Paul Westphal, l’arrière prolifique de l’Arizona
Portrait

Véritable scoreur dans l’âme, athlétique, pétri de talent, excellent gestionnaire et surtout incroyablement spectaculaire, Né le 30 novembre 1950, Paul Westphal était un joueur atypique. Basket Retro revient aujourd’hui, sur l’un des arrières les plus prolifiques d’une période méconnue de la NBA.
DES DÉBUTS PEU COMMUNS
Né à Torrance en Californie, Paul Westphal, tout juste sorti du lycée attisait les convoitises de toutes les grandes universités américaines. Il opte pour rester dans son Etat natal et rejoint par conséquent les Trojans d’USC (University of South California).
Le prodige blanc avait un jeu taillé pour la NBA et son basket rugueux. Débutant la dernière année de son cursus universitaire à USC, Westphal et les siens créèrent la surprise la saison dernière. Jouant la carte de la jeunesse à fond, les californiens furent invaincus tout au long de l’année. Seulement, ils tombèrent sur un os. Leur voisin et rivaux d’UCLA (University of California Los-Angeles), qui réussirent à les maintenir en échec à deux reprises. Ils furent plus tard, victimes d’une aberration du système universitaire. Celui-ci ne permettant une qualification au tour suivant que pour les premiers de chaque conférence. USC finit deuxième, vous connaissez la suite…
C’est logiquement un Paul Westphal revanchard qui se place une nouvelle fois en travers du chemin des Bruins, bien remis du départ de Lew Alcindor (Kareem Abdul Jabbar de son nom actuel), durant la saison 1971-1972. Cependant, son équipe est nouvelle fois balayée par la puissante formation de Los Angeles. Cette dernière est sacrée championne NCAA pour la sixième fois consécutive. Sur le plan collectif, la déception est immense, cependant elle fut en tout point bénéfique au jeune prodige.
Sport Illustrated le décrivait comme : « l’arrière le plus complet du pays et le plus excitant à voir jouer du basketball universitaire. »
Sa superbe saison senior minée par cet échec, le convainc de céder au chant des sirènes provenant de la NBA. Il se présente à la draft de 1972. Sélectionné par les Boston Celtics en dixième position, nous pouvons penser, et ce à juste titre, que Red Auerbach avait beaucoup de flair et surtout de chance. Suite à la retraite de Bill Russell, le mythique entraineur de la Green Nation avait du pain sur la planche pour reconstruire l’effectif des Celtics. Quand Westphal est choisi, le processus est bien entamé. Contre toute attente, Boston a l’occasion de revenir en finale trois années plus tard. Néanmoins, ils échouent malgré un Dave Cowens héroïque, un Jo Jo White en feu et surtout un John Havlicek excellent mais qui se démet l’épaule. Ce dernier fut contraint de jouer les trois derniers matchs de la finale de conférence main gauche. Derrière White qui passe près de 40 minutes sur les parquets en Play-Offs, Westphal se morfond sur le banc.
UNE OPPORTUNITÉ ET UN NOUVEAU DÉPART A LA CLÉ
Le jeune rookie a l’occasion de voir son temps de jeu doubler dès sa saison sophomore. Boston confirme son statut d’outsider de la conférence Est et domine tous les débats. Sa contribution dans le jeu des Celtics est réelle, mais bien souvent irrégulière. En finale, contre les Milwaukee Bucks de Kareem Abdul-Jabbar et d’Oscar Robertson, il joue un rôle important dans le succès des siens au terme du Game 2, en marquant 14 points à 7/8 aux tirs. Dans le match 7, il est envoyé au charbon par Red Auerbach et récolte le droit de jouer 31 minutes. Il ne décevra pas son monde en réalisant une partition plus que correcte : 12 points et 6 passes. Dans le sillage d’un Dave Cowens immense face au géant Abdul-Jabbar, Boston Town parvient à remporter le Saint Graal.
Pour la Green Army, l’avenir est radieux à l’image d’un Jo Jo White en pleine force de l’âge. Etant l’un des leaders incontournables de l’équipe, White est à l’apogée de sa carrière. Boston peut désormais se passer des services du californien. Il est transféré un an plus tard aux Phoenix Suns contre Charlie Scott, arrière polyvalent qui n’était plus en odeur de sainteté dans l’Arizona.
Westphal peut enfin exprimer la totalité de son potentiel. Il explose et double ses statistiques. Avec la réinsertion du tant attendu Connie Hawkins et sous les ordres de John McLeod. Le phénomène peut se targuer d’être au bon endroit au bon moment. En cette période, Phoenix est une équipe jeune dans le microcosme NBA, cette franchise avait tout à écrire dans l’histoire de la ligue nord-américaine. Détenteur d’un potentiel formidable, elle possédait en ses rangs un troisième joueur de renom: Alvan Adams, quatrième pick de la draft 1975. Celui-ci fut élu rookie de l’année et sera par la suite un futur All-Star. Pivot doté d’une rare polyvalence et extrêmement longiligne, il forme avec Curtis Perry et Garfield Heard l’un des trios d’intérieurs les plus solides, robustes et efficaces de l’époque.
A déjà 25 ans et des années passées à apprendre les ficelles du métier sous la houlette d’Auerbach, Westphal est un diamant brut qu’il faut polir à tout prix. Cela, McLeod l’avait compris puisque ce fut le premier à pousser son protégé, afin qu’il prenne les commandes du jeu des Suns. Avec un effectif totalement remanié durant l’été, les protégés de McLeod affichaient un bilan peu flatteur de 18 victoires pour 27 défaites début février.
LE DÉCLIC ET UN PARCOURS DANTESQUE EN PLAY-OFFS
Phoenix terminera sur les chapeaux de roue derrière le tenant du titre, Golden State dans une conférence Ouest des plus homogènes. Les joueurs de McLeod gagnent le droit d’êtres exemptés de premier tour. Par la suite, ils parviennent pour la première fois de leur histoire à passer le second tour des Play-Offs en éliminant les Supersonics de Seattle. En finales de conférence, ils retrouvent les Warriors. Le premier match est remporté haut la main par Rick Barry et ses coéquipiers.
Dans la conférence Est, le destin est en marche, l’ancienne team de Paul Westphal parvient à se hisser en finales de conférence en disposant d’une piètre équipe de Buffalo. Ils s’apprêtent à rencontrer les Cavaliers de Cleveland et font figure d’archi-favoris. Tout le monde en NBA rêvait déjà d’une opposition de styles entre Rick Barry des Warriors et John Havlicek des Celtics, tous deux élus MVP des deux dernières finales. C’était oublier un troisième larron tout aussi talentueux et assoiffé de victoire. David Haberstam, voyait en lui une idole blanche capable d’improviser des actions inouïes et de planter des poster-dunks mémorables… comme un noir. Véritable menace offensive en lay-up, sur fade-away, dans le périmètre ou encore derrière l’arc. Westphal était le modèle de l’Amérique noire.
Selon les dires de David Haberstam: « Paul Westphal jouait comme un black à leurs yeux. »
« West » réussit l’impossible. A savoir évincer les Warriors d’Oakland de la course au titre. Elevé au rang de leader de l’équipe, il guide les siens sur une route étroite et sinueuse. Menés 1-0, 2-1 puis 3-2, les Suns ne voulaient pas s’avouer vaincus. Mais ils ne baissèrent pas les bras. A la surprise générale, Phoenix gagne donc la sixième rencontre de la série et remporte, sur le fil, le septième match dans la baie de San-Francisco. Après trois saisons frustrantes passées à cirer le banc des Boston Celtics, Westphal avait enfin l’occasion de prendre sa revanche sur son ancienne équipe, vainqueur de Cavaliers peu dangereux.
Le premier match de la finale est un désastre pour le leader des Suns qui se troue complètement. Ce dernier laisse par la même occasion Jo Jo White et Dave Cowens exprimer la totalité de leur talent. Le premier se balade littéralement, le second martyrise la peinture (avec un triple double monumental à la clé : 25 points, 21 rebonds et 10 passes). Avec un pauvre 4/17 aux tirs, West prend la mesure de l’importance du match qu’il vient de perdre. Les Suns doivent se reprendre. Personne ne doutait de leur capacité à égaliser face à des Celtics en pleine bourre. Malheureusement, au match suivant, ils ne firent pas mieux et s’inclinèrent lourdement au Boston Garden.
Sous le soleil éclatant de l’Arizona, les Suns retrouvent leur jeu et leur joie de vivre. Ils explosent les Bostoniens pour revenir 2 à 1 dans la finale. Cependant, les hommes de McLeod ne s’arrêtent pas la. Ces derniers remportèrent alors les games 3 et 4. Les Boston Celtics se retrouvant acculés au pied du mur, Phoenix y croyait ! Le game 5 fut monumental et inoubliable. Souvent qualifié de plus beau match de l’histoire de la NBA, il se jouera en trois prolongations, la dernière arrachée au buzzer grâce à Garfield Heard.
« Une véritable partie d’échecs. » Comme le déclarait des années plus tard l’arrière vedette de PHX.
Le Boston Garden bouillonnait, Havlicek rentre un tir magistral, les supporters étaient en transe et fêtaient déjà la victoire de leur franchise. Pourtant, il restait encore un petit peu de temps à jouer. Havlicek n’avait pas inscrit le tir de la victoire ! Westphal resta calme malgré toute la pression qui reposait sur ses épaules. Il commettra dans la foulée l’action la plus décisive de toute sa carrière. A savoir demander un temps mort alors que son équipe n’en possédait plus. La sanction signée Richie Powers, arbitre de la rencontre, est immédiate. Faute technique pour le magicien et lancer-francs en faveurs des Celtics. Cependant, la règle de l’époque l’avantageait puisqu’elle permit aux Suns de recouvrer la possession de la balle.
Le tir de Heard, comme écrit précédemment, fut parfait, troisième prolongation. Malheureusement pour les joueurs de l’Arizona, ils s’inclineront devant le puissant armada Bostonien. Le mérite était bel et bien présent. Paul Westphal avait presque réussi son coup… Les Phoenix Suns étaient à deux doigts de faire avaler son cigare à Red Auerbach. L’entraineur bostonien avait de son coté, bel et bien failli commettre l’une des erreurs les plus retentissantes de l’histoire en montant l’un des arrières les plus prolifiques de son époque, contre sa propre équipe.
UN SUCCÈS MÉRITÉ PUIS UNE LENTE DESCENTE AUX ENFERS
La saison suivante fut catastrophique pour le club de l’Arizona. Westphal a néanmoins été sélectionné au All Star Game. Possesseurs du cinquième choix de la draft qui suivait, les Suns jettent leur dévolu sur Walter Davis, le shooteur prolifique de North Carolina. Ce même Davis remporte la distinction de Rookie Of The Year comme son coéquipier Alvan Adams quelques années en arrière.
Parfait complément de Westphal, Davis forme avec lui l’un des duos les plus explosifs et tonitruants de la ligue. Dès leur première année, ils entrent dans le livre des records. Seulement, c’était sans compter sur leur coach qui décide de réduire leur temps de jeu pour permettre l’éclosion d’autres pépites du banc. En dépit de cela, Dave et West deviennent les seuls joueurs d’un big two capable de marquer tous deux 24 pts de moyenne sur une saison régulière en moins de 32 minutes par matchs (24.2 pour le premier et 25.2 pour le second).
A l’issue de la saison 1979-1980, Paul Westphal a été transféré aux Supersonics de Seattle, ayant toujours un immense talent, il marquait encore 16.9 pts et distribuerait 4.1 pds. Puis, ce fut le début d’une lente descente aux enfers. Le shooting guard est une nouvelle fois expédié à l’autre bout du pays, aux New York Knicks, ou il tint un rôle mineur dans une rotation déjà bien huilée. En 1983, West retourne à Phoenix, chez les Suns, ce n’est plus que l’ombre du fabuleux joueur que la franchise avait chapardé aux Celtics. Blessé, l’arrière ne participa qu’à 59 matchs sur les 82 de l’exercice en affichant de médiocres statistiques. Pour finir, l’ancien homme fort des Suns prit sa retraite dans un anonymat des plus inquiétants.
UNE CARRIÈRE DE COACH DÉCEVANTE
Etant sorti par la petite porte de la grande ligue, Westphal connu par ailleurs une longue carrière NBA en tant qu’entraineur ponctuée par de nombreux échecs répétitifs. Assistant de Cotton Fitzsimmons aux Phoenix Suns, jusqu’en 1992, il finit par prendre les rênes de l’équipe. Dirigeant d’une main de fer l’effectif composé de très bon joueurs tels que Charles Barkley, Kevin Johnson ou encore Dan Majerle, il permet aux Suns de retrouver les finales NBA. Malheureusement, les protégés de Westphal s’inclinent dans un game 6 totalisant trois prolongations… contre les Bulls de Chicago et non face aux Golden State Warriors. Ironie du destin ? Mystère.
Lors de l’ère Westphal en tant qu’Head Coach, les Suns atteignirent toujours les Play-Offs. Seulement, à l’image d’un George Karl aux Nuggets de Denver, Westphal ne parvint plus jamais à emmener ses hommes en finales NBA. En 1995-1996, il est remplacé et remercié par la direction de la franchise. Par la suite, il ronge son frein en tant qu’assistant d’un lycée d’Arizona, pendant deux longues années. Un beau jour, il est rappelé en NBA, aux Seattle Supersonics. Son expérience dure de 1998 à 2001. Après un énième licenciement, il retourne en NCAA, de 2001 à 2006. Coach West y entraine la modeste université de Pepperdine, avant d’être licencié à cause de mauvais résultats en 2006. L’année suivante, il surprend son monde et rejoint Avery Johnson en tant qu’assistant aux Dallas Mavericks. Pour finir ce long parcours, Westphal dépose ses valises aux Kings de Sacramento, qu’il dirige de 2009 à 2012. Ce fut pour lui une expérience peu convaincante avec à la clé : 51 victoires pour 120 défaites et d’énormes difficultés à gérer les egos, notamment celui de DeMarcus Cousins.
D’où une conclusion évidente, Westphal, avec autant de temps de jeu que des joueurs comme George Gervin, David Thompson ou encore Alex English, Kobe Bryant et Michael Jordan toutes proportions gardées, aurait pu figurer dans le top 5 des meilleurs scoreurs de l’histoire du basketball américain. Qu’est ce qui, aujourd’hui fait qu’il est une légende oubliée de la grande ligue ? Son étiquette d’éternel looser ? Ses saisons en dent de scie avec Boston et ensuite avec Seattle, ou encore New-York, après son excellent passage aux Suns ? Quoiqu’il en soit, cet arrière d’1m93 a révolutionné la ligue quand elle commençait à prendre de l’ampleur. Nous ne pouvons lui souhaiter qu’un succès futur en tant que coach, en dépit de son mauvais passage à Sacramento de 2009 à 2012, qui limite ses chances de retrouver un job à l’heure actuelle.
SES STATS NBA
- Points : 12 809 soit 15.1 par match
- Rebonds : 1580 soit 1.9 par match
- Passes Décisives : 3591 soit 4.4 par match
- Taux de réussite : 50.4%
- 823 matchs de saison régulière disputés
- 107 matchs de play-offs
SON PALMARES
- 5 fois All-Star
- 3 sélections dans la All-NBA First Team
- 1 sélection dans la All-NBA Second Team
- 5ème meilleur marqueur de l’histoire des Phoenix Suns (9564 pts)
- 6ème meilleur marqueur NBA en 1977-1978 avec 25.2 pts par matchs
- 7ème meilleur marqueur NBA en 1978-1979 avec 24.0 pts par matchs
- Champion NBA avec les Boston Celtics en 1973-1974
Crédits photo : NBAE/Getty Images
Défaite en finale NBA que ce soit en tant que joueur ou qu’en tant que coach à chaque fois pour les Suns… Il n’aura pas été loin de devenir une légende pour ce club…
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Effectivement… Il fait parti des joueurs qui auraient bien mérités d’avoir plus de récompenses collectives !
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