[Portrait] Predrag « Sasha » Danilovic, le shoot comme seule patrie
Portrait
24 trophées en 12 ans de carrière ! S’il n’est pas le plus connu de la génération star de l’ex Yougoslavie des 80’s, Sasha Danilovic est l’un des plus titrés. Pur produit des Balkans, Predrag a arpenté le Vieux Continent avec pour seule arme, son shoot. Un sniper contraint à l’exil dans un pays en guerre qui a emballé l’Italie toute entière et mis l’Europe à ses pieds.
Niveau géopolitique de l’ex Yougoslavie, Predrag Danilovic est un beau mélange des Balkans : un père Serbe, une mère originaire d’Herzégovine et une naissance à Sarajevo en Bosnie. Même dans son prénom, on retrouve la dualité de ses origines. Son paternel voulait le nommer Predrag, tandis que sa mère préférait Sasha. A l’état civil ce sera donc Predrag, mais tout le monde l’appellera Sasha, un surnom traditionnellement donné aux Aleksandar. La famille s’installe dans le nouveau quartier urbain de Novi Grad. Des grandes tours HLM made in 70’s où le jeune Sasha peut s’essayer au foot et au basket en bas de chez lui. Avec son physique longiligne à l’adolescence, il s’oriente vers la balle orange et passe beaucoup de temps sur les playgrounds. Assez pour être recruté par le club phare de la ville, le KK Bosna, dont il intègre les sections jeunes. L’ancienne gloire de l’équipe, Mladen Ostojic, alors en charge des espoirs, voit en lui un potentiel certain. Et il n’est pas le seul ! Au cours d’un tournoi inter-régional pendant l’été 1985, le célèbre meneur du Partizan Belgrade, Zelko Obradovic, tombe sous le charme du gamin. Il en fait immédiatement part à son coach de Dusko Vujosevic. Ce dernier va lui-même faire la cour à la famille Danilovic. La partie n’est pas gagnée, Milan, le père de Sasha étant un fervent supporter de l’Etoile Rouge Belgrade, le grand rival du Partizan. Devant l’insistance de son fils pour rallier l’ennemi, Milan craque. Sasha avouera plus tard qu’il avait dit à son paternel qu’il irait à pied à Belgrade s’il le fallait pour rejoindre le Partizan.
Le jeune shooteur Serbe a vaincu le veto familial, mais va devoir s’incliner devant celui de la Ligue Yougoslave de Basket. Même s’il n’est pas sous contrat professionnel avec le KK Bosna, le règlement de la Fédération stipule que le club formateur doit donner son aval pour finaliser le transfert. Soudain consciente qu’elle détient un joyau, l’équipe de Sarajevo refuse de le laisser partir. Au début de la saison 1986-87, Danilovic s’installe à Belgrade tout en sachant qu’il ne pourra pas participer au moindre match officiel. Quelques années après, il en peste encore :
« Bosna ne m’appréciait pas du tout lorsque j’y étais. Ils prévoyaient même de me prêter à d’autres clubs de la région de Sarajevo. Ce que je ne voulais vraiment pas. Mais, quand Dusko Vujosevic a commencé à me tourner autour, ils ont soudainement souhaité me garder. En plus, les présidents du Bosna et du Partizan étaient de bons amis depuis le temps où ils étaient joueurs, du coup il y avait une gêne entre eux et mon cas a traîné pendant un moment. »

Sasha met à profit cette longue interdiction pour s’entraîner avec les pros du Partizan. A seulement 16 ans, il passe 6 à 8 heures par jour à shooter et se rapproche du coach Vujosevic qui devient son mentor. Avec l’aide du club, il met Danilovic dans les meilleures prédispositions : un logement près des infrastructures sportives et un emploi du temps aménagé pour ses études. Tout est prêt pour son envol la saison suivante. Malheureusement, Bosna fait de nouveau appel auprès de la Ligue et obtient gain de cause. Sasha va de nouveau passer une saison au ban. Cette fois, le Partizan l’envoie aux USA dans le Tennessee pour finir son cursus scolaire et jouer au basket à la Cookeville High School. De retour sur ses terres à 17 ans, il écume nuit et jour le playground du Blok 45, le terrain le plus compétitif de Yougoslavie. Sans un seul match officiel dans les jambes, il intègre la sélection nationale des moins de 18 ans pour participer à l’EuroBasket. Il tourne à 9.4 points sur le tournoi et signe 14 points en finale pour remporter la médaille d’or. Première récompense d’une carrière qui peut enfin commencer !
En 1988, à peine majeur, Sasha intègre l’équipe du Partizan en sortie de banc. Il faut dire qu’il connaît le groupe par cœur après deux ans passés à le côtoyer aux entraînements. Avec sa douzaine de minutes sur le parquet, Danilovic n’a pas peur de prendre ses responsabilités aux shoots et se distingue par une défense très agressive. Au-delà de ses 5.6 points de moyenne, il est là pour apprendre aux côtés des Vlade Divac, Zarko Paspalj, Sasha Djordjevic ou du vétéran Zelko Obradovic. Une équipe hyper talentueuse qui s’incline en championnat face au Jugoplastika Split de Toni Kukoc, mais rafle deux trophées en une semaine. Le premier en Coupe Korac : défait de 13 points face à Cantu au match aller de la Finale, le Partizan prend sa revanche au match retour (101-82) devant 7000 spectateurs surchauffés. Pour sa première finale professionnelle européenne, Sasha totalise 20 points cruciaux pour les siens. Entre ces deux manches, les hommes de Vujosevic iront chercher la Coupe de Yougoslavie, toujours face au Jugoplastika. Mais, le plus beau reste à venir. A l’été 1989, Danilovic est retenu parmi les 12 pour participer à l’EuroBasket de Zagreb. La formation yougoslave a des allures de Dream Team des Balkans avec à son bord des légendes comme Toni Kukoc, Vlade Divac, Drazen Petrovic, Dino Radja, Stojko Vrankovic ou Jurij Zdovc. Les autres favoris, Grèce et Italie, ne peuvent rien faire face à l’armada Yougo, surclassés respectivement de 17 points et 21 points. Avec 8.2 points de moyenne sur la compétition, Sasha commence à se faire un nom sur la scène du Vieux Continent : 4 trophées en une saison, lourd à seulement 19 ans !

La suite est beaucoup moins rose. Divac et Paspalj font leurs valises pour la NBA et Djordjevic est appelé pour son service militaire. Quant à Danilovic, il se brise la jambe après 11 matches de championnat. Pendant des mois, il pratique une rééducation d’enfer et revient déterminé pour la saison 1990-1991. Avec 13,9 points de moyenne, Sasha s’affirme comme une menace redoutable offensivement et mène le Partizan à la deuxième place juste derrière Split. Il confirme son retour au plus haut niveau avec une seconde médaille d’or lors de l’Eurobasket 1991. En finale contre l’Italie, hôte de l’épreuve, il score 9 points pour une victoire aisée des Yougos devant 15.000 spectateurs médusés du Palais des Sports de Rome.
L’euphorie est de courte durée. La saison suivante, le pays entre en guerre avec des dégâts collatéraux immenses pour le sport. En pleine poudrière des Balkans, le championnat yougoslave se délocalise un peu partout en Europe et doit faire face aux forfaits des Slovènes et des Croates. Au Partizan, Danilovic devient un franchise player en exil : 21.8 points au niveau national et 19.4 points en Euroligue dont les matches à domicile sont joués à Fuenlabrada en Espagne pour plus de sécurité.

Comme pour la plupart de ses coéquipiers, le basket sert d’exutoire à Sasha, beaucoup plus préoccupé par la santé de ses proches. Après un doublé coupe-championnat sans grande saveur, il enchaîne avec une campagne européenne XXL. Quatrième du groupe B à l’issue des phases de poules, le Partizan se qualifie pour le Final Four en éliminant Bologne 2 à 1. Sur le match d’appui décisif en Italie, Danilovic score 23 points dans une victoire couperet (65-69). En demi-finale, il remet le couvert contre d’autres Italiens : une masterpiece contre Milan avec 22 points, 10 rebonds et 3 passes pour un succès 82 à 75. Et à la surprise générale, Belgrade vient à bout de la Joventut Badalone en Finale avec un shoot primé ultra-clutch d’Aleksandar Djordjevic à la dernière seconde. Si le meneur permet au Partizan d’empocher son premier titre en EuroLeague, c’est bien Danilovic le principal artisan de ce succès. Encore 25 points pour le sniper en finale avec des pourcentages excellents compte tenu de la défense sur lui : 9/16 aux tirs dont 2/4 derrière l’arc. Sasha est logiquement couronné du titre de MVP du Final Four. Sa dernière récompense avec le club yougoslave.
Au cours de cette année 1992, le contexte géopolitique dans les Balkans se complique. La Yougoslavie est démembrée et les compétitions sportives deviennent impossibles. Le Partizan de Danilovic restera dans l’Histoire comme le dernier champion du pays. Conséquence, les talents de la balle orange sont obligés de fuir. Sasha a sa porte de sortie toute trouvée. Ses énormes performances en Euroleague ont tapé dans l’œil des scouts NBA. Il est ainsi sélectionné à la 43ème position de la draft par les Warriors. Une place qui semble un parjure vu le talent du garçon, mais qui reste logique dans le contexte de l’époque. Que ce soit Petrovic (60ème en 1986), Divac (26ème en 1989), Radja (40ème en 1989) ou Kukoc (29ème en 1990), aucun de ses partenaires en sélection n’a été un lottery pick ! En parallèle, Danilovic reçoit une proposition de la Virtus Bologne. Intéressé, le shooteur pose trois conditions : que le club participe à l’Euroleague, que le meneur Roberto Brunamonti reste dans l’effectif et qu’une somme rondelette lui soit versée pour rémunération. Une fois, les deux premières exigences remplies, Sasha obtient un chèque de 900.000 dollars annuels pour faire pencher la balance. A l’instar de Djordjevic à Milan ou Kukoc à Trevise, Danilovic rejoint, donc, le contingent des ex Yougos en Italie.

Dans les nineties, la Lega est l’un des championnats les plus compétitifs du Vieux Continent. A 22 ans, Sasha Danilovic va pourtant s’affirmer comme l’une des stars les plus en vue. Dès sa première saison, il remporte le titre de champion d’Italie en tournant à 23,7 points (50,8% à 3pts, 60/118 !), playoffs confondus. Avec un bilan de 24 victoires pour 6 défaites, la Virtus Bologne roule sur la post-saison en finissant invaincu : les hommes du coach Ettore Messina éliminent tour à tour Pistoia (2-0), Cantu (2-0) et Trevise (3-0). Le début de l’âge d’or pour le club bolognais qui change de sponsor (de Knorr à Buckler), de salle (le PalaMalaguti 8650 places) et qui rafle deux autres championnats en 1994 et 1995. Trois titres en trois ans, partout où il déboule, Sasha empile les trophées. Sur sa dernière campagne, il est tout simplement écœurant de réalisme : 22.1 points à 53,5% aux tirs dont 35% de loin. Sa domination en Lega marque aussi un tournant dans sa carrière. Les conflits armés dans son pays natal sont fatals pour l’un de ses oncles restés à Sarajevo. Son sourire enjôleur disparaît. Changement d’attitude, l’arrière est désormais impassible sur le parquet. Froid comme une lame dans les matches sous pression, Danilovic enchaîne les shoots clutchs. Les médias transalpins font de lui Il Zar Freddo – le tsar froid – une machine à scorer imperturbable capable de se créer son propre tir ou décocher des flèches longue distance en catch and shoot.
Ses succès sur le sol italien ne doivent pas faire oublier ses déboires en Euroleague. Malgré des gros cartons individuels, Danilovic ne dépasse pas les quarts de finale, stoppé en 1993 par le Real Madrid et en 1994 par l’Olympiacos. Meilleur scoreur du championnat en 1995 avec 22.1 points sur 17 matches, il bute cette fois-ci sur le Panathinaikos. Mais, l’épisode le plus sombre reste ses débuts avec Bologne dans la compétition : le hasard du calendrier l’envoie au Cibona Zagreb en octobre 1992, faisant de lui le premier Serbe jouant en Croatie. Devant les tensions internes étouffantes, Djordjevic avait préféré jeter l’éponge avec son club de Milan. Pas Danilovic ! Encadré par deux gardes du corps dès son arrivée à l’aéroport puis escorté par des casques bleus à l’hôtel, il déclare aux médias que sa présence doit servir de diplomatie sportive. Le public ne l’entend pas de cette oreille et passe son temps à l’insulter. Résultat, 12 points avec un piteux 5/15 aux tirs pour Sasha. La vengeance aura lieu au match retour avec 23 points pour le Zar Freddo à 9/12 aux shoots pour une victoire fleuve 109 à 69 ! Quelques années plus tard, le Bolognais est revenu sur cet épisode :
« Je pensais qu’il y aurait des problèmes, mais je ne m’attendais certainement pas à autant de haine. 8000 personnes se sont présentées juste pour insulter un Serbe. Ce match n’a pas été facile du tout pour moi et vous pouvez le voir à mes stats. »
En pleine Guerre des Balkans, chaque compétition internationale est une bulle d’oxygène pour Sasha qui retrouve ses compatriotes. Avec ce qu’il reste de la Yougoslavie, il repart à la conquête de l’or à l’Eurobasket 1995. Respectivement premières de leur poule, la Croatie et la Yougoslavie sont attendues en finale. Mais, les Croates se font surprendre en demi par la Lituanie de Sarunas Marciulionis et Arvydas Sabonis. De son côté, Danilovic carbure à plein régime : 24 points en quart contre la France, 19 points contre la Grèce en demi et 23 points dans la victoire finale contre les Lituaniens… avec en prime le dunk de sa carrière sur la tête du pauvre Sabonis. Autre parenthèse enchantée internationale, l’Open McDonald’s de Munich, où le Serbe a l’occasion de s’étalonner aux NBAers. Les Phoenix Suns, invité du tournoi, ont bien du mal à museler le shooteur qui donne du fil à retordre à un Dan Majerle fraîchement All Star. A une époque où les joueurs Européens sont rares à obtenir une chance Outre-Atlantique, les USA font la découverte de Sasha, à l’image du commentateur et ancien coach Hubie Brown :
« Le prochain Toni Kukoc est peut-être un shooteur qui joue pour une équipe italienne sponsorisée par une marque de bière sans alcool. Jeudi soir, son maillot était aussi noir que ses cheveux, faisant ressortir son regard ténébreux. Predrag Danilovic est un travailleur acharné ce qui explique son expression très fermée, mais aussi sa mécanique de tir si efficace. C’est un shooteur fait pour la NBA, pas un scoreur, mais un shooteur. »

Dès la saison 1995-96, les américains vont pouvoir observer le phénomène de plus près. Après 3 ans en Italie, Sasha décide de franchir le grand pas en NBA avec un contrat 8 millions sur 4 ans. Entre sa draft par les Warriors en 1992 et son arrivée effective, Golden State a envoyé ses droits à Miami en échange de Rony Seikaly. A 25 ans, le défi qui l’attend est immense. La jeune franchise floridienne est ambitieuse avec l’arrivée de Pat Riley sur le banc. Le Heat a tourné la page Glen Rice et recruté Alonzo Mourning pour jouer les contenders à l’Est. Pour entourer le pivot, les shooteurs ne manquent pas dans l’effectif : Rex Chapman, Voshon Lenard, Kevin Gamble, Walt Williams… Pourtant Riley décide d’introniser le Serbe dans le 5. Pour ses grands débuts, Danilovic ne va pas le décevoir : 13.4 points à 43,6% longue distance après un gros de mois de compétition et un bilan de 11-8 pour le Heat. Mi-décembre en visite chez les Warriors, l’équipe qui a cru tôt en lui, Sasha retombe mal au sol et se blesse salement au poignet. Verdict : opération du scaphoïde droit et fin de saison régulière après 19 petits matches. Décevant quand on songe qu’avant ce drame, le shooteur avait trouvé son rythme de croisière en tournant à 19.0 points et 55,6% derrière l’arc sur ses deux dernières semaines. De retour pour les playoffs contre les Bulls, Sasha qui a perdu sa place de titulaire au profit de Chapman, est impuissant face au sweep de Jordan & Co.
Pour sa seconde saison avec le Heat, l’arrière fait tout pour retrouver son niveau et ça se voit. L’équipe s’est renforcée avec l’arrivée de Tim Hardaway à la mène et pour l’accompagner dans le backcourt c’est Sasha qui s’y colle avec 32 minutes en moyenne de temps de jeu. Fin 1996, il cumule 22 matches à plus de 10 points sur 28 possibles avec son statement game en NBA : un sublime 7/7 à 3 points au Madison Square Garden dans une victoire contre les Knicks ! Pourtant à la trade deadline, quand Pat Riley voit l’occasion d’ajouter une troisième star au duo Hardaway-Mourning, il n’hésite pas. Il transfère Danilovic et Kurt Thomas à Dallas contre Jamal Mashburn. Dans une équipe en pleine transition, Sasha ne sera que de passage, le temps de montrer aux Texans ses capacités aux shoots : 16.6 points de moyenne pour finir la saison.

Même s’il est installé confortablement aux States – une maison à Key Biscane notamment, l’île des riches quand il était à Miami – Danilovic a bien du mal à s’habituer au mode de vie américain. Aussi lorsque Bologne lui propose un contrat de 6 millions sur 6 ans, le Serbe accepte et rompt son deal en NBA. Retour en Italie dans une équipe de la Virtus (alors appelée Kinder Bologne) qui n’a plus remporté un seul trophée en son absence. Le Tsar est attendu comme le Messie en ville d’autant que les voisins de la Fortitudo (Teamsystem Bologne) commencent à lui faire de l’ombre avec une armada qui compte à son bord le meneur David Rivers, la gâchette Carlton Myers, la légende NBA Dominique Wilkins et le pivot international Gregor Fucka ! A 28 ans, en plein dans son prime, Danilovic va effectuer sans aucun doute la plus grosse saison collective de sa carrière. En Lega, le duel bolognais est dans toutes les têtes. Le derby passionne les fans bien au-delà de la ville. A l’issue de la régulière, Kinder et Teamsystem sont tout en haut du classement avec des bilans respectifs de 23-3 et 21-5… et se retrouvent logiquement en finale. Auparavant, Sasha a pris la peine d’écraser son record personnel pour éliminer Rome avec 47 points à 16/23 aux tirs ! Une perf qui lui vaut une sortie sous les projectiles divers et variés du public. Une ambiance très chaude qui a le mérite de le mettre dans le bain pour la finale, où un duel de titan contre l’autre gros scoreur de la Lega, Carlton Myers, l’attend. Les deux shooteurs ne manquent pas de testostérone sur le parquet et leurs coéquipiers sont obligés de les séparer à plusieurs reprises. Mené 2 à 1, le Kinder est dos au mur, mais arrache un Game 5 décisif après une victoire à l’arrachée (59-57), le troisième match de cette série qui se joue par 2 points d’écart ! La rencontre décisive entre le Kinder et Teamsystem est considérée comme le plus beau derby de l’Histoire en Italie. Distancé 72 à 68 à 20 secondes de la fin, Sacha prend ses responsabilités et décoche une flèche longue distance au-dessus de Dominique Wilkins qui touche légèrement le Serbe. Bilan : And1, action à 4 points ultra clutch validée et victoire en prolongation du Kinder face à un adversaire à terre après cette prouesse.

Pour compléter cette saison hors du commun, Danilovic va soulever le premier titre européen de l’Histoire de la Virtus Bologne. Après avoir sweepé les voisins de Teamsystem en quart, Sasha tombe malheureusement contre son autre club de cœur en demi, le Partizan Belgrade. Dans une victoire facile des Italiens, il n’en rajoute pas avec 10 petits points inscrits. Son énergie, il la garde pour la Finale contre l’AEK Athènes. Dans une opposition très défensive (58 à 44), Sasha ramène 13 points cruciaux. A ses côtés, Antoine Rigaudeau (14pts) et Hugo Sconochini (10pts) font le taf pour mettre la main sur le trophée. A 28 ans, Danilovic est sur le toit de l’Europe et reçoit tout naturellement le titre de MVP du Vieux Continent. En 1999, la Virtus rate de peu le back to back en Euroleague en s’inclinant en finale contre le Zalgiris Kaunas. Sasha se console quand même avec une Coupe d’Italie et une médaille de bronze à l’Eurobasket avec la Yougoslavie… la dernière de sa collection. Eliminé en quart de finale par la Lituanie lors des Jeux Olympiques de Sydney en 2000, Danilovic annonce dans la foulée sa retraite ! Un choc pour un joueur de 30 ans seulement au firmament de sa carrière sportive, mais un choix compréhensible quand on l’écoute en parler :
« Je me sens fatigué. Tout ce que j’ai accompli en tant que joueur, je l’ai fait grâce à un travail énorme à chaque entraînement. Je sens que je ne peux plus m’entraîner comme avant et je n’ai pas envie d’entacher ma réputation. En plus, je manque désormais d’ambition. J’ai déjà presque tout gagné. Ma femme Svetlana attend notre première fille et ma maison à Belgrade est terminée. Ça semble être le moment parfait pour mettre fin à ma carrière. »

Perdre son icone n’est jamais évident et la Virtus Bologne a honoré son tsar comme il fallait lors d’un match d’Euroleague, contre Belgrade bien sûr. Mais, Sasha n’est pas resté longtemps éloigné du monde du basket. Fin 2000, il devient vice-président du Partizan dirigé à l’époque par Divac. Le grand Vlade étant encore en activité, rapidement Danilovic s’inscrit comme le principal décisionnaire du club. Dans un pays profondément instable au début du siècle, il contribue à maintenir le Partizan sur l’échiquier européen. Il nomme notamment son ancien mentor Dusko Vujosevic sur le banc et s’active en coulisses pour le développement des jeunes. Résultat 9 titres nationaux consécutifs et une participation au Final Four en 2010. Devenu président du club en 2007, il n’abandonne son rôle qu’en 2015 pour laisser la main à Nikola Pekovic. Des succès en tant que dirigeant, des succès en tant que joueur, la carrière de Danilovic est un modèle. Le seul regret de Sasha ne pas avoir pu participer aux J.O. de 1992 contre la Dream Team avec une équipe yougoslave unie sous la même bannière :
« L’équipe nationale me manque. La dernière grande équipe de Yougoslavie a été celle qui a remporté les Championnats d’Europe à Rome en 1991. Le début de la catastrophe cela a été lorsqu’un appel téléphonique du gouvernement a exclu Zdovc, slovène, de la finale. Dans l’équipe, nous étions unis, parfois Aza Petrovic ou Arapovic faisaient des discours étranges et stupides à propos de la Croatie, mais quand il y avait Kukoc et Radja, ça allait. Nous avons pris soin de bien jouer, la politique n’avait rien à faire là. Dommage de ne plus avoir d’équipe nationale, j’ai envié la Croatie quand elle a fait les Jeux de Barcelone, juste parce qu’elle avait plus de diplomatie que nous. J’aurais aimé jouer contre elle. Pas par haine, mais pour nous mesurer sur le terrain, comme toujours. Moi, Divac, Paspalj, Djordjevic, Savic contre Petrovic, Kukoc, Radja, Komazec, Tabak. Magnifique, n’est-ce pas? Comme notre ligue était belle ! Pas beaucoup d’argent, mais tellement de colère »
SON PALMARES
- Vainqueur de l’Euroleague (1992, 1998)
- Vainqueur de la Coupe Korac (1989)
- Champion d’Italie (1993, 1994, 1995, 1998)
- Coupe d’Italie (1999)
- Champion de Yougoslavie (1992)
- Coupe de Yougoslavie (1989, 1992)
- Médaille d’or à l’EuroBasket (1989, 1991, 1995, 1997)
- Médaille d’argent olympique (1996)
- MVP du Final Four (1992)
- Meilleur Joueur Européen (1998)
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