mon capitaine Laurent Bernard est interloqué, puisqu’on n’avait jamais choisi cette option depuis le début de saison. Et ça marche ! »
Le choix est payant, l’ASVEL ne marque pas et la JDA file vers les quarts de finale, contre toute attente.
« Après le match, on monte dans le bus, et on se rend compte au bout de quelques minutes que le chauffeur ne prend pas la direction de l’hôtel. Je lui signale, sa réponse est culte : « bah non, on rentre à Dijon, le bus n’a été réservé que pour la journée… ». Appel téléphonique depuis le bus, et les dirigeants dijonnais prennent les choses en main, demi-tour, on rentre à l’hôtel. Du coup, nous n’avions qu’un jeu de maillots, et pas assez de tenues de rechange, nous ne pensions pas être qualifiés pour le tour suivant. »
Le vendredi est une journée de repos, où le staff achète quelques affaires supplémentaires dans les boutiques de Mulhouse.
La demi-finale oppose la JDA à Nancy, entraîné par Sylvain Lautié. Ces derniers ont fait chuter en ¼ de finale le tenant du titre, l’Elan Béarnais.
Nicolas Faure voit revenir pour ce match son scoreur canadien Rowan Barrett, qui n’avait pas pu disputer le quart face à l’ASVEL.
Dijon réalise un match de trainard, étant relégué de 10 points en deuxième période. C’est à ce moment que Nicolas Faure tente un coup de poker : il fait rentrer Marcin Stefanski, qui n’avait joué que 4 minutes deux jours avant. Il joue en poste 4, en isolation face à Cyril Julian, et assure 8 points en 11 minutes. C’est le tournant du match.
Dijon mène 79-77 à une vingtaine de secondes de la fin du match. Temps mort nancéien.
« Ils ont la balle, on est dans la même configuration que face à l’ASVEL. Je dis aux gars « on défend, sans faute ». Je le sens, et contrairement à l’avant-veille, les joueurs y croient aussi. »
Le pari est à nouveau payant, Nancy n’arrivant pas à scorer sur la dernière possession. Victoire en demi-finale de Dijon, qui rallie la finale face au Mans.
On peut à nouveau souligner la performance du secteur intérieur, avec les 9 points (mais à 1/8) et 10 rebonds de Vato Natsvlishvili, les 12 points et 7 rebonds de Jérôme Monnet, l’apport en joker de Stefanski, et les 6 points de Boniface N’Dong en 9 minutes. Au sujet de ce dernier, Nicolas Faure raconte :
« En début de saison, nous avions au poste de pivot Derrick Davenport. En raison de performances irrégulières, nous avons choisi de nous séparer de lui. Après avoir essayé Lee Benson, qui présentait un parcours atypique avec un séjour en prison, nous sommes tombés sur Boniface N’Dong qui venait d’être coupé de Giessen, en Allemagne. J’ai de suite accroché sur le personnage : cultivé, parlant plusieurs langues, à l’écoute, bosseur… A cette époque, rien ne laissait envisager qu’il ferait une aussi grande carrière. Une sacré bonne pioche, tant sportivement qu’humainement. »
Lors de la conférence de presse, Nicolas Faure déclare avec humour qu’il n’a pas prévu assez d’affaires de rechange, et qu’avec un départ prévu pour Toulon dès le lundi matin pour la FIBA Cup, sa femme n’allait pas être ravie. Cela contraste avec les déclarations de son adversaire du jour Sylvain Lautié, qui fustige l’attitude et le manque de professionnalisme de certains de ses joueurs. Certains sont sortis la veille du match et n’ont pas été productifs. L’un d’entre eux a même prétexté une blessure, obligeant le meneur Randolph Childress à jouer 40 minutes par manque de rotation.
La finale oppose la JDA Dijon au Mans. Cela doit être l’occasion pour Vincent Collet de faire gagner un trophée aux sarthois. Depuis qu’il a pris l’équipe en mains en 2000, Le Mans a toujours été bien placé, mais jamais gagnant. Face au petit poucet de ce tournoi, c’est l’occasion de commencer à remplir l’armoire à trophée.
Malgré une rencontre délicate pour les manceaux (ils termineront à 21 balles perdues !), l’abattage de Sandro Nicevic et Rashon Turner leur permet de prendre jusqu’à 10 points d’avance dans le dernier quart-temps. C’est alors que Vato Natsvlishvili sort de sa boite, avec deux coups de folie qui remettent Dijon sur les rails.
« Il venait de perdre coup sur coup sa mère et son frère, deux ou trois semaines avant la semaine des As. Il n’était donc pas dans les meilleures dispositions pour jouer. Et pourtant, alors que le Mans semblait se diriger vers la victoire, il a tout donné pour nous permettre de recoller au score. »
Sur la fin de match, Paccelis Morlende récupère un rebond défensif, et va marquer après un coast-to-coast, permettant à Dijon de mener 61 à 60. Puis une faute envoie Rowan Barrett sur la ligne après un rebond défensif sur l’attaque mancelle suivante.
Pour la troisième fois en autant de match, c’est l’adversaire de la JDA qui aura la dernière balle de la rencontre. Lors du temps-mort précédant les lancers-francs de Barrett, Nicolas Faure demande une fois de plus à ses joueurs de défendre sans faire faute.
Rowan Barrett met le premier lancer-franc, permettant à la JDA de mener 62 à 60, mais manque le second. Rebond du Mans, et dernière possession du match pour les sarthois. Le Mans cherche à donner la balle à Jurica Ruzic, son shooteur attitré (45% à 3 points). Le tir est ouvert, mais ne rentre pas !
Les joueurs de la JDA ont remporté cette Semaine des As contre toute attente, gagnant chaque match de deux petits points. L’équipe « Cendrillon » de ce tournoi a mis en avant des qualités collectives et humaines, face à de plus grosses cylindrées. Paccelis Morlende réalise un tournoi de grande qualité, avec 16,3 points, 4,5 rebonds et 3,3 passes décisives, en jouant 113 minutes sur les 120 possibles. Dans la foulée de leur performance, les dijonnais n’ont pas eu le temps de se reposer, dès le lendemain matin, ils repartaient pour Toulon afin de disputer le Final Four de la Conférence Ouest de la FIBA Cup. Ils remporteront également cette épreuve.
TABLEAU DU TOURNOI
Quart de finale
- Dijon – ASVEL 75-73
- Nancy – Pau-Orthez 73-68
- Le Mans – Le Havre 79-73
- Chalon – Gravelines 85-80
Demi-finales
- Dijon – Nancy 79-77
- Le Mans – Chalon 65-63
Finale
- Dijon – Le Mans 62-60
LE RESUME DE LA FINALE EN 3 PARTIES
Crédits photo: Basket News, Maxi-Basket, le Livre d’Or du basket 2004
Un grand merci à Nicolas Faure pour sa disponibilité
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