Les Euros des Bleues – Prague 1956, Championnes… de l’ouest
Eurobasket
Espérer un podium à Prague en 1956 relevait de l’utopie tant les équipes de l’Est dominaient le basket européen chez les filles chez les garçons. La septième place décrochée par nos Bleues en faisaient des vice-championnes d’Europe… de l’Ouest.
Les Françaises sont arrivées à Prague en juin 1956 avec des ambitions forcément limitées. Certes, elles pouvaient se targuer d’une belle médaille de bronze obtenue au premier Championnat du Monde féminin trois ans plutôt au Chili derrière les Etats-Unis et le pays hôte. Mais tout le monde savait qu’il fallait relativiser ce résultat par le fait que la France et la Suisse en étaient les seules représentantes européennes. Aucune nation d’Europe de l’Est n’avait fait le voyage, (pour raison politique ? Sans doute). Que valaient les victoires contre le Pérou, le Brésil, l’Argentine et le Paraguay en 1953 ? Si chez les garçons le basket sud-américain pouvait être une référence, en était-il de même chez les filles ? Pas sûr.

Mado Cator et Giselle Mazel contre les Soviétiques en « amical » à Coubertin en février 1956 – Victoire de l’URSS 39 / 31
Le championnat d’Europe de 1954 en Yougoslavie a renvoyé la France vers une place plus modeste, 6e, derrière l’Union Soviétique, la Tchécoslovaquie, la Bulgarie, la Hongrie et la Yougoslavie. Une copie presque conforme à celui de 1952, (en URSS), où nos bleus finissaient 7e derrière l’Union soviétique, la Tchécoslovaquie, la Hongrie, la Bulgarie, la Pologne et l’Italie. Rien ne pouvait laisser penser qu’il en serait autrement à Prague.
SANS CHAMPIONNE DE FRANCE MAIS AVEC 5 MONTFERRANDAISES
Seules 5 des 14 joueuses sélectionnées ont disputé l’édition 54. En ces temps d’amateurisme réel, il était en effet difficile de pérenniser un effectif d’une compétition sur l’autre. Entre vie familiale et obligations professionnelles, les longues carrières en bleu étaient rares. Une Ginette Mazel totalisant 97 sélections en 11 ans, (1953-1964) ou une Annie Prugneau, 99 sélections en 15 ans, (1956-1970) faisant figure d’exception. Annie Prugneau justement, Suzy Bastié et Micheline Thomas n’ont disputé qu’un ou deux matchs amicaux auparavant. La vie en bleu de Micheline Thomas prit d’ailleurs fin au soir de l’ultime match pragois, comme pour Anne-Marie Colchen d’ailleurs, mais elle revendiquait 66 tuniques bleues. Pour deux d’entre elles, Marie-Claire Pertus et Andrée Hermet, le premier match du championnat, contre la Hongrie, représentait leur première cape. Difficile dans ces conditions de forger un collectif. A noter qu’aucune joueuse de l’équipe championne de France, l’US Ivry, n’était présente dans le roster et seules les sœurs Cator du PUC ont vécu la finale. Par contre l’AS Monferrand eétaits sureprésenté avec 4 joueuses dont les deux meilleures scoreuses, Edith Tavert et Mado Supt.
QUE DE VIOLENCE !
Ce championnat a été marqué par la violence. 2,5 % des jeunes femmes y ayant participé ont fini sur un brancard selon la commission médicale de la FFBB.
« Une fracture du péroné, une fracture des deux os de l’avant bras, une fracture du nez, une fracture de l’os de la face, une fracture de la cheville, et toutes ces bagatelles sans volonté de nuire, uniquement du fait de la combativité, de l’agressivité, de la parfaite condition physique des joueuses, qui leur faisaient prendre des risques sans rapport avec ce qu’elles pouvaient en redouter. » – Organe officiel de la FFBB, Oct. 1956
Mises en causes ? Ces « filles de l’Est » bien sûr ! Elles qui s’entrainaient avec des garçons. Par contre nos spécialistes fédéraux ont pu louer l’approche scientifique des techniciens tchèques qui avaient remarqué que le maniement de balle ne représentait que 12 % du temps globale et qu’il fallait adapter les entraînements en conséquence et travailler davantage les déplacements sans ballon, les courses, les chutes (?)… Ces mêmes spécialistes enviaient la Pologne qui avait eu deux mois et demie de préparation et qui ne comptait qu’une femme mariée et maman dans son effectif et soumettait ses joueuses à un stricte régime alimentaire.
« Quand pourrons-nous faire comprendre à nos joueuses que pour se présenter correctement à armes égales, il faut accepter une discipline totale ? Aussi bien alimentaire que physique en supprimant tous les soi-disant excitants, tel que : tabac, café, alcool, qui diminuent la précision et la rapidité au lieu de l’accélérer ? » – Organe officiel de la FFBB, Oct. 1956
LA FRANCE A SA PLACE
Les résultats furent ceux malheureusement attendus, trois défaites logiques contre les Hongroises, Bulgares et Tchécoslovaques et une qu’on pouvait qualifier de décevante contre une Italie qui cette fois là prit le leadership de l’Europe « de l’Ouest ». Pour le reste, le mur qui séparait l’Europe du Nord au Sud fut une fois de plus infranchissable. La France ne croisa jamais la route celles qui s’emparèrent du titre une fois de plus, les invincibles Soviétiques, qui prirent plaisir à concasser en phase de poule la pauvre Suisse, 153 / 25, la faible Autriche, 121 / 30 et les malheureux Pays-Bas, 91 /30. En finale, elles durent se contenter d’un petit 49 / 41 contre leurs « sœurs-ennemies » hongroises. Quatre mois plus tard, un autre match, tragique celui-ci, allait opposer l’URSS et la Hongrie dans les rues de Budapest insurgée.
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